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revue finissante - Les âmes d'Atala

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Irrumations fin-de-siècle<br />

impies a mis à mort celui qui annonçait l’avènement du Christ, mais<br />

l’épisode préfi gure un juste châtiment des mécréants et une méfi ance<br />

accrue à l’égard de la funeste et pernicieuse féminité. Cette anecdote<br />

qu’il faut ajouter au registre de la lutte des sexes permet aux hommes de<br />

légitimer une guerre asymétrique contre l’irréligion de la femme et plus<br />

largement contre son rôle passéiste ou réactionnaire face au progrès de<br />

l’Histoire. Il faut cependant attendre l’historien Flavius Josèphe, selon<br />

Mireille Dottin-Orsini, pour voir donner à la fi lle d’Hérodiade le nom de<br />

Salomé, que l’Evangile omettait de nommer, et voir ainsi naître le mythe<br />

antiféministe de cette danseuse juive et cruelle qui, d’un seul claquement<br />

de doigt, commande d’apporter sur un plateau la tête d’un homme de<br />

raison et bouscule du même coup l’Histoire avec un h majuscule !<br />

Ainsi, la valeur symbolique de la décapitation n’est pas seulement<br />

l’allégorie de la castration et son pendant vengeur, le châtiment de<br />

la luxure. C’est aussi et surtout l’acte profane qui sépare le corps de<br />

la tête et prive l’homme de ce qui le distingue des autres animaux et<br />

de la femme ! Déposséder le mâle de son cerveau le condamne au<br />

gouvernement de son instinct, bref, de son seul sexe ! Dans La Marquise<br />

de Spolète, Lorrain nous offre un bel exemple de l’exploitation littéraire<br />

du mythe de Salomé dans la deuxième moitié du dix-neuvième siècle.<br />

Simonetta Foscari, « fl orentine de race et d’instincts » est l’héritière<br />

des « Foscari des émeutes, des complots, des amours tragiques et des<br />

trahisons, lignée de criminels et de voluptueux, où les hommes, beaux<br />

comme des courtisanes, et les femmes, belles comme des archanges,<br />

fournirent des mignons au Fort Saint-Ange et des papesses au Vatican<br />

(…) 12 ». Charmé par sa « bouche sinueuse aux lèvres ciselées »,<br />

Bartholoméo Giovanni Salviati, marquis de Spolète et duc de Vintimille<br />

l’épouse malgré la sulfureuse réputation de sa famille. Mais très<br />

rapidement, la duchesse se débauche dans les bras de trois artistes : le<br />

poète Beppo Nardi, le musicien Angélino Barda et le peintre-sculpteur<br />

Petruchio d’Arlani. Pour bénéfi cier des faveurs ducales, il leur faut<br />

néanmoins composer La Mort de Saint Jean-Baptiste que Simonetta se<br />

met en tête de faire représenter :<br />

Cette petite fi lle qui danse toute nue, devant un vieux roi libertin<br />

et obtient une tête ennemie par la mystérieuse offrande de son<br />

sexe, voilà le personnage qu’elle voulait être 13 .<br />

Elle distribue alors les rôles entre ses différents amants qui jouent<br />

respectivement le vieux roi Hérode, le précurseur Saint-Antoine et le<br />

bourreau, tandis qu’elle, petite fi lle gâtée, incarne l’impudique princesse<br />

de Judée. Le soir même de la représentation jouée en l’honneur de<br />

13

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