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1882 - Université Libre de Bruxelles

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L’ATHENÆUM BELGE<br />

BUREAUX :<br />

R U E D E L A M A D E L E IN E , 26, A B R U X E L L E S<br />

Som m aire. — H. Pirenne, Sedulius <strong>de</strong> Liége<br />

(St. Borm ans). — F r. Spiegel, Gram m aire comparée<br />

<strong>de</strong>s anciennes langues éraniennes (C. <strong>de</strong><br />

Harlez). — John Morley, R ichard Cob<strong>de</strong>n (Jules<br />

Carlier). — Nouvelles fouilles <strong>de</strong> M Schliem ann<br />

à Troie. — Chronique. — Sociétés savantes. —<br />

Bibliographie.<br />

O U V R A G E S N O U V E A U X .<br />

Sedulius <strong>de</strong> Liége, par Henri Pirenne. (Extrait<br />

<strong>de</strong>s Mémoires <strong>de</strong> l’Académie royale <strong>de</strong> Belgique.<br />

Travail présenté au cours d’histoire <strong>de</strong><br />

M. le professeur Kurth, à l’<strong>Université</strong> <strong>de</strong><br />

Liége.) <strong>Bruxelles</strong>, Hayez, <strong>1882</strong>, in-8°.<br />

Le sous-titre <strong>de</strong> cet opuscule nous apprend<br />

que M. Kurth, à l’instar <strong>de</strong> ce qui se fait en<br />

Allemagne, a organisé à Liége un cours pratique<br />

d’histoire pour former les jeunes gens<br />

aux recherches et les initier, par un travail tout<br />

personnel, aux secrets <strong>de</strong> la critique historique.<br />

Il leur donne un sujet à traiter, leur indique à<br />

l’avance les sources à consulter, les gui<strong>de</strong> au<br />

milieu <strong>de</strong>s difficultés qu’ils rencontrent, et discute<br />

enfin le mérite <strong>de</strong> leur œ uvre. C’est ainsi<br />

qu’est née la dissertation <strong>de</strong> M. Pirenne. Si elle<br />

fait l’éloge <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> et du maître, elle<br />

nous révèle les aptitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l’élève ; son<br />

Sedulius, présenté à l’Académie royale <strong>de</strong> Belgique,<br />

a été admis d’emblée dans ses Mémoires<br />

et, sur le simple rapport qui en a été fait à cette<br />

occasion, a été salué, même avant son apparition,<br />

par les Revues <strong>de</strong> l’Angleterre et <strong>de</strong><br />

l’Allemagne. C’est qu’en effet, le Sedulius <strong>de</strong><br />

Liége se distingue par les qualités qui font<br />

les bons écrivains. Dès son début, l’auteur a<br />

réussi à se faire distinguer, et s’il persiste dans<br />

cette voie, on peut, pour l'avenir, lui prédire <strong>de</strong><br />

brillants succès.<br />

Je ne reviendrai point sur l’appréciation que<br />

j’ai faite ailleurs <strong>de</strong> l’ensemble et <strong>de</strong>s différentes<br />

parties du travail <strong>de</strong> M. Pirenne (B ulletin <strong>de</strong><br />

l'Académ ie royale <strong>de</strong> Belgique, 1881, n° I l ). Il<br />

suffira <strong>de</strong> rappeler que le poète irlandais Sedulius<br />

(Sedulius Scotlus), chassé <strong>de</strong> sa patrie par<br />

l’arrivée <strong>de</strong>s Scandinaves, fut accueilli à Liége<br />

par l’évêque Hartgar ou Hircaire, entre les<br />

années 840 et 851. En ajoutant que l’on ignore<br />

si le poète m ourut à Liége, on serait peut-être<br />

en droit <strong>de</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si le titre <strong>de</strong> la dissertation<br />

est historiquem ent exact. Mais après tout,<br />

comme Sedulius s’était fait <strong>de</strong> Liége une secon<strong>de</strong><br />

patrie, personne ne songera probablement à<br />

blâm er M. Pirenne <strong>de</strong> revendiquer comme un<br />

<strong>de</strong>s nötres, cet étranger <strong>de</strong>venu bien réellem ent<br />

citoyen liégeois.<br />

Hircaire, prélat intelligent et instruit, passionné<br />

pour les arts et les lettres, fut le prom oteur<br />

<strong>de</strong> cette magnifique renaissance littéraire<br />

qui rendit pendant plusieurs siècles les écoles<br />

<strong>de</strong> Liége si célèbres. Il eut la bonne fortune<br />

J o u r n a l u n iv e r sel d e la L itté r a tu r e , d e s S c ie n c e s e t d e s<br />

Arts. P A R A IS S A N T L E 1 er E T L E 15 D E C H A Q U E M O IS .<br />

5 me ANNÉE.<br />

N ° 1 6 - 1 5 A O U T 1 8 8 3<br />

<strong>de</strong> rencontrer Sedulius, le mérite <strong>de</strong> l’apprécier,<br />

et le talent <strong>de</strong> s’en servir comme d’un instrum ent<br />

pour favoriser le mouvement intellectuel qui<br />

s’accusait dans sa principauté. Chose bizarre,<br />

c’est avec le poète irlandais que s’ouvre l’histoire<br />

<strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s littéraires <strong>de</strong> notre pays.<br />

M. Pirenne a placé dans une lum ière très<br />

favorable le portrait <strong>de</strong> ce personnage, à la<br />

figure originale, aux traits caractéristiques. Il<br />

en a fait une étu<strong>de</strong> complète. Après avoir<br />

envisagé Sedulius comme prosateur et comme<br />

poète, il a consacré tout un chapitre à l’étu<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> ses vers considérés comme source historique.<br />

A ce point <strong>de</strong> vue, son travail est surtout<br />

instructif .pour nous : il ouvre <strong>de</strong>s horizons<br />

nouveaux et fait saisir d’une m anière frappante<br />

l’utilité que peuvent présenter, à défaut <strong>de</strong><br />

chroniqueurs, les poètes du moyen Age Par <strong>de</strong>s<br />

passages interprétés avec une intelligente sagacité,<br />

par <strong>de</strong>s rapprochem ents judicieux, M. Pirenne<br />

est parvenu à reconstituer une bonne<br />

partie <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> Liège au ixe siècle, histoire<br />

dont on ne connaissait presque rien.<br />

Dans un appendieequi, bien certainem ent, ne<br />

sera pas la partie la moins rem arquée <strong>de</strong> sa<br />

dissertation, M. Pirenne a publié, d’après<br />

l’unique m anuscrit conservé à la Bibliothèque<br />

royale <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong> — et dont il a eu la bonne<br />

idée <strong>de</strong> donner un fort joli fac-sim ilé, — les<br />

vingt-cinq poésies <strong>de</strong> Sedulius restées inédites<br />

jusqu’à ce jour.<br />

Afin <strong>de</strong> donner à ce compte rendu quelque<br />

utilité pratique, je voudrais attirer l’attention <strong>de</strong><br />

ceux qui s’occupent d’archéologie et <strong>de</strong> l’histoire<br />

<strong>de</strong> l’art, sur le parti qu’ils pourraient tirer, pour<br />

leurs étu<strong>de</strong>s, <strong>de</strong> ces petits poèmes, dont la forme<br />

les effarouchait peut-être un peu.<br />

Sedulius vit encore <strong>de</strong>bout le palais épiscopal<br />

<strong>de</strong> Hircaire (je ne sais trop pourquoi M. Pirenne<br />

l’appelle nouveau) que les Normands détruisirent<br />

en 881, et il en parle avec adm iration. S’il n’en<br />

fait pas une <strong>de</strong>scription détaillée, au moins nous<br />

fournit-il à son sujet <strong>de</strong>s renseignem ents d’un<br />

haut intérêt et qui sont restés inconnus à<br />

M. Henaux lorsqu’il écrivit sa notice sur le<br />

palais carolingien. « Le toit paraît en avoir été<br />

couvert en tuiles <strong>de</strong> diverses couleurs. Des<br />

fenêtres nom breuses et garnies <strong>de</strong> vitres, répandaient<br />

dans les appartements intérieurs une<br />

lum ière abondante. Sur les voûtes, un habile<br />

pinceau avait prodigué les <strong>de</strong>ssins les plus<br />

capricieux, les couleurs les plus vives et les<br />

plus fraîches. Des lam bris ciselés garnissaient<br />

les m urailles décorées <strong>de</strong> nombreuses peintures.<br />

Enfin, les pentures <strong>de</strong>s portes, les serrures et<br />

les clefs finement ouvragées, attestaient l’habileté<br />

<strong>de</strong>s artisans liégeois. » (Sedidius <strong>de</strong> Liège,<br />

p. 48.) C’est probablem ent à ce même édifice<br />

que le poète fait allusion lorsqu’il décrit une<br />

fête à propos <strong>de</strong> laquelle les hötes <strong>de</strong> Hircaire<br />

se trouvent réunis dans une gran<strong>de</strong> salle dont<br />

les m urs sont délicatem ent peints <strong>de</strong> couleurs<br />

PRIX D’ABONNEMENT :<br />

Belgique, 8 fr. par an j étranger(union postale),i O fr,<br />

vives et gaies, or, vert, rouge, bleu, azur, et<br />

qu’éclairent <strong>de</strong>s fenêtres en plein cintre, dont<br />

le vitrail semble avoir représenté une croix :<br />

Nobilis aliithroni crucis exprim itur <strong>de</strong>cus almum<br />

V itrea, qua varium luiia carpit iter.<br />

Ces <strong>de</strong>scriptions, peut-être parées <strong>de</strong>s charm es<br />

trom peurs <strong>de</strong> la poésie, ne nous perm ettent, il<br />

est vrai, <strong>de</strong> saisir du tableau que <strong>de</strong>s lignes<br />

fugitives et <strong>de</strong>s contours indécis; mais elles<br />

suffisent, néanmoins, pour attester chez nous,<br />

au milieu <strong>de</strong>s obscurités du ixe siècle, un goût<br />

artistique, une recherche du beau dont on était<br />

loin <strong>de</strong> se douter.<br />

Dans son Histoire <strong>de</strong> la peinture à Liège,<br />

M. Helbig nous apprend que l’habitu<strong>de</strong> do<br />

revêtir les m urs, les voûtes et le sol même do<br />

peintures décoratives ou <strong>de</strong> mosaïque, était<br />

répandu dès le vi° siècle, et que, sous l’épiscopat<br />

d’Eracle, qui vivait au x°, la peinture<br />

murale était encore <strong>de</strong> mo<strong>de</strong> à Liège (I). Dans<br />

une <strong>de</strong>s pièces qui viennent <strong>de</strong> voir le jour par<br />

les soins <strong>de</strong> M. Pirenne, Sedulius nous décrit<br />

une scène ainsi représentée: «Au prem ier plan,<br />

dit-il, se voit l’illustre M artin; o n .ap erço it<br />

ensuite Hilaire au souriant visage; et puis saint<br />

Marc avec son brillant vêtem ent; lo savant<br />

Sulpicius fait entendre sa parole d’o r; le grand<br />

Remi se fait rem arquer par sa tête magnifique;<br />

et toi, Séverin, ton front serein attire les regards ;<br />

saint Juste aime à se vêtir <strong>de</strong> pourpre; Maximien,<br />

on admire tes cheveux blonds; saint<br />

Pierre est accompagné d’une suite illustre : à sa<br />

droite on voit Apollinaire, à sa gauche se tient<br />

Ambroise, heureux <strong>de</strong> se trouver dans la société<br />

d’un tel maître. »<br />

Où se trouvait cette mosaïque ou cette fresque?<br />

Pourquoi cette réunion <strong>de</strong> personnages divers?<br />

Le poète a négligé <strong>de</strong> nous le dire. Il en est <strong>de</strong><br />

même d’une autre peinture ou décoration, dont<br />

il décrit le sujet et qui, ayant été faite sur l’ordre<br />

<strong>de</strong> l’archevêque Gonlhard, se trouvait probablement<br />

à Cologne : « Cet ange scelle les nouveaux<br />

mystères <strong>de</strong> la loi du Christ (il tenait probablem<br />

ent en main le livre du nouveau testament),<br />

et celui-ci porte un vase rem pli <strong>de</strong> la (leur <strong>de</strong><br />

pureté (<strong>de</strong> lys?) ; cet autre répand par son<br />

encensoir les parfums sacrés <strong>de</strong> la prière. Vous<br />

entourez le tröne <strong>de</strong> Dieu, lion, bœuf, homme<br />

et roi <strong>de</strong>s oiseaux (l’aigle : il s’agit <strong>de</strong>s symboles<br />

représentant les quatre évangélistes), et vous,<br />

Geon, Phison, Euphrate et Tigre (les quatre<br />

lleuves du Paradis). Voici que se présente un<br />

ange, la gloire <strong>de</strong> l’ancienne loi (ayant sans<br />

doute en main le livre <strong>de</strong> l’ancien testament), et<br />

un autre portant dans un vase les vœux <strong>de</strong>s<br />

anciens patriarches. Celui-ci exhale les richesses<br />

fi) C et usage, du reste, nous a v a it e tc légué p ar la civilisa<br />

tion rom aine, qui a v ait laissé tant <strong>de</strong> traces ch ez nous. Toutes<br />

les v illa fouillées sur notre sol par les S ociétés arch éolo giques<br />

sont là pour l'attester. V o yez, notam m ent, au M usée <strong>de</strong><br />

N am ur, la m agnifique m osaïque découverte dans la villa<br />

d’A nthée.

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