Migreurop - Fondation Jean-Jaurès
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Pologne, Roumanie : être de bons éléments dans l’UE élargie<br />
Renvois dans le cadre de<br />
l’accord de réadmission entre la<br />
Pologne et le Vietnam<br />
Pour des raisons historiques liées aux<br />
échanges entre États socialistes, une communauté<br />
vietnamienne s’est constituée au l du<br />
temps en Pologne et atteint près de 30 000<br />
personnes aujourd’hui. Une partie d’entre<br />
elles sont restées en Pologne en situation irrégulière<br />
et ne parviennent pas à obtenir un<br />
titre de séjour. Selon des juristes intervenant<br />
en centre de rétention, il est dicile d’aider<br />
les Vietnamiens à régulariser leur situation ;<br />
ils sont parfois en Pologne depuis 15-20 ans<br />
et ils ont toujours travaillé sans papiers. Ils<br />
sont arrêtés le plus souvent au « marché de<br />
10 ans » à Varsovie ou dans d’autres places<br />
de marché dans les grandes villes. Il y a aussi<br />
ceux qui arrivent par la Russie, avec un visa<br />
russe. Les personnes qui leur vendent ces visas<br />
leur font croire qu’ils pourront circuler librement<br />
dans l’espace Schengen. Ils arrivent en<br />
eet en Pologne et n’ont même pas peur de se<br />
faire contrôler. En rétention, ils essaient parfois<br />
de demander l’asile. Mais, il est presque<br />
impossible d’obtenir une protection pour ces<br />
migrants 52 .<br />
Un accord de réadmission a été signé<br />
avec le Vietnam en 2004. Selon les dispositions<br />
de cet accord, les autorités vietnamiennes<br />
(consulaires ou diplomatiques) peuvent<br />
intervenir en Pologne pour aider à déterminer<br />
l’identité des personnes sans document en<br />
vue de leur renvoi au Vietnam. La première<br />
visite des fonctionnaires vietnamiens a eu lieu<br />
en 2007. En 2009, quatre visites ont été eectuées<br />
et 57 personnes ont été renvoyées. En<br />
2009, 245 personnes d’origine vietnamienne<br />
ont été déportées, dont 57 sur la base d’une<br />
décision de réadmission, 183 d’une décision<br />
d’expulsion, 3 d’une procédure Dublin et<br />
deux autrement 53 .<br />
52. Entretiens, novembre 2009-mars 2010.<br />
53. Source : statistiques des gardes-frontière.<br />
La direction des gardes-frontière polonais<br />
se défend de faire courir des risques de persécution<br />
aux personnes réadmises au Vietnam,<br />
mais des activistes et des chercheurs s’opposent<br />
ouvertement à cette coopération du gouvernement<br />
polonais avec les autorités vietnamiennes.<br />
Selon le responsable de la section<br />
Extrême-Orient de l’Institut de Paderewski à<br />
Varsovie 54 , beaucoup auraient peur de demander<br />
l’asile car ils seraient alors considérés<br />
comme des ennemis par le gouvernement vietnamien,<br />
et leurs familles au pays pourraient<br />
être menacées ; ils préfèrent donc rester sans<br />
papiers et s’exposent à un retour forcé. Il ajoute<br />
que les fonctionnaires vietnamiens n’identient<br />
que les personnes qui sont entrées ou<br />
sont soupçonnées d’entrer en conit avec les<br />
autorités. Ce type de point de vue est partagé<br />
par l’association Liberté de parole à Varsovie.<br />
Témoignage. Il arrive [au Vietnam], depuis<br />
des années 1990, que la milice te fasse une<br />
proposition : soit tu vas en prison, soit tu pars<br />
à l’étranger. Mais il faut payer 4 000 dollars.<br />
Et tous ces Vietnamiens, quand ils entendent<br />
qu’ils peuvent partir, ils sont contents. Mais,<br />
au Vietnam on gagne on moyenne 20 dollars<br />
par mois, donc les gens doivent s’endetter<br />
pour pouvoir partir. […] Le mécanisme de<br />
remboursement est très long, ... il commence<br />
déjà à Moscou. Les gens vont à Moscou avec<br />
un passeport ou un visa, mais souvent, ils ne<br />
voient même pas ces documents. […] Ils sont<br />
directement pris en charge par une équipe. On<br />
leur prend les bagages, l’argent. Les jeunes<br />
hommes vont travailler sans documents, les<br />
jeunes femmes sont exploitées. […] Depuis plus<br />
de dix ans, c’est comme ça. […] Ils travaillent<br />
à Moscou, en Ukraine ou en Pologne. Leur<br />
voyage continue et il est toujours désastreux.<br />
Ces gens vont en Ukraine dans un bus. Puis, ils<br />
traversent la forêt à pied. Ils sont enfermés<br />
quelque part là bas. Les femmes doivent<br />
travailler déjà pendant le voyage. Quelquesunes<br />
ont voulu témoigner, mais d’autres ne<br />
veulent pas. On estime, que pendant les dix<br />
dernières années, 4 000 Vietnamiens ont<br />
traversé la frontière polonaise dans le cadre<br />
54. R. Krzyszton, Imigranci – goscie czy intruzi<br />
(« Les immigrés – invités ou indésirables ? ») Przeglad<br />
powszechny, n°2, 2009.