Thèse Sciences Cognitives - Olivier Nerot
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Mémorisation par forçage des dynamiques chaotiques dans les modèles connexionnistes récurrents<br />
Cette approche offre une nouvelle interprétation de la mémoire, qui prend dès lors un rôle<br />
actif dans le maintien de l’intégrité du système, et ainsi s’accorde avec l’idée d’une clôture<br />
opérationnelle du système [[205]]. Le système cherche à augmenter son autonomie, c’est-à-dire<br />
qu’il cherche à maximiser le rôle de son état interne dans la détermination de son état à venir.<br />
Finalement, le système pourra être considéré comme autonome, dès qu’il se pliera de façon<br />
parfaite à son environnement et pourra anticiper seul l’évolution à court terme de celui-ci 37 . D’une<br />
certaine façon, cette phase ultime peut être considérée comme celle où le système a si<br />
parfaitement conçu et modélisé l’évolution de son environnement, qu’il peut le simuler : chacun de<br />
ses états à venir dépendent alors de ses seuls états internes, et l’ensemble des perturbations dues<br />
à son environnement seront anticipées par le système, et donc d’influence négligeable. Au stade<br />
où l’autonomie a été maximisée, le système n’a plus besoin de percevoir son environnement, il<br />
l’anticipe 38 . Ce stade dépend bien évidemment de l’échelle du système considéré : il suffit qu’un<br />
système puisse anticiper l’ensemble des perturbations possibles de son environnement. Il n’est<br />
donc pas nécessaire, pour qu’un système soit autonome, qu’il puisse modéliser le reste de<br />
l’univers, mais seulement une sous-partie, qui correspond à son environnement proche et influent.<br />
En revenant à l’approche de Bourgine et Varela, cette minimisation peut être produite par<br />
deux ‘comportements’ possibles : soit l’organisme agit sur l’environnement pour modifier la<br />
perturbation à venir (action), soit il s’adapte pour suivre l’évolution de la perturbation sans la<br />
modifier (perception). Ces deux méthodes offrent deux types de solutions pour l’apprentissage.<br />
Dans le cas de l’action, cette approche donne des voies de recherches possibles pour un<br />
apprentissage du comportement du système dans son environnement. Il est par exemple possible<br />
d’envisager un renforcement de l’action lorsque celle-ci aide à conformer l’environnement à ce<br />
que le système prévoyait. Cette voie de recherche n’entre pas dans le cadre de cette thèse, mais<br />
pourrait être intéressante à étudier, en complétant les idées avancées ici.<br />
Dans le cas de l’anticipation, qui est la voie utilisée pour notre modèle, le système est<br />
plongé dans le présent : le passé lui sert uniquement à faciliter sa capacité d’anticipation de la<br />
perturbation à venir (Figure 5-4). Cette approche est simple, mais a l’avantage de pouvoir concilier<br />
plusieurs notions, actuellement distinctes. Dans la vision initiale d’une mémoire cherchant à se<br />
souvenir de son passé, le principe est de chercher un fait mémorisé, une donnée, de retrouver un<br />
encodage préalablement enregistré : il faut chercher dans le passé le stimulus externe, déjà perçu<br />
et mémorisé, proche du percept actuellement perçu. Une telle approche encourage la vision d’un<br />
‘balayage interne’ des événements passés, et donc d’une information encodée sous la forme de<br />
représentants accumulés les uns après les autres. Dans le modèle proposé, le système ne<br />
possède pas d’encodage, d’arbre sémantique des événements du passé : il évolue simplement au<br />
cours du temps, selon un comportement qui a été modelé, modifié par son passé. Cette nouvelle<br />
approche permet d’éliminer l’hypothèse d’un centre cérébral de la mémoire : le système est la<br />
mémoire du système. Cette interprétation unificatrice du concept de mémoire va dans le sens des<br />
unifications préalablement réalisées dans cette thèse (unification de la mémoire et des organes de<br />
traitement du système, unification de la représentation bas niveau du système et de son<br />
environnement).<br />
37<br />
Ce court terme dépend bien évidemment du système considéré, et de la vitesse de sa dynamique et de<br />
celles qui l’entourent.<br />
38<br />
N’est ce pas ce qui nous arrive parfois, dans des environnements appauvris, comme celui de la conduite<br />
sur une route régulière, où nous avons la sensation de ne pas avoir perçu la route pendant quelques dizaines<br />
de mètres, et que la conduite s’est alors révélée quasi-automatique ? Par contre, si un chat traverse la route,<br />
cette perception est fortement pertubatrice (non anticipée), et nous sort de nos rêveries (simulations<br />
internes).<br />
DEUXIEME PARTIE : DEVELOPPEMENT