Thèse Sciences Cognitives - Olivier Nerot
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Mémorisation par forçage des dynamiques chaotiques dans les modèles connexionnistes récurrents<br />
Cette approche peut sembler naturelle. Le système voit ses dynamiques modifiées par la<br />
perception d’un stimulus externe. Il a pu de plus être observé que ces dynamiques<br />
étaient chaotiques. Donc, les dynamiques chaotiques observées, à un moment donné,<br />
sont la représentation que le système se fait de sa perception, car, à chaque perception,<br />
les dynamiques sont différentes : chaque attracteur possède sa signification.<br />
Mais plusieurs remarques doivent s’ajouter à cette ‘évidence’ : tout d’abord, cette<br />
approche doit considérer l’attracteur global du système cérébral, pour que le<br />
raisonnement précédent soit valide. Il est en effet envisageable qu’une aire du cerveau<br />
reste stabilisée sur un même attracteur, pendant qu’une autre aire fait évoluer le sien. De<br />
ce fait, nous pouvons imaginer que certains attracteurs locaux restent similaires, alors<br />
que le percept associé est différent. Il est donc nécessaire dans cette approche de<br />
considérer l’attracteur global du système cérébral. Mais dans ce cas, que signifie : deux<br />
attracteurs sont différents 20 ?<br />
Il faut tout d’abord qu’une mathématique de la similarité des attracteurs de systèmes<br />
chaotiques existe. Or il n’existe pas aujourd’hui d’approche quantitative pouvant définir<br />
des familles d’attracteurs. Cette approche semble donc actuellement impossible à mettre<br />
en œuvre. Mais cette remarque ne suffit à penser que cela soit impossible pour toujours.<br />
Il faut donc compléter cette remarque par le fait que si chaos il y a, l’attracteur du<br />
système cérébral complet, avec ses cent milliards de neurones, doit être d’une<br />
dimension telle, qu’il semble inimaginable de représenter l’attracteur atteint. Et pouvonsnous<br />
être sûr que les dynamiques cérébrales sont stabilisées sur l’attracteur ? Combien<br />
de temps faut-il à un système dynamique évoluant dans un espace d’état de plusieurs<br />
milliards de dimensions pour se stabiliser ? Et ce temps de stabilisation sera-t-il égal au<br />
temps de reconnaissance d’un percept (de l’ordre de quelques centaines de<br />
millisecondes) ?<br />
Dans ce cas, si l’attracteur n’a pas le temps de se stabiliser, c’est que ce sont les<br />
trajectoires internes des dynamiques chaotiques qui encodent l’information. Nous en<br />
revenons donc à un encodage par les dynamiques, et non plus par les attracteurs.<br />
Ainsi, l’hypothèse d’une mémorisation par l’attracteur global du système cérébral semble<br />
poser de nombreux problèmes, insolubles à l’aide des outils connus aujourd’hui. Mais il<br />
semble que cette limite est quand même hors d’atteinte des outils mathématiques<br />
envisageables, puisqu’il serait nécessaire de pouvoir connaître l’attracteur atteint par un<br />
système dynamique à plusieurs milliards de variables d’état, simplement en observant<br />
les trajectoires du système pendant un temps court. De plus, quel critère pouvons nous<br />
imaginer, permettant à un système de savoir que ses dynamiques sont stabilisées : le<br />
système ne possède pas en interne une copie de l’attracteur à atteindre, lui permettant<br />
de savoir à chaque instant, à quelle distance il en est.<br />
Cette remarque fait penser que l’on doit être en permanence à la frontière entre<br />
plusieurs attracteurs sur un plan global, et que le système cérébral global n’attend pas<br />
que ces dynamiques soient stabilisées.<br />
20 Les mêmes questions peuvent se poser au sujet des attracteurs ‘locaux’...<br />
PREMIERE PARTIE : ANALYSE