Les Antilles - Les Classiques des sciences sociales - UQAC
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Eugène Revert, <strong>Les</strong> <strong>Antilles</strong> (1954) 27<br />
L'histoire <strong>des</strong> autres <strong>Antilles</strong> a été singulièrement plus complexe. <strong>Les</strong> luttes<br />
entre l'Angleterre et la France n'ont laissé à cette dernière que la Martinique, la<br />
Guadeloupe et leurs dépendances dont les plus remarquables sont Saint-Martin et<br />
Saint-Barthélemy. Mais elles expliquent la présence d'une vieille aristocratie créole<br />
qui parle encore notre langue à la Dominique, à Sainte-Lucie et même à Trinidad,<br />
bien que la grande crise économique d'après 1920 nous ait fait perdre un terrain<br />
considérable dans cette dernière île. Mais ce n'est pas là l'essentiel. Lors de la<br />
libération <strong>des</strong> esclaves, qui s'est produite à <strong>des</strong> époques quelque peu différentes<br />
suivant les pays et surtout leurs métropoles, les Noirs – et qui songerait à leur en<br />
vouloir ? – ne se sont plus senti qu'un médiocre attrait pour les plantations et les<br />
villages agglomérés dans lesquels ils avaient jusqu'alors traîné une existence<br />
misérable. Ils s'enfuirent dans les hauteurs et commencèrent à défricher ce qui était<br />
nécessaire à leur subsistance.... Il fallut alors faire appel pour le reste à une maind'œuvre<br />
immigrée. On s'adressa surtout aux Hindous connus traditionnellement<br />
sous le nom de coolies aux <strong>Antilles</strong>. Mais il faut y ajouter <strong>des</strong> Indochinois, <strong>des</strong><br />
Chinois et <strong>des</strong> Malais surtout nombreux dans les anciennes possessions<br />
hollandaises. Et il en est résulté en maints endroits, comme il a déjà été indiqué, un<br />
extraordinaire bariolage ethnique. À la Martinique et à la Guadeloupe les 25 000<br />
ou 30 000 Hindous qui ont été amenés tendent à se fondre plus ou moins dans le<br />
reste de la population et se sont convertis au christianisme, tout en continuant<br />
d'ailleurs à célébrer, lorsque l'occasion s'en présentait, les fêtes de Vichnou et de<br />
Siva. J'ai encore vu <strong>des</strong> autels hindous près de Capesterre en Guadeloupe. <strong>Les</strong><br />
Hindous surtout forment presque déjà le groupe le plus important de Trinidad où<br />
ils sont en ascension rapide et, si l'on sort du monde caraïbe stricto sensu, on<br />
s'aperçoit sans mal qu'ils ne sont pas loin de la majorité absolue en Guyane<br />
Britannique.<br />
Si l'on veut bien se souvenir que les <strong>Antilles</strong> gran<strong>des</strong> ou petites se trouvent sur<br />
la route de l'Amérique du Nord vers l'Amérique du Sud, qu'elles forment les<br />
avancées de la zone de Panama et du canal, on admettra sans peine qu'elles<br />
constituent toujours un <strong>des</strong> plus extraordinaires creusets de civilisations et de races<br />
qui existent à la surface de notre monde. Cette histoire explique également le<br />
double caractère qu'elles offrent aujourd'hui. Suivant le point de vue auquel on se<br />
place, ce sont tantôt les forces d'unification et tantôt les forces de dissociation qui<br />
paraissent l'emporter. Nous verrons ce qu'il faut en penser et quelles peuvent être<br />
les perspectives ouvertes aux divers organismes internationaux qui agissent dans la<br />
région.<br />
Nous passerons donc successivement en revue les Républiques indépendantes,<br />
Porto Rico et les îles Vierges, qui appartiennent à l'Amérique, et les possessions<br />
françaises, anglaises et hollandaises. Nous étudierons ensuite les facteurs<br />
d'unification ou de dissociation et l'action de la Commission Caraïbe comme <strong>des</strong><br />
grands établissements scientifiques antillais.