Migreurop - Fondation Jean-Jaurès
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Démantèlement de la jungle de Calais : une opération en trompe-l’œil<br />
Le mardi suivant, la police a effectué une<br />
descente dans le camp : il y avait alors 82<br />
migrants, ils ont tous été embarqués. Les<br />
bénévoles ont ramassé les affaires car le<br />
camp allait être brûlé. Quand le camp a été<br />
détruit, la police est restée sur place pendant<br />
8-10 jours en permanence, alors que lorsque la<br />
<br />
sur place.<br />
Lorsque la mafia tchétchène est revenue,<br />
les Vietnamiens se sont défendus. Ils en ont<br />
coincé six. Les policiers sont arrivés et les<br />
Vietnamiens les ont remis à la police. Ce sont<br />
les Vietnamiens qui ont arrêté les Tchétchènes,<br />
pas la police.<br />
L’un des mafieux a été tabassé par des<br />
Vietnamiens en état de légitime défense contre<br />
une kalachnikov. Une enquête a été lancée et<br />
les Vietnamiens ont été interrogés plusieurs<br />
<br />
de prison. Depuis la rébellion, il n’y a plus de<br />
menace de la mafia. Recueilli le 25 janvier<br />
2010.<br />
S’agissant des mineurs (reconnus comme<br />
tels), on notera que sur les 125 qui ont été<br />
dispersés dans des foyers de diérentes régions<br />
de France, 30 avaient déjà disparu quelques<br />
heures après leur arrivée. Sans que les autorités<br />
ne paraissent s’en inquiéter particulièrement.<br />
« Les policiers m’ont arrêté le 22 septembre<br />
puis conduit jusqu’à Rennes, mais je suis<br />
revenu », raconte ainsi Alokze, 17 ans, qui dit<br />
avoir marché quatorze heures, puis pris deux<br />
trains, pour rentrer à Calais. « Rien que la nuit<br />
dernière, j’ai été arrêté quatre fois, puis chaque<br />
fois relâché. On ne comprend pas ce qu’ils cherchent<br />
16 ».<br />
Si certains migrants ont pu profiter du<br />
« lâchage de vannes » apparemment organisé<br />
juste avant l’évacuation de la jungle de Calais<br />
pour passer en Angleterre, beaucoup sont<br />
restés, ou plutôt sont revenus aussitôt. Selon<br />
des observateurs locaux, « symboliquement, il<br />
fallait faire disparaître, […] mais les gens ont<br />
vite dit que les migrants étaient encore là. […]<br />
Le 23 septembre [le lendemain], il y a eu de<br />
nouvelles arrivées à Calais ». D’après le site du<br />
16. Le Parisien, 30/09/2009.<br />
quotidien Le Monde, « trois jours après l’évacuation<br />
de la jungle, les associations ont commencé<br />
à voir refluer les migrants vers Calais.<br />
Dès jeudi, les associations constataient qu’après<br />
deux jours de moindre auence ils étaient aussi<br />
nombreux que les jours précédant le démantèle-<br />
ment de la “jungle” à venir chercher un repas.<br />
“Dans la queue du repas du soir, il y avait même<br />
des mineurs qui, emmenés mardi dans un centre<br />
d’accueil près de Metz, étaient passés à la télé le<br />
soir même pour dire que le foyer, c’était bien”,<br />
témoigne <strong>Jean</strong>-Claude Lenoir, de l’association<br />
Salam ».<br />
S’il n’a pas conduit à stopper l’activité<br />
des mafias, si aucun des migrants arrêtés le<br />
22 septembre n’était expulsable et si le nord-<br />
ouest de la France reste une terre d’attraction<br />
pour les exilés, le démantèlement de la jungle<br />
de Calais a-t-il au moins servi à protéger<br />
ceux dont il était censé révéler les besoins ? Le<br />
volet humanitaire de l’opération orait aux<br />
migrants interpellés deux alternatives à l’expulsion<br />
: la possibilité de demander l’asile, et<br />
l’aide au retour volontaire. La première a des<br />
allures de piège ; la seconde, de leurre.<br />
Le piège de l’asile<br />
Le ministre de l’Immigration insiste<br />
volontiers sur le fait qu’une faible proportion<br />
des migrants de Calais demande l’asile, ce<br />
qui désigne les autres comme des « clandestins<br />
» seulement soucieux d’utiliser la France<br />
comme tremplin vers le Royaume-Uni. C’est<br />
feindre d’oublier qu’en application du règlement<br />
Dublin II, une telle demande peut se<br />
traduire par un renvoi vers la Grèce ou l’Italie,<br />
où les conditions d’examen et d’attribution<br />
du statut de réfugiés sont dénoncées depuis<br />
longtemps par les organisations internationales.<br />
Sans compter la lenteur de la procédure,<br />
qui prive le demandeur de toute assistance 17 .<br />
17. Voir sur ce point la déclaration interassociative<br />
« Détruire les jungles : une fausse solution », 21 septembre<br />
2009, http://www.gisti.org/spip.php?article1696