17.12.2012 Views

revue finissante - Les âmes d'Atala

revue finissante - Les âmes d'Atala

revue finissante - Les âmes d'Atala

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Johan Grzelczyk<br />

écrit en 1875 qu’« il a posé […] un point d’interrogation sur toute notre<br />

culture qui se prétend moderne. Elle n’est pas moderne, mais déjà vieille<br />

et entièrement pourrie » 57 , le « se prétend moderne » comme le « elle<br />

n’est pas moderne » ne doivent pas être compris comme négation du<br />

caractère contemporain de l’époque concernée (ce qui n’aurait aucun<br />

sens) mais comme négation du présupposé de ce caractère moderne, à<br />

savoir le progrès dont il serait la condition.<br />

Cette prétention du XIXème siècle a constituer une époque de<br />

progrès est d’autant plus ridicule et mensongère aux yeux de Nietzsche<br />

qu’il estime au contraire qu’elle se montre de moindre valeur que les<br />

époques précédentes. Il apprécie tout particulièrement la comparer à la<br />

Renaissance en laquelle il voit la dernière grande époque de civilisation<br />

forte :<br />

<strong>Les</strong> époques doivent être jugées en fonction de leurs forces<br />

positives – et, de ce point de vue, l’époque follement prodigue<br />

et lourde de conséquences que fut la Renaissance s’avère être la<br />

dernière grande époque, et nous-mêmes, les hommes modernes,<br />

avec notre anxieuse sollicitude envers nous-mêmes, notre timide<br />

« amour du prochain », avec nos vertus […], nous donnons une<br />

basse époque pleine de faiblesses… 58<br />

Dans un fragment tardif, Nietzsche affi rme d’une façon plus générale :<br />

Le jour où il sera possible de tracer des lignes isochroniques<br />

de cultures à travers l’histoire, notre concept moderne de<br />

progrès s’en trouvera bel et bien renversé : et l’indice même,<br />

d’après lequel on le mesure, le démocratisme […] L’humanité<br />

ne présente pas une évolution vers le mieux ; ou vers le plus<br />

fort : ou vers le supérieur : au sens où on le pense aujourd’hui :<br />

l’Européen du 19 e siècle est, dans sa valeur, fort au-dessous des<br />

européens de la Renaissance ; la poursuite de l’évolution n’a<br />

absolument rien à voir avec une nécessité, une élévation, une<br />

intensifi cation, un renforcement… 59<br />

C’est dire que Nietzsche s’élève en réalité contre deux aspects<br />

distincts de la conception moderne du progrès. Il s’oppose premièrement<br />

en la croyance moderne selon laquelle l’histoire de l’humanité serait<br />

une succession ininterrompue et nécessaire de progrès, selon laquelle<br />

chaque époque constituerait un progrès de la civilisation par rapport à<br />

la précédente. Il s’oppose en outre à la prétention de l’homme moderne<br />

d’incarner le stade ultime de ce progrès : individu incapable d’aimer la<br />

vie telle qu’elle est, affaibli par ses valeurs de pitié et d’égalité, cherchant<br />

54

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!