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1882 - Université Libre de Bruxelles

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L'ATHENÆUM BELGE<br />

BUREAUX :<br />

R U E D E L A M A D E L E IN E , 26 , A B R U X E L L E S .<br />

S o m m a ir e . — L a Chronique <strong>de</strong>s Évêques <strong>de</strong><br />

Liège (Stanislas Bormans). - Étu<strong>de</strong>s sur la langue<br />

française, publiées par K örling et K oschwitz<br />

(A. Scheler). — L ’année artistique illustrée. —<br />

Chronique. — Sociétés savantes. — Bibliographie.<br />

O U V R A G E S N O U V E A U X .<br />

Die Ch ronica pontificum leodiensium , eine<br />

vertorene Quellenschrift <strong>de</strong>s XIII. Jahrhun<strong>de</strong>rts,<br />

nebst einer Probe <strong>de</strong>r W ie<strong>de</strong>rlierstel-<br />

lung, von Friedrich Franz. Strassburg, <strong>1882</strong>,<br />

in-8°.<br />

De nos jours on a quelque peine à se figurer<br />

l’intensité du développement littéraire qui régna<br />

à Liège pendant une bonne partie du moyen<br />

Age. C’est un fait <strong>de</strong>s plus rem arquables <strong>de</strong> notre<br />

histoire, et, s’il a déjà attiré l’attention, il n’a<br />

pas encore fait l’objet, ainsi qu’il le mérite, d’un<br />

travail tout spécial (1) . Du neuvième au onzième<br />

siècle surtout, la souveraineté intellectuelle<br />

appartint, sans conteste, à l’antique cité, qui,<br />

pendant cette longue pério<strong>de</strong>, <strong>de</strong>vint pour la<br />

Lotharingie la terre nourricière <strong>de</strong>s lettres et<br />

<strong>de</strong>s arts. Sa réputation s’étendait jusqu’aux confins<br />

<strong>de</strong> l’Europe latine Dans ses écoles, considérées<br />

comme les m eilleures <strong>de</strong> l’Allemagne du<br />

Nord par la science <strong>de</strong> ses m aîtres et la discipline<br />

<strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s, se pressait une jeunesse<br />

nom breuse accourue <strong>de</strong>s nations voisines, <strong>de</strong> la<br />

France, <strong>de</strong> l’Allemagne et même <strong>de</strong> l’Italie.<br />

Dans ces jeunes gens, qui rentraient chez eux<br />

formés par <strong>de</strong> fortes et saines étu<strong>de</strong>s, ces contrées<br />

trouvaient <strong>de</strong>s jurisconsultes profonds, <strong>de</strong>s<br />

professeurs illustres, <strong>de</strong> savants évêques, en un<br />

mot, <strong>de</strong>s hommes distingués dans toutes les<br />

sciences et propres à rem plir les plus hautes,<br />

fonctions. On constate bien ailleurs <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s<br />

aussi brillantes pour la culture intellectuelle;<br />

mais elles ne sont que passagères, tandis qu’à<br />

Liège cet épanouissem ent <strong>de</strong> la science se maintint,<br />

presque sans interruption, jusqu’au quatorzième<br />

siècle. Selon toute probabilité, l’honneur<br />

doit en revenir à celle longue série <strong>de</strong><br />

prélats instruits qui se succédèrent sur le siège<br />

<strong>de</strong> saint Lambert.<br />

Cette magnifique efflorescence littéraire explique<br />

le grand nom bre d ’écrits sur l’histoire <strong>de</strong><br />

Liège qui sont arrivés jusqu’à nous. Malheureusem<br />

ent, à cöté <strong>de</strong> plusieurs chroniques qui<br />

occupent une place bien déterminée parmi les<br />

sources historiques, il en est d’autres dont les<br />

élém ents présentent un enchevêtrement si compliqué,<br />

que les efforts les plus persévérants <strong>de</strong><br />

(1 ) D isons le en passant : n’est il pas étonnant que p ersonne,<br />

jusqu’ici, n'ait répondu à cette question qui, <strong>de</strong>puis<br />

tant d années, figure dans le program m e <strong>de</strong>s concours d e la<br />

S ociété d’ém ulation : E x p o ser l'é ta t <strong>de</strong>s établissem en ts<br />

d 'in str u ctio n p u b liq u e à L iè g e , <strong>de</strong>p uis C harlem agne ju s q u 'à<br />

nos jo u r s (P ris <strong>de</strong> m ille francs)?<br />

Journal universel <strong>de</strong> la L ittérature, <strong>de</strong>s Sciences et <strong>de</strong>s A rts.<br />

P A R A IS S A N T L E 1er E T L E 15 D E C H A Q U E M O IS.<br />

5 me ANNEE.<br />

N ° 1 4 — 1 5 J U I L L E T 1 8 8 2<br />

la critique échouent à la tâche <strong>de</strong> les débrouiller.<br />

C’est cependant encore un essai <strong>de</strong> ce genre que<br />

M. Franz a voulu tenter.<br />

Je dois avouer qu’il n’est pas toujours facile<br />

<strong>de</strong> suivre l’auteur dans son argum entation. Cependant<br />

je vais essayer d'indiquer som mairement<br />

les gran<strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> son travail, après<br />

avoir déblayé le terrain <strong>de</strong>s raisonnem ents et<br />

<strong>de</strong>s dém onstrations subsidiaires qui embarrassent<br />

la marche.<br />

Au nom bre <strong>de</strong>s écrits utilisés par l’auteur<br />

anonyme du M agnum ch ronicon Delgicum. figure<br />

le F lorarium Belgicum, compilation d’un chanoine<br />

régulier du couvent <strong>de</strong> Dommelen, près<br />

d’Eindhoven, faite entre les années 1466 et 1472.<br />

Ce com pilateur cite lui-m êm e, parmi les sources<br />

où il a puisé, une Clironica pontificum Leodiensium<br />

qui n ’est plus connue que par les<br />

extraits qu’il en donne. C’est cette chronique,<br />

dont le texte intégral est donc perdu, qui fait<br />

l’objet <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> M. Franz.<br />

Il fait rem arquer d’abord que certains passages<br />

qui nous en ont été conservés dans le F lorarium ,<br />

offrent <strong>de</strong>s analogies frappantes avec les textes<br />

d’Albéric <strong>de</strong> Trois-Fontaines et <strong>de</strong> Gilles d’Orval;<br />

que-d’autres ne se retrouvent dans aucun <strong>de</strong> ces<br />

<strong>de</strong>ux auteurs, mais paraissent provenir d ’un<br />

écrit inconnu que l’auteur <strong>de</strong>s Gesta abbreviata<br />

pontificum Leodiensium avait sous les yeux<br />

lorsqu’i l composa son œ uvre (1) .<br />

Pour expliquer ces ressem blances, M. Franz<br />

se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si la Clironica pontificum Leodien ­<br />

siurn ne serait pas elle-même une compilation<br />

<strong>de</strong>s trois écrits que nous venons <strong>de</strong> citer. Il consacre<br />

son prem ier chapitre à réfuter cette hypothèse,<br />

et il le fait par <strong>de</strong>s comparaisons <strong>de</strong> textes<br />

si ingénieuses, qu’il serait difficile <strong>de</strong> n’être pas<br />

<strong>de</strong> son avis. En les examinant <strong>de</strong> près, on ne<br />

peut s’empêcher d’adm irer la sagacité dont il<br />

fait preuve, en même tem ps que la supériorité<br />

<strong>de</strong> cette école d’Allemagne dont, en fait<br />

<strong>de</strong> critique historique et d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s anciens<br />

textes, il faut bien l’avouer, nous avons encore<br />

beaucoup à apprendre.<br />

Dans le second chapitre, M. Franz s’applique à<br />

un examen plus rigoureux <strong>de</strong> l’œ uvre d’Albéric,<br />

et prouve que si l’auteur <strong>de</strong> la Clironica pontificum<br />

Leodiensium ne s’est pas servi <strong>de</strong> celle-là,<br />

Albéric, à son tour, n’a pas, lui non plus, mis<br />

cette Clironica à profit. Si donc il est constaté<br />

que ces <strong>de</strong>ux écrits sont indépendants l’un <strong>de</strong><br />

l’autre, on est bien forcé, pour expliquer leurs<br />

ressem blances, d’adm ettre que leurs auteurs ont<br />

puisé leurs renseignem ents dans une source<br />

commune.<br />

Le chapitre III est consacré à la question <strong>de</strong><br />

savoir si Gilles d’Orval et l’auteur <strong>de</strong>s Gesta<br />

(x) P ou r l’intelligence d e ce qui doit suivre, je d ira i que ces<br />

G esta abbreviata sont une chronique où l ’on retrouve en<br />

substance tout ce que contient G illes d ’O rv al, plus certains<br />

faits qui manquent à cet écrivain . L e m anuscrit s’en trouve à<br />

la B ib liothèqu e royale <strong>de</strong> <strong>Bruxelles</strong>.<br />

PRIX D'ABONNEMENT :<br />

Belgique, 8 fr. par an ; étranger (union postale), 1 0 fr.<br />

abbreviata se seraient servis <strong>de</strong> la C hronicapontificum<br />

Leodiensium , et vice-versà. L’auteur,<br />

par une suite <strong>de</strong> déductions <strong>de</strong>s plus subtiles, et<br />

notamment par <strong>de</strong>s argum ents ex silentio, arrive<br />

à la même conclusion que tantôt : ces différents<br />

auteurs sont restés étrangers les uns aux autres,<br />

et leurs points <strong>de</strong> contact ne s’expliquent que<br />

par la supposition que tous trois ont exploité un<br />

seul et même <strong>de</strong>vancier.<br />

Enfin, puisque tous ces écrits on t une origine<br />

commune, M. Franz se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> quelle pourrait<br />

bien être la rédaction m ère, qui aurait servi <strong>de</strong><br />

base à toutes les autres; et ses <strong>de</strong>rnières investigations<br />

l’am ènent à soupçonner que c’était la<br />

Chronique <strong>de</strong>s Vavassours, écrite, entre les<br />

années 1214 et 1227, par l’évêque <strong>de</strong> Liège<br />

Hugues <strong>de</strong> Pierrepont. Evi<strong>de</strong>mment, cette chronique<br />

<strong>de</strong>vait avoir une importance capitale, ear<br />

son auteur était, par la haute position qu’il occupait,<br />

mieux que personne au courant <strong>de</strong>s affaires<br />

<strong>de</strong> l’Etat; les renseignem ents authentiques ne<br />

pouvaient lui m anquer, et il eût été étonnant que<br />

personne n’eût songé à la m ettre à profit. Aussi,<br />

M. Franz n’hésite-t-il pas à la regar<strong>de</strong>r comme<br />

la souche, le point <strong>de</strong> départ <strong>de</strong> tous les écrits<br />

historiques faits à Liège <strong>de</strong>puis l’année 1230.<br />

Tel est le canevas du travail du savant allem<br />

and; il est serré et d’une texture soli<strong>de</strong>. Quant<br />

à son argum entation, on peut dire d’elle que<br />

c’est la bro<strong>de</strong>rie délicate et fine dont Ta orné une<br />

main exercée. Pour appuyer scs preuves, il invoque<br />

tour à tour Jean <strong>de</strong> W arnant, le Chronicon<br />

Gemblacense, Matthias <strong>de</strong> Lewis, Jean d ’Outremeuse,<br />

d’autres encore, et il est vraiment surprenant<br />

<strong>de</strong> voir avec quelle aisance un étranger<br />

se promène dans le dédale <strong>de</strong> nos historiens,<br />

mieux connus au <strong>de</strong> la du Rhin que chez nous.<br />

Ce n’est pas tout. Tout en avançant dans sa<br />

dém onstration principale, l’auteur trouve encore<br />

le temps d ’éclairer d’une vive lum ière les ténèbres<br />

qui entourent les questions inci<strong>de</strong>ntes <strong>de</strong><br />

son sujet. C’est ainsi qu’il combat avec une<br />

gran<strong>de</strong> force <strong>de</strong> logique l’opinion <strong>de</strong> M. Scheffer-<br />

Boichorst, le savant éditeur d'Albéric, dans les<br />

M onum enta G erm aniœ historica, qui avance<br />

que cet auteur aurait mis à profit la chronique<br />

<strong>de</strong> Gilles d’Orval : l’analogie entre ces <strong>de</strong>ux<br />

écrivains proviendrait encore une fois et uniquement<br />

<strong>de</strong> l’usage que tous <strong>de</strong>ux ont fait <strong>de</strong>s<br />

mêmes sources. De même, il réfute l’hypothèse<br />

<strong>de</strong> M. John Heller, auquel on doit, toujours dans<br />

cette collection <strong>de</strong>s M onum enta, l’édition <strong>de</strong><br />

Gilles d’Orval, et qui n’admet les Gesta abbreviata<br />

que comme un simple extrait <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong><br />

chronique du moine d’Orval. Selon lui, la présence<br />

dans ces Gesta <strong>de</strong> faits restés inconnus à<br />

Gilles, s’explique par l’existence à Orval d’une<br />

chronique antérieure à cet écrivain, œ uvre collective<br />

<strong>de</strong>s frères <strong>de</strong> ce m onastère, qui, tour à<br />

tour, et même après que Gilles eut déposé la<br />

plume, l’enrichissaient <strong>de</strong>s fruits <strong>de</strong> leurs lec­

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