1882 - Université Libre de Bruxelles
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m<br />
— La question <strong>de</strong> l’origine <strong>de</strong> la gravure a<br />
fait l’objet <strong>de</strong> nombreux et savants travaux; elle<br />
est loin pourtant d’être résolue. M. Hymans, qui<br />
a déjà fourni d ’importantes contributions à l’histoire<br />
<strong>de</strong> cet art dans notre pays, vient, à son tour,<br />
éclairer un fait intéressant qui se rattache à ce problème<br />
si complexe. Il s’occupe particulièrem ent<br />
<strong>de</strong>s prem iers essais <strong>de</strong> gravure sur cuivre, <strong>de</strong> ceux<br />
où s’accuse une personnalité artistique. Il part<br />
<strong>de</strong> ce principe que la Flandre, au XVe siècle, dut<br />
nécessairem ent avoir ses graveurs, et, se basant<br />
sur quelques spécimens d’origine positivement<br />
flaman<strong>de</strong>, fait entrevoir quelle dut être l’im portance<br />
<strong>de</strong> ces m aîtres. A son travail est joint le<br />
fac-similé d’une planche, appartenant au cabinet<br />
<strong>de</strong> Hambourg, qui représente une Descente, <strong>de</strong><br />
Croix. M. Hymans y signale la reproduction du<br />
célèbre tableau <strong>de</strong> Roger Van<strong>de</strong>r Wey<strong>de</strong>n, aujourd’hui<br />
au Musée <strong>de</strong> Madrid et qui fut peint<br />
pour l’église Notre-Dame-hors-<strong>de</strong>s-Murs, à Louvain.<br />
Cette estampe est certainem ent contemporaine<br />
du grand artiste et, en plusieurs points, elle<br />
complète la composition <strong>de</strong> l’original. M. Hymans<br />
en conclut que si elle n’est pas issue du burin<br />
<strong>de</strong> Roger, elle a tout au moins été produite avec<br />
sa collaboration; c’est là un fait assurément intéressant.<br />
La supposition, d’ailleurs, n ’a rien<br />
d’exagéré, puisque Roger Van<strong>de</strong>r Wey<strong>de</strong>n fut le<br />
maître <strong>de</strong> Martin Schongauer, le plus illustre<br />
graveur <strong>de</strong> son temps, et que, <strong>de</strong> l’avis <strong>de</strong> tous<br />
les auteurs, il exerça sur les artistes <strong>de</strong> son<br />
époque une influence qui ne le cè<strong>de</strong> même pas<br />
à celle dos Van Eyck.<br />
PUBLICATIONS L IT T E R A IR E S ALLEM ANDES.<br />
W ilhelm Mangold, M olière’s T artu ffe, Geschichte<br />
um l K ritik Oppe'n, Maske. — Traité <strong>de</strong> la<br />
comédie et <strong>de</strong>s spectacles,hrsg. v. K. Vollmoller.<br />
Heilbronn, Henninger. — Fausts Leben, von<br />
M aler Müller, hrsg. v. Seuflert. Heilbronn, Hen-<br />
ninger. — H cr<strong>de</strong>r’s süm mtliche W erke, hrsg.<br />
v. Suphan, (Suite). B erlin, W eitlmann. —<br />
Ziesiog, Le Globe considéré dans ses rapports<br />
avec l’école rom antique. Zurich, Ebell. —<br />
Bran<strong>de</strong>s, Die E m igra n ten littera tu r. Leipzig,<br />
Veit. — Jahresbericht fü r germ anischc P hilologie,<br />
2° année. Berlin, Calvary.<br />
On ne saurait faire trop d’éloges <strong>de</strong> l’excellente<br />
monographie que M. Wilhelm Mangold<br />
vient <strong>de</strong> nous donner sur le Tartufe <strong>de</strong> Molière;<br />
l’auteur y a mis le soin le plus patient, les<br />
recherches les plus minutieuses, et tout cela est<br />
relevé par une connaissance étendue <strong>de</strong> la littérature<br />
française du xvne siècle, par un goût très<br />
lin et très pur, par un style vif et agréable.<br />
M. Mangold expose d'abord la vie <strong>de</strong> Molière,<br />
ses opinions sur la religion et la morale, la<br />
corruption <strong>de</strong> son temps, les divisions qui<br />
régnaiont dans l’Église, les partis et leurs vices,<br />
jésuites, jansénistes, illuminés. Il raconte ensuite<br />
avec une merveilleuse clarté l'histoire du<br />
Tartufe (1re représentation, mais seulement <strong>de</strong><br />
trois actes, opinions pour et contre le Tartufe,<br />
1re défense <strong>de</strong> jouer la pièce, 1er placet <strong>de</strong> Molière,<br />
lectures du Tartufe dans <strong>de</strong>s sociétés particulières,<br />
2e représentation chez Madame, 3e représentation<br />
au château <strong>de</strong> Condé, don Juan.<br />
1re représentation publique du Tartufe et<br />
<strong>de</strong>uxième défense <strong>de</strong> le jouer; second placet <strong>de</strong><br />
Molière, condamnation du Tartufe par l’archevêque<br />
<strong>de</strong> Paris .Lettre sur l'Im posteur, A m phitryon,<br />
etc., etc,). Mais M. Mangold ne s’en tient<br />
L’ATHENÆUM BELGE<br />
pas là; il suit jusqu’à nos jours la <strong>de</strong>stinée du<br />
Tartufe (l'Onuphre <strong>de</strong> La Bruyère, le Faux honnête<br />
hom m e et le F a u x sincère <strong>de</strong> Dufresny,<br />
l'E pître à Tartufe du baron anglais Baar,<br />
l'A m i <strong>de</strong> la m aison <strong>de</strong> Marmontel, le Tartufe<br />
<strong>de</strong> m œ urs <strong>de</strong> Chéron, L ady Tartufe <strong>de</strong> Mme Em.<br />
<strong>de</strong> Girardin, etc.); il rapporte les nom breuses<br />
traductions et imitations du Tartufe à l’étranger;<br />
citons seulement parm i les œuvres que mentionne<br />
M. Mangold le N on-Juror <strong>de</strong> Cibber,<br />
remanié plus tard par Bickerhtaff, la Pietisterey<br />
im Fischbeinrocke, où Mad. Gottsched imita une<br />
comédie parueen 1736 sous le titre : La Femme<br />
docteur ou la théologie janséniste tombée en<br />
quenouille, le Betbru<strong>de</strong>r <strong>de</strong> Mme Unger, l'Urbild<br />
<strong>de</strong>s Tartuffe <strong>de</strong> Gutzkow , etc., etc. Puis,<br />
M. Mangold examine le Tartufe au « point <strong>de</strong><br />
vue <strong>de</strong> la technique dramatiquo » ; il apprécie,<br />
non sans finesse, les divers caractères <strong>de</strong> la pièce;<br />
il consacre quelques pages à l’action. L’ouvrage<br />
se term ine par <strong>de</strong>s considérations esthétiques<br />
sur le drame en général, sur la religion et la<br />
morale au théâtre, enfin sur le Tartufe même<br />
qui restera, dit l’auteur, un chef-d’œ uvre<br />
comique du style le plus élevé, et pour les poètes<br />
dramatiques, une étu<strong>de</strong> toujours intéressante,<br />
un modèle toujours inimitable. Plût au ciel que<br />
nous ayons sur chaque œuvre <strong>de</strong>s grands<br />
écrivains français une monographie aussi abondante<br />
en informations sûres et précises, aussi<br />
complète, aussi attachante que celle <strong>de</strong> M. Mangold<br />
sur Tartufe!<br />
Armand <strong>de</strong> Bourbon, prince <strong>de</strong> Conti, frère<br />
puîné du grand Condé, est connu par la part<br />
qu’il prit aux intrigues et aux luttes <strong>de</strong> la Fron<strong>de</strong>;<br />
entraîné par sa sœ ur la duchesse <strong>de</strong> Longue-<br />
ville, il commanda contre son frère l’armée du<br />
Parlement, se jeta dans la cabale <strong>de</strong>s petits-<br />
m aîtres, fut em prisonné à Vincennes, puis se<br />
tourna contre ceux qu’il avait soutenus, lit sa<br />
paix avec Mazarin dont il épousa la nièce, reçut le<br />
gouvernement <strong>de</strong> Guyenne et dirigea <strong>de</strong>s expéditions<br />
en Espagne et en Italie. Vers la fin <strong>de</strong> sa<br />
vie, il se livra à la dévotion. Il composa quelques<br />
œuvres <strong>de</strong> piété, parmi lesquelles un Traité <strong>de</strong><br />
la comédie et <strong>de</strong>s spectacles. Il suffira, pour<br />
caractériser l’esprit du livre, <strong>de</strong> dire que les<br />
docteurs en théologie <strong>de</strong> la Faculté <strong>de</strong> Paris le<br />
trouvèrent « très chrétien et très pieux », et <strong>de</strong><br />
citer cette simple phrase <strong>de</strong> Conti : « La comédie<br />
en l’état qu’elle est aujourd’hui n ’est pas un<br />
divertissem ent innocent, et un chrétien est<br />
obligé <strong>de</strong> la regar<strong>de</strong>r comme un mal. » (p. 9).<br />
L’ouvrage comprend en réalité trois parties :<br />
I. Le Traité proprem ent dit <strong>de</strong> la comédie et<br />
<strong>de</strong>s spectacles. II. La Tradition <strong>de</strong> l’Eglise sur<br />
la comédie et les spectacles. Les conciles III.<br />
Sentim ents <strong>de</strong>s pères <strong>de</strong> l’Eglise sur la comédie<br />
et les spectacles. II est accompagné d ’une Table<br />
fort commo<strong>de</strong> et très minutieuse <strong>de</strong>s m atières<br />
contenues dans ce livre. M. Karl Vollmoller,<br />
professeur à l'<strong>Université</strong> d’Erlangen, vient <strong>de</strong><br />
réim prim er cet ouvrage <strong>de</strong>venu rare; cette<br />
réimpression, faite avec le plus grand soin et<br />
l’exactitu<strong>de</strong> la plus stricte et la plus scientifique,<br />
forme le <strong>de</strong>uxième volume <strong>de</strong> la collection<br />
im portante, publiée chez les frères Henninger<br />
et intitulée Sam m lung fra n zösischer N eudrucke<br />
; elle est précédée d'une très soli<strong>de</strong> et<br />
consciencieuse introduction où M. Vollmoller<br />
décrit un exemplaire <strong>de</strong> la 1re et <strong>de</strong> la 2° édition<br />
du Traité, et ajoute divers détails intéressants<br />
sur la polémique soulevée par l’ouvrage <strong>de</strong><br />
Conti.<br />
M. Bernhard Souffert a publié dans la collection<br />
<strong>de</strong>s « Monuments <strong>de</strong> la littérature alleman<strong>de</strong><br />
du XVIIIe siècle », où il avait déjà fait<br />
paraître la satire <strong>de</strong> Henri Léopold W agner, Voltaire<br />
le soir <strong>de</strong> son apothéose, un drame du<br />
peintre Müller, La Vie <strong>de</strong> Faust. Le peintre<br />
Müller est un <strong>de</strong>s écrivains les plus fougueux<br />
et les plus rem arquables <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> que les '<br />
Allemands ont nommée, d’après le titre d’un<br />
drame <strong>de</strong> Klinger, la Stu rm -und Drangperio<strong>de</strong>.<br />
Il acomposé <strong>de</strong>sidylles, dont les plus connues, die<br />
Schafschur et das N usskernen ont pour sujet<br />
<strong>de</strong>s « situations » <strong>de</strong> la vie populaire et cham <br />
pêtre ; mais ses œuvres les plus notables sont<br />
ses dram es : La Vie <strong>de</strong> Faust, Niobé, Goto et<br />
Genevieve. Dans Fan t, Müller traitait un sujet<br />
que Lessing avait ab o rd é déjà, que le jeune Gœthe<br />
abordait à ce moment-là, et que Klinger <strong>de</strong>vait<br />
traiter quelques années plus tard ; mais le Faust<br />
<strong>de</strong> Müller est un triste personnage. Il est vrai,<br />
Müller nous le représente comme un grand<br />
homme qui a la conscience <strong>de</strong> sa force et assez<br />
<strong>de</strong> courage pour renverser tous les obstacles<br />
qui s’opposent à lui ; il nous le-montre, dans son<br />
cabinet, indigné <strong>de</strong> l’impuissance humaine et<br />
s’abandonnant à <strong>de</strong> vastes espoirs; « que ne<br />
pourrais-je pas, s’écrie Faust, lorsque le soir<br />
emporte mon im agination sur <strong>de</strong>s nuages dorés!<br />
Je m e^sens alors le m aître <strong>de</strong> tous les arts, je<br />
me tends et m’élance vers les cimes les plus<br />
hautes, je sens s’éveiller en mon cœ ur tous les<br />
dieux qui se partagent ce mon<strong>de</strong> comme une<br />
proie... peintre, poète, musicien, penseur, to u t ce<br />
que baisent les rayons d’Hyperion, tout ce qui<br />
dérobe la chaleur par le flambeau <strong>de</strong> Prométhée,<br />
tout cela je voudrais l’être et ne puis pas l’être ;<br />
tout cela je me le soumets en esprit et ne suis<br />
pourtant qu’un enfant, dès que je commence à<br />
agir; je sens dans mes veines la flamme d’un<br />
dieu qui trem ble sous les muscles <strong>de</strong> l’homme...<br />
Mais allons! il le faut, il le faut, en avant! Habileté,<br />
esprit, honneur, gloire, science, action,<br />
puissance, richesse, tout, jouer le dieu <strong>de</strong> ce<br />
mon<strong>de</strong>, le dieu ! » Mais le Faust <strong>de</strong> Müller n’a<br />
que rarem ent cette forte et chaleureuse éloquence;<br />
on voit d ’ailleurs, par les souhaits<br />
qu’il exprime, qu’il n’a pas la tragique gran<strong>de</strong>ur<br />
du Faust <strong>de</strong> Goethe et ses sublimes<br />
aspirations; il n ’est pas le représentant <strong>de</strong><br />
l’humanité ; c’est le type favori <strong>de</strong> la Sturm -und<br />
Drangperio<strong>de</strong>, c’est Müller lui-même, tourm enté<br />
du désir <strong>de</strong> goûter toutes les jouissances <strong>de</strong> ce<br />
mon<strong>de</strong>, c’est le génie, comme on disait alors,<br />
qui ne cherche qu a satisfaire ses passions et à<br />
s’affranchir <strong>de</strong> toutes les entraves. Le Faust <strong>de</strong><br />
Müller se vend au diable pour échapper aux<br />
créanciers qui l’assaillent, et ce qu’il <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à<br />
Méphislophélès, ce n’est pas autre chose qu’une<br />
vie <strong>de</strong> bombances et <strong>de</strong> volupté. Il y a, du reste,<br />
trop <strong>de</strong> diables dans le drame <strong>de</strong> M üller; les<br />
scènes où il fait paraître les juifs et les étudiants,<br />
sont vivantes, animées, semées <strong>de</strong> traits heureux<br />
et expressifs, mais gâtées par <strong>de</strong> grossières<br />
plaisanteries et <strong>de</strong>s peintures répugnantes ;<br />
enfin, le style <strong>de</strong> Müller est haché, saccadé, trop<br />
vulgaire et, comme disent les Allemands, burs-<br />
chilios. Dans une savante et assez longue introduction,<br />
M. Seuffert donne sur le drame du<br />
peintre Müller les renseignem ents les plus<br />
exacts et les plus complets ; quant au texte même<br />
du Faust, altéré autrefois par Tieck, qui voyait<br />
dans Müller le précurseur <strong>de</strong>s rom antiques, et<br />
reproduit <strong>de</strong>puis avec ces maladroits changements<br />
dans le volume <strong>de</strong> la collection Brockhaus,