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1882 - Université Libre de Bruxelles

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114 L’ATHENÆUM BELGE<br />

dém ontré que le roi Frédéric-Guillaume III seul<br />

avait fait échouer les démarches pressantes <strong>de</strong> la<br />

Russie, <strong>de</strong> l’Autriche et <strong>de</strong> l’A ngleterre, pour<br />

entraîner la Prusse dans la guerre contre la<br />

République. M. Bailleu déroule sous nos yeux<br />

ces délibérations im portantes dans tous leurs<br />

détails; il prouve que l’attitu<strong>de</strong> pacifique du roi<br />

fut surtout due à l’influence du secrétaire du<br />

cabinet Lombard, merveilleusement assisté, il<br />

est vrai, par l’irrésolution du monarque et sa<br />

défiance dans les ressources militaires et financières<br />

<strong>de</strong> la Prusse. Frédéric-Guillaume III, en<br />

effet, connaissait dans toute leur étendue les<br />

nombreux vices <strong>de</strong> l'organisation m ilitaire et<br />

administrative <strong>de</strong> son pays ; seulement il n’avait<br />

ni assez <strong>de</strong> volonté ni même assez d’intelligence<br />

pour pouvoir y rem édier. Il craignait donc tout<br />

conflit arm é qui aurait immédiatement dévoilé<br />

la faiblesse <strong>de</strong> l’Etat qu il gouvernait. Voilà la<br />

clef <strong>de</strong> la politique ultra-pacifique qui prévalut<br />

en Prusse jusqu'en 1806.<br />

Le ministère prussien était e n partie réellem ent<br />

favorable à la France. La dissolution intérieure<br />

<strong>de</strong> la monarchie <strong>de</strong> Frédéric le Grand est clairement<br />

prouvée par le fait — attesté d’ailleurs<br />

par les documents que publie M. Bailleu, — que<br />

plusieurs m inistres assurèrent l’envoyé français<br />

<strong>de</strong> leurs sympathies et <strong>de</strong>s intentions pacifiques<br />

du roi, et lui dévoilèrent les <strong>de</strong>sseins belliqueux<br />

<strong>de</strong> M. <strong>de</strong> H augw itz, ministre <strong>de</strong>s affaires<br />

étrangères. C’est à ces indiscrétions incroyables<br />

qu’il faut principalem ent attribuer l’échec <strong>de</strong>s<br />

exigences <strong>de</strong> la Prusse, qui <strong>de</strong>manda à la France<br />

l’évacuation <strong>de</strong> la Hollan<strong>de</strong> et la rétrocession<br />

<strong>de</strong>s provinces rhénanes. La France, quoique vaincue<br />

à ce moment par les coalisés, se garda bien<br />

d’acquiescer aux <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la P russe; elle<br />

savait, en effet, - pertinem m ent par ses amis<br />

parmi les hommes d’État <strong>de</strong> Berlin, que celle-ci<br />

ne tirerait jamais l’épée pour arriver à ses fins<br />

par l’emploi <strong>de</strong> la force. Evi<strong>de</strong>mment un Etat<br />

aussi chancelant n’était pas en mesure d’affronter<br />

les dangers <strong>de</strong> cette terrible époque.<br />

Voilà quelques-uns <strong>de</strong>s faits marquants qui ressortent<br />

du laborieux et consciencieux travail <strong>de</strong><br />

M. Bailleu. Nous attendons avec curiosité la suite<br />

do cet im portant ouvrage.<br />

II me paraît que M. Bailleu dédaigne un peu trop<br />

l’influence du prince Henri (p. XXXII, note), en<br />

faveur do la France en 1796.Il est vrai que Fré-<br />

déric-Guillaume Il n ’aimait point son oncle ;<br />

pourtant à cette époque le comte Haugwitz le<br />

consultait souvent et se laissait diriger en partie<br />

par lui (Sybel, IV, 246). M. P h i l i p p s o n .<br />

C O R R E S P O N D A N C E L I T T E R A I R E D E P A R I S .<br />

Aubé, Les Chrétiens dans l'empire rom ain, <strong>de</strong> la<br />

fin <strong>de</strong>s Antonins au m ilieu du IIIe siècle. Didier.<br />

— J. Z eller, L ’E m pire germ anique sous les H ohenstaufen<br />

; l’em pereur Frédéric Barberousse.<br />

Didier. — G uerrier, M adam e Guyon, sa vie, sa<br />

doctrine et son influence, Didier. — Saint-René<br />

Taillandier, Etu<strong>de</strong>s littéraires. Plon. — Hippeau,<br />

L’Instruction publique en France pendant la<br />

Révolution. Didier. — Babeau, L ’Êcole <strong>de</strong> v illage<br />

pendant la Révolution. D idier. — De Nolhac,<br />

La Dalm atie, les iles Ioniennes, Athènes, le<br />

mont Athos. Plon.<br />

M. Aubé continue dans le volume intitulé<br />

Les Chrétiens dans l'em pire rom ain <strong>de</strong> la fin<br />

<strong>de</strong>s Antonins au m ilieu du m* siècle (180-249),<br />

ses étu<strong>de</strong>s qu’il a commencées sur les rapports<br />

<strong>de</strong> l’Église chrétienne avec la Société civile et<br />

politique où elle s’établit. Dans un prem ier vo­<br />

lume, il a raconté l’histoire <strong>de</strong>s persécutions<br />

<strong>de</strong> l'Église ju sq u ’à la fin <strong>de</strong>s A ntonins, et dans<br />

un <strong>de</strong>uxième, la polém ique païenne à la fin du<br />

iie siècle; dans celui-ci, qui esl le troisièm e, il<br />

expose les rapports <strong>de</strong> l’Eglise chrétienne avec<br />

l’État durant une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> 70 ans, <strong>de</strong>puis la<br />

mort <strong>de</strong> Marc-Aurèle jusqu’à celle <strong>de</strong> Philippe<br />

l’Arabe (180-249). Cette pério<strong>de</strong> est, selon<br />

l’expression <strong>de</strong> M. Aubé, l’âge d’or du christianisme,<br />

en même temps qu’elle est l’âge <strong>de</strong> fer<br />

du mon<strong>de</strong> rom ain. Durant ces soixante-dix années<br />

l’Église jouit constamment <strong>de</strong> la paix, si<br />

ce n’est sous Septime Sévère et Maximin; encore,<br />

M. Aubé croit-il que la persécution fut,<br />

sous Septime Sévère, locale et inlerm iltente, et<br />

que, sous Maximin, elle ne sévit pas dans l’empire<br />

entier et n’attaqua que les personnages les<br />

plus marquants <strong>de</strong> quelques Églises ; selon lui,<br />

si plusieurs condamnations furent prononcées<br />

et si quelques violences se produisirent çà et là<br />

sous les autres princes, ce furent <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts<br />

ou <strong>de</strong>s exceptions. Le m eilleur d’entre les empereurs<br />

syriens, Alexandre Sévère, ne professait-il<br />

pas en m atière religieuse une sorte <strong>de</strong><br />

cosmopolitisme? Dans le grand oratoire où il<br />

avait coutum e <strong>de</strong> sacrifier tous les m atins,<br />

parm i les images <strong>de</strong> ceux qui honoraient le<br />

plus l’humanité, à cöté <strong>de</strong> celles d’Alexandre le<br />

Grand, d’Apollonius, d’Abraham, d’Orphée, il<br />

avait fait placer celle du Christ. On dit m êm e — .<br />

c’est Lampri<strong>de</strong> qui raconte le fait — qu’Alexandre<br />

voulut ériger un tem ple au Christ et l’adm<br />

ettre au nom bre <strong>de</strong>s dieux, et qu’il fut<br />

détourné <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>ssein par les observations <strong>de</strong>s<br />

pontifes, alléguant que, s’il le faisait, tout le<br />

mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>viendrait chrétien et que les temples<br />

seraient délaissés. Elogabal avait d’ailleurs,<br />

comme le dit M. Aubé (p. 301), convié spontanément<br />

les chrétiens à occuper un sanctuaire<br />

dans son grand tem ple du Palatin, et m ontré,en<br />

installant pompeusement son dieu syrien dans<br />

la capitale <strong>de</strong> l’em pire, qu’il dépendait du souverain<br />

<strong>de</strong> donner <strong>de</strong>s dieux à Rome. Quant à la<br />

mère d’Alexandre Sévère, Mammée, M. Aubé ne<br />

croit pas qu’elle fût chrétienne; c’était une<br />

très vertueuse personne qui goûtait les maximes<br />

<strong>de</strong> l’Évangile et désirait voir Origène, sans faire<br />

pour cela profession <strong>de</strong> christianism e. Mais,<br />

sous Philippe, l’Église, rem arque l’auteur, eut<br />

peut-être la faveur, car ce prince, sans l’avouer,<br />

est <strong>de</strong> cœ ur avec elle. Ainsi, conclut M. Aubé,<br />

pendant ces 70 ans <strong>de</strong> tranquillité presque<br />

absolue, elle a pris position partout; elle est<br />

assez puissante m aintenant dans un em pire à<br />

<strong>de</strong>mi disloqué, changeant si fréquemment <strong>de</strong><br />

mains, et que le m alheur <strong>de</strong>s tem ps va forcer à<br />

regar<strong>de</strong>r surtout aux frontières (p. 498).<br />

Le 4e volume <strong>de</strong> l’H istoire d ’Allem agne, <strong>de</strong><br />

M. Jules Zeller, comprend quatre livres : le<br />

livre VII, consacré à Lothaire <strong>de</strong> Saxe; le<br />

livre VIII, à Conrad III, le fondateur <strong>de</strong> la dynastie<br />

<strong>de</strong>s Hohenstauffen ; le livre IX, à Frédéric<br />

B arberousse; le livre X, à Henri VI. Le récit <strong>de</strong><br />

M. Zeller manque parfois <strong>de</strong> vivacité ; mais le<br />

consciencieux et laborieux auteur a, dans les<br />

500 pages qui forment le volume, amassé tant<br />

<strong>de</strong> faits, rassemblé tant <strong>de</strong> dates et d’événements<br />

divers! On rem arquera le jugem ent qu’il<br />

porte su r Conrad III, « plus rem uant qu’actif,<br />

visant ce qui était loin et m anquant ce qui était<br />

près, <strong>de</strong>ux fois croisé sans rendre service à<br />

Jérusalem , excommunié par le Saint-Siège en<br />

<strong>de</strong>çà <strong>de</strong>s Alpes, poussé par lui à l’em pire au <strong>de</strong> la ,<br />

roi d'Italie sans royaume et em pereur en Alle­<br />

magne sans couronne, hésitant entre Arnaud <strong>de</strong><br />

Brescia et Eugène III... » (p. 113). Nous signalerons<br />

encore les chapitres X et XI du livre IX,<br />

relatifs à l’évolution <strong>de</strong> la constitution <strong>de</strong> l’Empire<br />

et à la situation <strong>de</strong> la puissance impériale<br />

en Allemagne; le fait qui domine cette situation,<br />

c’est l’avénement <strong>de</strong>s principautés héréditaires<br />

pour les laïques et immuables pour les pouvoirs<br />

ecclésiastiques ; l’em pereur est seulement<br />

« paré d’un titre retentissant qu’il fait rem onter<br />

dans la nuit <strong>de</strong>s tem ps, mais qui s’élève si haut<br />

dans l’idéal, dans la nue, qu’il risque <strong>de</strong> s'y<br />

perdre » (p. 332). Aussi, dit encore M. Zeller,<br />

tout s’isole, se particularise, se m orcelle,<br />

s’ém iette, en un mot, se féodalise, et le pouvoir<br />

im périal, comme tel, tend à perdre racine dans<br />

le sol envahi par la forte et étouffante poussée<br />

<strong>de</strong> l’essence féodale (p. 352). Heureusement pour<br />

eux, les Hohenstauffen étaient <strong>de</strong> grands seigneurs<br />

terriens ; ils accroissaient sans cesse leurs<br />

domaines <strong>de</strong> famille, et c’est sur cette base<br />

soli<strong>de</strong> <strong>de</strong>s possessions territoriales et patrim oniales<br />

que Frédéric Barberousse eut soin d’établir<br />

sa puissance dans l’empire. Les Hohenstauffen,<br />

écrit l’historien, s’attachent volontiers à la<br />

terre, ils augm entent davantage leur propriété,<br />

ils veulent river leur dynastie au sol ; c’est le<br />

géant <strong>de</strong> la fable, qui, obligé <strong>de</strong> renouveler<br />

sans cesse les forces qu’il dépense dans la lutte,<br />

touche, tant qu’il peut, la terre <strong>de</strong> son pied<br />

(p. 357). iL faudrait citer encore le jugem ent do<br />

M. Zeller su r Frédéric B arberousse; l’auteur<br />

apprécie la personne et l’œ uvre du grand em ­<br />

pereur surtout à l'ai<strong>de</strong> d’Otton <strong>de</strong> Frisingen et<br />

rem arque la mélancolie qui ne se dissim ule pas<br />

toujours sous la rhétorique du moine <strong>de</strong> Morimont.<br />

Enfin, vient le règne d’Henri VI, « plus<br />

violent que fort et plus inexorable que sévère,<br />

plus fertile en ressources qu’en idées, entouré<br />

d’instrum ents serviles plutöt que <strong>de</strong> serviteurs<br />

dévoués, gâtant ses projets par ses chim<br />

ères, ses bienfaits par la corruption, ses négociations<br />

par les équivoques, ses victoires par<br />

ses vengeances, son gouvernem ent par son<br />

avarice »; il m eurt prém aturém ent et laisse tout<br />

« non seulem ent inachevé, mais inachevable<br />

à celui qui sera Frédéric II.<br />

Madame Guyon est célèbre, mais elle n’est<br />

guère connue; on sait que ce fut une mystique<br />

qui parut à la fin du XVIIe siècle et qui entraîna<br />

Fénelon ; mais on ignore sa vie, ses écrits, son<br />

influence. M. G uerrier a dissipé cette ignorance :<br />

grâce à <strong>de</strong>s documents qu’il a trouvés à Orléans<br />

et à Paris, il nous raconte les <strong>de</strong>stinées <strong>de</strong> cette<br />

femme extraordinaire. Il la m ontre d’abord<br />

élevée dans une petite ville <strong>de</strong> province (à Montargis),<br />

mariée à un M. Guyon qu’elle n ’aime pas,<br />

mais qu’elle soigne avec un fidèle dévouement.<br />

Veuve à 28 ans, atteinte <strong>de</strong> la petite vérole et<br />

<strong>de</strong>venue lai<strong>de</strong>, à ce qu’elle croyait, par la volonté<br />

<strong>de</strong> Dieu, elle s’abandonne au mysticisme,<br />

elle ne veut être qu’à Dieu seul ; malgré trois<br />

enfants encore jeunes qu’elle avait eus <strong>de</strong> son<br />

mariage, malgré les supplications <strong>de</strong> sa famille,<br />

elle se regar<strong>de</strong> comme unie à Dieu, et, suivant la<br />

loi <strong>de</strong> son union sacrée qui lui comman<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

tout quitter pour suivre cet époux divin, elle se<br />

défait <strong>de</strong> ses biens et entre successivement aux<br />

Nouvelles Catholiques <strong>de</strong> Gex et aux U rsulines<br />

<strong>de</strong> Thonon. Puis elle mène une vie errante, une<br />

vie d ’apostolat, prêche le mysticisme et l’am our<br />

pur <strong>de</strong> Dieu à Grenoble, à Turin, à Verceil, à<br />

Dijon; enfin elle écrit <strong>de</strong>ux ouvrages, le Moyen<br />

courte t les Torrents spirituels. Selon Mme Guyon,

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