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revue finissante - Les âmes d'Atala

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Nietzsche et la modernité décadente<br />

« doctrine de l’égalité », « « idée moderne » par excellence » 25 .<br />

<strong>Les</strong> guillemets nietzschéens entourant cette expression d’« idée<br />

moderne » sont ici révélateurs d’une des caractéristiques majeures<br />

de la modernité telle qu’elle est conçue par Nietzsche. Le principe<br />

d’égalité est « moderne par excellence » dans la mesure où il au cœur<br />

de l’idéologie démocratique qui tend à l’emporter partout en Europe en<br />

cette fi n de XIXème siècle mais ceci ne signifi e aucunement qu’il soit né<br />

avec l’époque qui en a fait une véritable « doctrine ». Bien au contraire,<br />

Nietzsche précise que le principe d’égalité n’est nullement moderne<br />

au sens de contemporain puisqu’il a pour origine la morale chrétienne<br />

multiséculaire :<br />

« L’égalité des <strong>âmes</strong> devant Dieu », ce faux-semblant, ce<br />

prétexte offert aux rancunes de toutes les <strong>âmes</strong> viles, cette notion<br />

explosive, qui fi nalement s’est faite révolution, idée moderne et<br />

principe du déclin de toute l’organisation sociale, - c’est de la<br />

dynamite chrétienne… 26<br />

C’est dire combien la doctrine de l’égalité, tout comme la morale<br />

de la pitié qui la sous-tend peuvent paraître archaïques aux yeux de<br />

Nietzsche27 . Cependant, force lui est de constater qu’il s’agit bien là des<br />

valeurs cardinales des sociétés modernes, valeurs totalement intégrées au<br />

point où Nietzsche n’hésite pas à parler de « préjugé démocratique »<br />

allant même jusqu’à évoquer les « instincts démocratiques de l’âme<br />

moderne » 29 (s’inscrivant eux-mêmes dans une véritable « idiosyncrasie<br />

démocratique » 30 ). <strong>Les</strong> idées modernes sont devenues de la sorte une<br />

espèce de seconde nature pour l’homme du XIXème siècle qui, de ce<br />

fait, a perdu tout esprit critique face à sa condition.<br />

Pour preuve de cette incapacité de l’homme moderne à exercer un<br />

regard critique sur ses propres valeurs comme sur son comportement,<br />

Nietzsche opère une distinction entre les « esprits libres » dont il<br />

souhaite l’avènement et les « libres penseurs » autoproclamés qui ne<br />

sont en réalité que d’« excellents défenseurs des « idées modernes » » 31 .<br />

Quand l’« esprit libre », conscient du péril qui l’entoure, est persuadé<br />

de la nécessité de conditions de vie diffi ciles et dangereuses afi n que<br />

« notre volonté de vivre [puisse] s’intensifi er », les « libres penseurs »<br />

appartiennent quant à eux « à l’espèce des niveleurs » et sont « au service<br />

du goût démocratique et de ses « idées modernes » » 32 . Leur objectif<br />

n’est autre que « le bonheur du troupeau qui pâture sa prairie, dans la<br />

sécurité, le bien-être, l’universel allègement de l’existence », Nietzsche<br />

ajoutant : « leurs deux comptines et doctrines les plus ressassées sont<br />

49<br />

28 ,

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