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1882 - Université Libre de Bruxelles

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04<br />

les nombreux adversaires qu’elle compte, montrer<br />

avant tout en quoi le système en vigueur<br />

blesse la justice? Abstraction faite <strong>de</strong> ces<br />

réserves, il faut rendre hommage au soin consciencieux<br />

qui a présidé au long travail qu’a dû<br />

coûter à M. Denis cette intéressante étu<strong>de</strong> sur<br />

l’histoire financière <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>.<br />

Si nous passons maintenant à la secon<strong>de</strong> partie<br />

du rapport <strong>de</strong> M. Denis, nous aurons sans doute<br />

à constater que tout ici n’est pas neuf. Ainsi,<br />

comme l’auteur a, du reste, soin <strong>de</strong> le déclarer<br />

lui-m êm e, pour l’Italie, il s’est aidé fréquem ­<br />

ment <strong>de</strong> l’excellent rapport présenté en 1879 à<br />

M. le ministre <strong>de</strong>s finances <strong>de</strong> l’empire <strong>de</strong> Russie<br />

par M. Vesselowsky; pour l’Angleterre, les<br />

vicissitu<strong>de</strong>s qu’y a subies l’impöt du revenu ont<br />

été exposées bien <strong>de</strong>s fois déjà, et on trouve<br />

notamment un long résumé <strong>de</strong> l'histoire <strong>de</strong><br />

l’income-tax dans le rem arquable Traité <strong>de</strong>s<br />

finances <strong>de</strong> M. Taul Leroy-Beaulieu; l’impö t sur<br />

le revenu en Suisse a également donné lieu à<br />

divers travaux qui ont considérablement facilité<br />

la tHche <strong>de</strong> M. Denis; nous citerons notamment<br />

les travaux <strong>de</strong> M. <strong>de</strong> Paricu, <strong>de</strong> M. Von Sclieel<br />

et <strong>de</strong> M. Kurz. Si pour ces divers pays M. Denis<br />

a pu profiter <strong>de</strong> travaux excellents, il faut reconnaître<br />

toutefois qu’il y a ajouté comme travail<br />

personnel <strong>de</strong> nombreux tableaux qui font mieux<br />

saisir sous Loutes ses faces le mouvement qu’a<br />

suivi dans ces pays l’impöt du revenu et la<br />

place qu’il y occupe dans l’ensemble <strong>de</strong>s ressources<br />

budgétaires. Nous avons, d’autre part,<br />

à citer comme entièrem ent neufs les renseignements<br />

fournis par M. Denis sur les applications<br />

qui ont été faites <strong>de</strong> l’impöt du revenu dans le<br />

Grand-Duché <strong>de</strong> Luxembourg et dans diverses<br />

villes <strong>de</strong> Hollan<strong>de</strong>. Signalons aussi en passant<br />

l’historique que fait l’auteur <strong>de</strong> la question <strong>de</strong><br />

l’impöt du revenu en Belgique.<br />

La question <strong>de</strong> l’impöt sur le revenu est loin<br />

d’être neuve; déjà <strong>de</strong>puis longtemps elle a provoqué<br />

les discussions les plus vives parmi les<br />

économistes et les hommes d’Etat; les applications<br />

actuellement faites <strong>de</strong> cette forme d’imposition<br />

mettent, <strong>de</strong> nouveau la question à l’ordre<br />

du jour dans les pays, et c’est le cas général,<br />

où les dépenses publiques croissent d ’année en<br />

année. Sans avoir encore nettem ent formulé sa<br />

manière <strong>de</strong> voir, M. Denis émaille son travail<br />

d ’observations inci<strong>de</strong>ntes qui perm ettent, dès à<br />

présent, <strong>de</strong> le classer parm i les partisans <strong>de</strong><br />

l’impöt sur le revenu, non sans doute comme<br />

impöt unique, mais comme impöt servant d’appoint<br />

et <strong>de</strong> correctif aux autres impositions,<br />

conclusion à laquelle aboutit égalem ent M. Leroy-Beaulieu.<br />

Les adversaires <strong>de</strong> l’impöt sur le<br />

revenu <strong>de</strong>vront reconnaître que M. Denis n’a ni<br />

caché ni atténué dans une mesure quelconque<br />

les graves inconvénients que présente cette forme<br />

d’im position; l’auteur connaît toutes les récriminations<br />

que soulève cet impöt là où il existe,<br />

il sait à combien <strong>de</strong> difficultés on se heurte dans<br />

son application, combien il est à craindre que le<br />

contribuable ne cache le véritable état <strong>de</strong> sa fortune,<br />

si l’on s’en rapporte à sa déclaration, et combien,<br />

d’autre part, il y a à redouter d’arbitraire<br />

ou <strong>de</strong> vexations inquisitoriales si la déclaration<br />

<strong>de</strong>s contribuables est sujette au contröle <strong>de</strong>s<br />

autorités. M. Denis espère que le développement<br />

progressif <strong>de</strong> la moralité publique rendra<br />

<strong>de</strong> plus en plus sincères les déclarations <strong>de</strong>s<br />

contribuables; nous voudrions partager ses généreuses<br />

illusions à cet égard, mais nous craignons<br />

bien qu’il ne s’écoule un long temps avant<br />

L’ATHENÆUM BELGE<br />

qu’elles se réalisent, et les résultats <strong>de</strong> l’impöt<br />

du revenu en Italie notamment viennent encore<br />

augm enter nos craintes ; comme le constate<br />

M. Denis, les classes exerçant les professions<br />

libérales y soustraient au fisc la plus gran<strong>de</strong><br />

partie <strong>de</strong> leurs ressources imposables, et, en<br />

Belgique, n'avons-nous pas toujours vu les avocats<br />

s’opposer avec la <strong>de</strong>rnière énergie à ce que<br />

l’impöt <strong>de</strong> la patente leur fût appliqué, comme<br />

s’il y avait déshonneur pour un citoyen à supporter<br />

sa part dans les dépenses publiques, et<br />

comme si l’ordre <strong>de</strong>s avocats ne se fût pas<br />

honoré lui-même en cessant <strong>de</strong> revendiquer un<br />

privilège contraire au principe constitutionnel<br />

<strong>de</strong> l’égaliLé <strong>de</strong> tous <strong>de</strong>vant la loi? En présence<br />

<strong>de</strong> pareils faits, ne faut-il pas se <strong>de</strong>m an<strong>de</strong>r s ’il<br />

est permis d ’espérer que la masse <strong>de</strong> la nation<br />

éprouve jamais <strong>de</strong>s scrupules quelconques à<br />

trom perie fisc? — Qu’on ne se méprenne pas<br />

sur la portée <strong>de</strong> nos paroles ; nous ne nous opposons<br />

nullem ent à l’introduction <strong>de</strong> l’impöt, sur<br />

le revenu dans notre pays; nous croyons que<br />

cette forme d’impöt approche plus <strong>de</strong>s conditions<br />

<strong>de</strong> vraie justice que toute autre imposition;<br />

mais ûous sommes encore plus loin <strong>de</strong> croire<br />

que l’impöt sur le revenu soit juste d’une manière<br />

absolue : pour nous, il sera toujours entaché<br />

d'une part considérable d’injustice, d’abord<br />

parce qu’il est impossible d’obtenir jamais que<br />

les contribuables le supportent tous dans la<br />

proportion exacte <strong>de</strong> leurs revenus, ensuite parce<br />

que la proportion exacte entre les revenus et<br />

la taxe payée ne constituerait pas encore pour<br />

nous l’idéal <strong>de</strong> la justice, vu la diversité <strong>de</strong>s<br />

charges qui pèsent sur les familles Nous appelons<br />

spécialement l’attention <strong>de</strong> M. Denis sur ce<br />

<strong>de</strong>rnier point, qui ne nous semble avoir fait<br />

jusqu’ici l’objet d’aucune rem arque <strong>de</strong> sapart.<br />

Nous regrettons <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir nous borner à ces<br />

quelques indications sommaires sur une question<br />

aussi grave, et, abandonnant le fond <strong>de</strong> la<br />

question pour en revenir à l’auteur, nous lui<br />

adresserons nos félicitations pour le soin avec<br />

lequel il a accompli la mission dont il a été<br />

chargé, et plus encore pour les tendances et la<br />

direction d’esprit que révèle son œuvre. Platon<br />

donne <strong>de</strong>s ailes à son philosophe ; Bacon veut<br />

que le physicien observateur, m archant dans la<br />

route <strong>de</strong> l’expérience, ait pour ainsi dire « <strong>de</strong>s<br />

semelles <strong>de</strong> plomb ». Pour nous, le véritable<br />

économiste est celui qui réunit en lui ces <strong>de</strong>ux<br />

attributs, l’un rêvé par Platon pour le philosophe,<br />

l’autre exigé du physicien par Bacon. La<br />

suite <strong>de</strong> l’ouvrage <strong>de</strong> M. Denis nous montrera,<br />

nous en sommes convaincu, qu'il réunit en lui<br />

ces <strong>de</strong>ux attributs, et qu’il n’appartient à aucune<br />

<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux classes également néfastes, celle <strong>de</strong>s<br />

praticiens qui ne voient rien au <strong>de</strong> la <strong>de</strong>s faits<br />

du passé, et celle <strong>de</strong>s utopistes qui pensent que<br />

la réalisation <strong>de</strong> leurs rêves mettra fin à toutes<br />

les m isères et à toutes les injustices <strong>de</strong> ce<br />

mon<strong>de</strong>.<br />

Quant à la partie déjà parue <strong>de</strong> l’ouvrage, elle<br />

répond à toutes les conditions qu’exige la<br />

science mo<strong>de</strong>rne par l’application rigoureuse<br />

<strong>de</strong> cette métho<strong>de</strong> expérimentale qui n’est nullement,<br />

comme certains auteurs le croient, l’invention<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers venus dans la science,<br />

mais qu’il est possible aujourd’hui d’appliquer<br />

d’une manière bien plus complète et à raison <strong>de</strong><br />

l’extension du champ <strong>de</strong>s observations et <strong>de</strong>s<br />

expériences, et à raison <strong>de</strong>s progrès réalisés<br />

dans les travaux <strong>de</strong> statistique.<br />

— M. Jules Carlier, dont le nom est bien connu<br />

<strong>de</strong>s lecteurs <strong>de</strong> YA thénœ um , vient <strong>de</strong> faire paraître<br />

sous le titre cité plus haut une intéressante<br />

brochure dont le contenu avait déjà fait l’objet<br />

d’un article inséré dans la Revue <strong>de</strong> Belgique,<br />

livraison du mois <strong>de</strong> décem bre 188t. Nous ne<br />

pouvons ici, en appelant l’attention su r ce travail,<br />

suivre l’auteur pas à pas dans les détails<br />

qu’il donne sur l’origine <strong>de</strong> la Caisse générale<br />

d’épargne et <strong>de</strong> retraite, sur son adm inistration,<br />

sur les opérations qu’elle fait, sur la manière<br />

dont s’effectuent les versements et les retraits<br />

<strong>de</strong> fonds, etc. Nous ne voulons qu’indiquer les<br />

points essentiels <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Carlier,<br />

m ontrer avec lui que <strong>de</strong>puis quinze ans qu’elle<br />

fonctionne, la Caisse d’épargne a vu le plus sé ­<br />

rieux succès couronner ses efforts, et que,<br />

grâce à une série d’intelligentes m esures, il<br />

n’est pas <strong>de</strong> localité aujourd’hui qui ne se rattache<br />

ou ne puisse facilement se rattacher à<br />

cette précieuse institution.<br />

La loi du 16 mars 4 865 qui a institué la Caisse<br />

générale d’épargne et <strong>de</strong> retraite et qui est due<br />

à l’initiative <strong>de</strong> M. Frère-Orban, a placé cette<br />

institution sous la garantie <strong>de</strong> l’État. Après les<br />

événements <strong>de</strong> 1838 et <strong>de</strong> 1848, qui avaient<br />

amené l’intervention <strong>de</strong> l’État au profit <strong>de</strong><br />

caisses particulières, cette garantie était <strong>de</strong>venue<br />

une nécessité absolue, en mêm e tem ps<br />

qu’elle constituait un gage assuré <strong>de</strong> succès par<br />

la sécurité pleine et entière qu’elle <strong>de</strong>vait procurer<br />

aux déposants Le service <strong>de</strong>s versements<br />

et <strong>de</strong>s rem boursem ents s’effectue aujourd’hui à<br />

<strong>Bruxelles</strong>, au siège <strong>de</strong> l’établissement, dans<br />

toutes les agences <strong>de</strong> la Banque Nationale, dans<br />

<strong>de</strong>s succursales qui se sont établies sur divers<br />

points du pays, enfin dans tous les bureaux <strong>de</strong><br />

poste du royaume. Grâce à une organisation que<br />

M. Carlier déclare avec raison parfaitement conçue,<br />

à tel point du reste qu’elle a servi <strong>de</strong> modèle<br />

pour la création d’établissements analogues<br />

à l’étranger, la Caisse italienne entre autres,<br />

la Caisse générale d ’épargne <strong>de</strong> Belgique a produit<br />

<strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> la plus haute im portance.<br />

Pour faire apprécier cette im portance, il suffira<br />

<strong>de</strong> faire connaître quels étaient, à la fin <strong>de</strong><br />

chacune <strong>de</strong>s trois pério<strong>de</strong>s quinquennales qui<br />

se sont écoulées <strong>de</strong>puis l’institution <strong>de</strong> la Caisse,<br />

le nom bre <strong>de</strong>s livrets appartenant à <strong>de</strong>s particuliers<br />

et le montant <strong>de</strong>s sommes inscrites sur<br />

ces livrets : au 31 décembre 1870 il existait<br />

51,543 livrets, dont le montant total s’élevait à<br />

10,413,000 francs; au 31 décembre 1873 le<br />

nombre <strong>de</strong>s livrets s’était élevé au chiffre <strong>de</strong><br />

104,754, comptant un montant total <strong>de</strong> 35 millions<br />

748,000 francs ; enfin au 31 décem bre<br />

1880 le nombre <strong>de</strong>s livrets s’élevait à 197,956,<br />

comptant ensemble un montant <strong>de</strong> 109,700,000<br />

francs, c’est-à-dire que d’une pério<strong>de</strong> à l’autre<br />

le nombre <strong>de</strong>s livrets a presque doublé, et que<br />

les dépöts ont progressé dans une mesure bien<br />

plus large encore. Il importe <strong>de</strong> rem arquer que<br />

la majeure partie <strong>de</strong> ces livrets et <strong>de</strong> ce montant<br />

provient <strong>de</strong>s petits dépöts, <strong>de</strong>s dépöts inférieurs<br />

à 100 francs; ainsi, en 1880, les versements<br />

inférieurs à cette somme ont été dans la<br />

proportion <strong>de</strong> 88 p. c. contre 12 p. c. représentant<br />

l’ensemble <strong>de</strong>s versements plus élevés,<br />

et les livrets dont le sol<strong>de</strong> était inférieur à 100<br />

francs formaient environ les 3/5 <strong>de</strong>s livrets existants.<br />

Ces chiffres établissent que la Caisse<br />

d’épargne compte réellem ent parmi ses clients<br />

ceux-là mêmes en vue <strong>de</strong>squels elle a été créée.<br />

Après avoir rendu hommage et au législateur<br />

qui a institué la Caisse d’épargne et aux adrni-

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