Migreurop - Fondation Jean-Jaurès
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Mers ionienne et adriatique : retours forcés entre Italie et Grèce<br />
Devant cette situation, le HCR, dans un<br />
document du 15 avril 2008, a expressément<br />
recommandé aux gouvernements des pays<br />
européens de s’abstenir jusqu’à nouvel ordre<br />
de renvoyer, sur la base du règlement 343 de<br />
2003, dit « Dublin II », les demandeurs d’asile<br />
en Grèce, et Amnesty International a renouvelé<br />
ses critiques de l’action du gouvernement<br />
grec à l’égard des demandeurs d’asile 2 .<br />
Il est donc logique que de nombreux<br />
migrants, en particulier ceux qui auraient<br />
droit à une protection internationale, cherchent<br />
à fuir la Grèce pour rejoindre l’Italie.<br />
Certains tentent de traverser à pied la frontière<br />
terrestre, mais la route maritime vers les ports<br />
adriatiques reste la plus fréquentée. Ainsi, un<br />
grand nombre de migrants sont présents dans<br />
les ports grecs d’Igoumenitsa et de Patras (et<br />
dans une moindre mesure Corinthe et Corfou),<br />
d’où partent des ferries directs vers les<br />
ports italiens de Venise, Ancône, Bari et Brindisi.<br />
Ils se cachent dans ou sous les camions<br />
des transporteurs routiers qui embarquent<br />
sur ces bateaux : un voyage très dangereux où<br />
l’on peut mourir par asphyxie, froid ou écrasement.<br />
Les survivants risquent, une fois en<br />
Italie, d’être arrêtés par la police des frontières<br />
et refoulés. Il y a eu en 2008 plus de 5 000<br />
refoulements de l’Italie vers la Grèce, et 3 148<br />
en 2009. Il n’est pas rare de rencontrer des<br />
personnes qui ont tenté la traversée deux ou<br />
trois fois sans réussir à déposer une demande<br />
d’asile sur le territoire italien.<br />
Les polices portuaires grecque et italienne<br />
justifient ces refoulements, qui ne sont pas<br />
conformes au règlement Dublin II, par un<br />
accord bilatéral sur la « réadmission des personnes<br />
en situation irrégulière » conclu le 30<br />
mars 1999 en contradiction avec les règles<br />
communautaires, les conventions internationales<br />
et la loi italienne elle-même. En eet,<br />
nombre de refoulés d’Italie vers la Grèce le<br />
sont en violation de droits considérés comme<br />
fondamentaux, car ils sont arbitrairement pri-<br />
2. Amnesty International, Le piège de Dublin II. Transferts<br />
des demandeurs d’asile en Grèce, mars 2010.<br />
vés de leur liberté et de leur droit à la défense,<br />
contraints de signer des documents écrits<br />
dans une langue incompréhensible pour eux,<br />
et empêchés de déposer une demande d’asile<br />
politique.<br />
Ce n’est que récemment que la procédure<br />
des réadmissions de l’Italie vers la Grèce à été<br />
dénoncée publiquement par de nombreuses<br />
associations grecques et italiennes.<br />
Méthode. Ce rapport est le fruit de plusieurs<br />
missions effectuées par les membres et<br />
les partenaires de <strong>Migreurop</strong> sur les côtes<br />
italiennes et grecques, complétées par un<br />
travail de recherche et de documentation :<br />
— Filippo Furri, doctorant à l’EHESS :<br />
mission à Ancône en février 2010 et<br />
contribution à la rédaction sur Venise ;<br />
— Regina Mantanika : mission en Grèce,<br />
conjointement avec <strong>Migreurop</strong> et les<br />
associations Diktio et Antigone, dans le<br />
cadre des programmes de l’association<br />
française « Echanges et Partenariats » ;<br />
— Sara Prestianni, coordinatrice du réseau<br />
<strong>Migreurop</strong> : missions à Ancône en février 2010,<br />
et à Patras et Igoumenitsa en mars 2010 ;<br />
— Alessandra Sciurba, de l’association italienne<br />
Melting Pot : plusieurs missions en Grèce en<br />
2009 et mars 2010 (frontière adriatique et<br />
port de Venise).