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Migreurop - Fondation Jean-Jaurès

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se rendre dans le centre de transit à Debak et<br />

faire la demande de placement dans un centre<br />

d’accueil.<br />

Toujours en Pologne, la mise en rétention<br />

des demandeurs d’asile est prévue par la<br />

loi sur la protection des étrangers (art. 87),<br />

notamment : s’il faut les identifier, s’il est<br />

considéré qu’ils « abusent » de la procédure<br />

de demande d’asile ou s’ils représentent un<br />

danger pour la vie, la santé et la sécurité des<br />

autres, s’ils constituent une menace à l’ordre<br />

public. Le demandeur d’asile peut également<br />

être arrêté s’il a passé ou a essayé de passer la<br />

frontière irrégulièrement. L’application de<br />

tous ces critères semble très arbitraire. Selon<br />

la même loi (art. 89), c’est un juge qui décide<br />

de l’enfermement pour une durée allant de 30<br />

à 60 jours.<br />

En Roumanie, la durée maximale de<br />

rétention est de 6 mois pour les étrangers<br />

en situation irrégulière, de 2 ans pour les<br />

personnes sous mesure d’expulsion, et théoriquement<br />

jusqu’à 30 ans pour les étrangers<br />

dits « indésirables » (cf. supra). La décision de<br />

placement en rétention pour les étrangers en<br />

situation irrégulière est prononcée pour une<br />

durée initiale de 30 jours, avec un délai de 5<br />

jours pour déposer un recours. En Roumanie,<br />

si le juge prolonge leur rétention, ils savent<br />

que c’est automatiquement pour 5 mois, à<br />

moins qu’on ne les renvoie avant.<br />

De telles durées d’enfermement, excessives<br />

et attentatoires à la libre circulation des<br />

migrants, sont inutiles de l’aveu même des<br />

autorités : selon le rapport de l’ORI pour<br />

2007, les deux tiers des éloignements ont<br />

lieu en moyenne avant le seizième jour. Cela<br />

semble également contraire à l’article 5-1 F<br />

de la Convention européenne de sauvergarde<br />

des droits de l’homme (CEDH), qui précise<br />

que le placement en rétention doit avoir pour<br />

but l’éloignement de la personne et, pour<br />

les mêmes raisons, à la directive « retour » 34 .<br />

Or certaines nationalités ne sont quasiment<br />

jamais renvoyées de Roumanie : les Somaliens,<br />

les Irakiens, les Afghans. Comment<br />

justifier alors leur placement en rétention<br />

pendant 6 mois sinon par la volonté de les<br />

tenir à l’écart et de satisfaire aux orientations<br />

répressives de l’UE ? Dans la perspective de la<br />

transposition de la directive retour, des modi-<br />

cations législatives pourraient avoir lieu, à<br />

moins que la Roumanie ne choisisse de retenir<br />

la clause de l’article 2-2-b de la directive<br />

qui permet d’exclure du champ d’application<br />

les étrangers « faisant l’objet d’une sanction<br />

pénale prévoyant ou ayant pour conséquence<br />

leur retour ». Dès lors ces derniers pourraient<br />

toujours être retenus pour une durée supérieure<br />

à 18 mois.<br />

Dans les deux pays enfin, il est possible<br />

qu’un étranger soit placé plusieurs fois en<br />

rétention dans la même année et/ou qu’il<br />

connaisse des périodes de rétention dans<br />

d’autres pays européens (c’est en général le cas<br />

des « dublinés »). Pour ces personnes – paradoxe<br />

s’ils sont interpellés pour tentative de<br />

quitter le pays –, au stress du renvoi s’ajoute<br />

un sentiment d’insécurité à demeurer en Roumanie<br />

ou en Pologne qui les incite à poursuivre<br />

leur route.<br />

Automutilations. En raison de la durée<br />

d’enfermement, certaines personnes retenues<br />

s’automutilent pour sortir et pour être<br />

transférées à l’hôpital ou dans un centre<br />

ouvert. Les deux exemples ci-dessous sont<br />

ceux de personnes suivies par les juristes de<br />

l’association Halina Niec.<br />

En février 2010, plusieurs personnes<br />

interviewées dans le centre de rétention<br />

de Lesznowola (près de Varsovie) ont parlé<br />

d’une personne qui avait essayé de s’égorger<br />

quelques jours plus tôt. La jeune femme,<br />

d’origine tchétchène, est venue en Pologne<br />

avec ses cinq enfants. Elle avait déjà été<br />

enfermée pendant cinq mois. Elle a tenté de<br />

34. Directive 115/2008 sur le retour des étrangers en<br />

situation irrégulière, qui xe à 18 mois la durée maximale<br />

de rétention, dont l’article 15.4 prévoit que « toute<br />

détention préalable doit être aussi brève que possible ».<br />

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