1882 - Université Libre de Bruxelles
1882 - Université Libre de Bruxelles
1882 - Université Libre de Bruxelles
Create successful ePaper yourself
Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.
278<br />
chef tomba dangereusem ent mala<strong>de</strong> en même<br />
temps que les indigènes se montraient plus hostiles,<br />
plus défiants, moins accessibles à l’intelligence<br />
du but <strong>de</strong> l’entreprise. Ce ne fut toutefois<br />
qu’un arrêt m om entané; au bout <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux mois,<br />
Stanley était rétabli et les négociations conduisaient<br />
à la cession amiable d’un terrain sur<br />
lequel est établie la station <strong>de</strong> Manyanga. Située<br />
à <strong>de</strong>ux kilom ètres <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> cataracte <strong>de</strong><br />
Ntombo-Mataka, dont le mugissement se perçoit<br />
dans un rayon <strong>de</strong> dix kilomètres, la station<br />
occupe le sommet d’une colline <strong>de</strong> 80 m ètres <strong>de</strong><br />
hauteur, et reçoit la brise rafraîchissante du<br />
sud-ouest; les bâtiments affectent la formé d’un<br />
quadrilatère dont les maisons d’habitation, les<br />
ateliers, les magasins en fer constituent les<br />
cötés. Quelques constructions dépendantes se<br />
trouvent sur le bord opposé du fleuve et ont<br />
pour but <strong>de</strong> faciliter les communications entre<br />
les <strong>de</strong>ux rives. Des concessions considérables<br />
<strong>de</strong> terrains ont été obtenues <strong>de</strong>s chefs indigènes.<br />
» Cent cinquante-<strong>de</strong>ux kilomètres séparent<br />
Manyanga du Staûley Pool. Celte section du<br />
fleuve est à peu près totalem ent innavigable ; le<br />
sol, sur les <strong>de</strong>ux rives, est d’autre part profondém<br />
ent raviné dans une notable partie du trajet.<br />
Ces obstacles onl été surm ontés, et un chemin<br />
au moins suffisant pour le passage <strong>de</strong>s convois<br />
a été praliqué. Ce chemin débouchait sur le<br />
Stanley-Pool par la rive droite, suivie dès l’origine.<br />
Quand Stanley, <strong>de</strong>vançant l’expédition,<br />
arriva, au mois <strong>de</strong> juillet 1881, au lac où commence<br />
le Congo navigable, il se trouva en présence<br />
d’une situation im prévue. M. <strong>de</strong> Brazza<br />
avait conclu, au mois d’octobre <strong>de</strong> l'année précé<strong>de</strong>nte,<br />
un traité par lequel le chef Makoko<br />
cédait, disait-on, à la France la souveraineté <strong>de</strong><br />
la rive septentrionale du lac. Quelle que fût la<br />
portée <strong>de</strong> cet acte, bien que la force relativem<br />
ent considérable dont il disposait lui eût permis<br />
<strong>de</strong> briser toute résistance, Stanley passa sur<br />
la rive gauche, où l’appelait un chef ami. Une<br />
convention solennelle, à laquelle participèrent<br />
tous les chefs du pays, assura <strong>de</strong> ce cöté l’avenir<br />
<strong>de</strong> l’entreprise. Quatre mois après l’arrivée du<br />
gros <strong>de</strong> l’expédition aux bords du lac, la quatrièm<br />
e station, appelée Léopoldville, s’élevait à<br />
Nlamo et <strong>de</strong>venait bientôt un centre <strong>de</strong> culture<br />
et <strong>de</strong> civilisation. Des <strong>de</strong>ux rives du Congo, les<br />
indigènes y affluent déjà dans l’espoir d ’échanger<br />
leurs produits. Cet établissement était à peine<br />
créé au mois <strong>de</strong> février <strong>1882</strong>, que Stanley rem<br />
ontait encore <strong>de</strong> 160 kilom ètres le cours libre<br />
du tleuvo et, grâce à d’im portantes concessions<br />
obtenues <strong>de</strong>s chefs du pays, fondait une cinquième<br />
station à Ibaka, au confluent du Quango.<br />
Cet acte avait une haute portée : il annonçait<br />
l’ouverture <strong>de</strong> la navigation intérieure et promettait<br />
<strong>de</strong> nouvelles découvertes.<br />
» Quatre steamers portent aujourd’hui, sur le<br />
Congo, le pavillon <strong>de</strong> l’Association internationale.<br />
La Belgique et l'Espérance naviguent entre<br />
Banana et Vivi,sur la partie inférieure du fleuve;<br />
le Boyal, qui marche avec une vitesse <strong>de</strong> douze<br />
nœ uds, <strong>de</strong>ssert la section périlleuse et tourmentée<br />
qui s’étend entre Isanghila et Manyanga;<br />
Y E n avant a été lancé le 3 décembre 1881 sur<br />
les eaux du Slanley-Pool : il a <strong>de</strong>vant lui une<br />
carrière libre <strong>de</strong> 1,500 kilomètres, aboutissant<br />
au centre même du continent africain.<br />
• » Tels sont les résullats acquis : ils ont un<br />
incontestable caractère d’utilité et <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur,<br />
et s’imposent d’autant plus ù l’attention publique<br />
qu’ils ont été obtenus sans l’intervention pécuniaire<br />
d’aucun gouvernem ent et par <strong>de</strong>s moyens<br />
absolument irréprochables....<br />
» Dès aujourd’hui, après cinq ans <strong>de</strong> travaux,<br />
la moitié <strong>de</strong> la tâche que s’étaient assignée<br />
l’Association internationale et le Comité du<br />
Congo, est accomplie. L’élan rem arquable qui<br />
s’est manifesté autour d ’eux, dans le même laps<br />
L’ATHENÆUM BELGE<br />
<strong>de</strong> tem ps, vers les explorations africaines et |<br />
qui grandit <strong>de</strong> jour en jour, est une preuve cer- j<br />
taine que leur initiative répondait à un besoin<br />
<strong>de</strong> l’époque. De 1877 à <strong>1882</strong>, <strong>de</strong> nombreuses<br />
expéditions géographiques et missions religieuses<br />
se sont organisées <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux cötés <strong>de</strong><br />
l’équaleur, se dirigeant les unes du nord au sud,<br />
les autres du sud au nord, vers celle ligne centrale<br />
que tracent <strong>de</strong> concert l’Association africaine<br />
et le Comité du Congo et où convergeront<br />
désormais tous les efforts. Plusieurs gouvernements<br />
européens, ceux notam m ent <strong>de</strong> l’Allemagne,<br />
<strong>de</strong> la France, <strong>de</strong> l’Italie, du Portugal,<br />
ont encouragé et largem ent subventionné ce<br />
mouvement. Ce serail un tableau d’un vif intérêt<br />
que celui qui le relracerait, ne fût-ce que dans<br />
ses gran<strong>de</strong>s lignes. Du nord on a vu s’avancer<br />
vers le noyau inconnu les DrsJunker etSchnitzler<br />
par la région <strong>de</strong>s sources du Nil; MM. Rohlfs et<br />
Stecker par les oasis <strong>de</strong> laTripolitaine ; ce <strong>de</strong>rnier<br />
et M. Schuver par l’Abyssinie; M. Gessi et, après<br />
sa m ort, MM. Matteucci et Massari, traversant par<br />
les États du Soudan l’Afrique tout entière sur<br />
sa plus gran<strong>de</strong> étendue; le colonel Flatters et<br />
ses infortunés compagnons à travers le Sahara;<br />
le Dr Lenz par le Maroc jusqu’à Tombouctou; le<br />
capitaine Gallieni et le Dr- Bayol dans la vallée<br />
du Niger. En sens inverse, allant du sud au<br />
nord ou <strong>de</strong> l’ouest à l'est, se rencontrent<br />
M. llolub dans le bassin du Zambèse; les membres<br />
<strong>de</strong> l’expédition portugaise, MM. Serpa Pinto,<br />
Ivens et Capello, dans la région <strong>de</strong>s sources et<br />
sur le cours m oyen'<strong>de</strong> ce grand fleuve ainsi que<br />
dans la vallée du Quango ; le malheureux capitaine<br />
Phipson-W ybrants et ses coopérateurs sur<br />
le Sabia ; surtout les nom breux voyageurs<br />
envoyés sans interruption "au Lunda par la<br />
Société africaine allem an<strong>de</strong>, MM. Pogge, SchiUt,<br />
von Mechow, Buchner, W issman. Daris la zone<br />
même où l’Association internationale et le Comité<br />
du Congo sont à l’œuvre, on a vu paraître, à<br />
l’est, l’abbé Debaize, MM. Keith Johnston et Thomson<br />
; à l'ouest, MM. Savorgnan <strong>de</strong> Brazza et<br />
Ballay. Ce ne sont là que les campagnes les plus<br />
rem arquables : combien d’autres, conçues sur<br />
un plan plus mo<strong>de</strong>ste mais non moins méritoires,<br />
ne pourrait-on citer? Les missions religieuses<br />
aus?i se sont m ultipliées et ont mis en<br />
relief <strong>de</strong>s dévoûments admirables. Les églises<br />
anglaises seules ont organisé six gran<strong>de</strong>s missions<br />
qui portent la parole évangélique dans<br />
l’Ouganda, au lac Tanganyka, au lac Nyassa, sur<br />
la Rovuma e t sur les <strong>de</strong>ux rives du Congo. Les<br />
m issionnaires algériens, les PP. Delpechin et<br />
Duparquet, rivalisent noblem ent dans cette carrière<br />
avec les pasteurs protestants. Les tentatives<br />
moins vastes, limitées à <strong>de</strong>s points isolés, ne se<br />
comptent plus.<br />
» Tant d’efforts ne se concentrent pas su r une<br />
chim ère, tant <strong>de</strong> m artyrs ne m eurent pas pour<br />
une œuvre vaine. Avant la fin du siècle, l’Afrique<br />
sera explorée et ouverte; un continent nouveau<br />
gravitera dans l'orbite <strong>de</strong> la civilisation du<br />
mon<strong>de</strong>. Cet avènem ent prévu et certain sera-t-il,<br />
pour les sociétés contem poraines, un bienfait<br />
intégral? Faut-il craindre qu’il ne soit troublé<br />
par <strong>de</strong>s rivalités coloniales <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong> celles<br />
qui ensanglantèrent J’Asie et l’Amérique du<br />
xvie au xvme siècle? Il appartient à la sagesse<br />
<strong>de</strong>s hommes d'État qui ont les <strong>de</strong>stinées <strong>de</strong>s<br />
grands peuples européens entre leurs mains, <strong>de</strong><br />
résoudre ce problème. De la solution qui interviendra,<br />
peuvent dépendre, suivant sa nature,<br />
<strong>de</strong> longues années <strong>de</strong> paix ou <strong>de</strong> guerre, <strong>de</strong><br />
développement universel et pacifique ou <strong>de</strong><br />
compétitions funestes et stériles. Si le système<br />
européen est une vérité, c’est ici, semble-t-il, sur<br />
ce vaste théâtre où aucune force n ’est <strong>de</strong> trop,<br />
où aucun concours n ’est à dédaigner, qu’il<br />
pourrait s’affirmer <strong>de</strong> la façon la plus fécon<strong>de</strong>.<br />
De quelque manière que le <strong>de</strong>stin prononce,<br />
un grand exemple aura été donné. L’histoire<br />
dira si les fondateurs <strong>de</strong> l’Association internationale<br />
et du Comité d’étu<strong>de</strong>s du Congo, en faisant<br />
planter au cœ ur <strong>de</strong> l ’Afrique un drapeau<br />
neutre, se sont abusés sur l’esprit <strong>de</strong> leur<br />
tem ps. »<br />
C H R O N IQ U E .<br />
Dans un rapport dont le M oniteur belge a publié<br />
un extrait (numéro du 23 novembre), M. F . Plateau,<br />
professeur à l ’<strong>Université</strong> <strong>de</strong> Gand, donne d’intéressants<br />
renseignements sur le laboratoire <strong>de</strong> zoologie<br />
expérimentale <strong>de</strong> Roscoff(Finistère). Ce laboratoire,<br />
créé, il y a une dizaine d ’années, par M.<strong>de</strong> Lacaze-<br />
D uthiers, professeur à la Sorbonne et membre <strong>de</strong><br />
l’Institut, est dans une situation <strong>de</strong>s plus favorables^<br />
pour les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> zoologie m aritim e. Les eaux qui<br />
baignent la côte granitique <strong>de</strong> Roscoff sont, en<br />
effet, réchauffées p a rle Gulf-Stream et nourrissent,<br />
par suite, une faune d’une richesse inouïe.<br />
Celui qui ne connaît que nos plages sablonneuses<br />
si pauvres, rem arque M. Plateau, est transporté<br />
d ’adm iration en visitant, à m arée basse, la grève <strong>de</strong><br />
Roscoff et les rochers <strong>de</strong>s nombreuses petites îles<br />
voisines; chaque flaque d’eau, chaque anfractuosité<br />
renferm e d’innombrables animaux intéressants. Le<br />
naturaliste foule littéralem ent aux pieds les Actinies<br />
et les Spongiaires ; s’il retourne quelques pierres-<br />
un peu volumineuses, il en trouve toujours la face<br />
inférieure tapissée d’Ascidies, <strong>de</strong> Botrylles et <strong>de</strong><br />
Mollusques, tandis que <strong>de</strong>s Crustacés,<strong>de</strong>s Annéli<strong>de</strong>s<br />
et d’autres invertébrés à mouvements rapi<strong>de</strong>s fuient<br />
dans diverses directions.<br />
Les résultats sont bien autres encore si, dédaignant<br />
les chasses trop faciles <strong>de</strong> la grève, le zoologue<br />
s’embarque-dans un <strong>de</strong>s bateaux du laboratoire<br />
pour pêcher au filet ou pour draguer avec l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />
m arins attachés à l’établissement. Des excursions<br />
<strong>de</strong> ce genre se répètent souvent à Roscoff, tantôt<br />
d’après un program m e tracé d’avance, ta n tô t à la<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s travailleurs qui désirent étudier certains<br />
anim aux habitant <strong>de</strong>s stations spéciales. C’est<br />
ainsi qu’il a été organisé un petit voyage à l’embouchure<br />
<strong>de</strong> la rivière <strong>de</strong> Penzé, afin <strong>de</strong> récolter les<br />
M ya arenaria qui <strong>de</strong>vaient servir aux expériences<br />
<strong>de</strong> M. Plateau.<br />
Le laboratoire <strong>de</strong> zoologie expérimentale occupe,<br />
sur la place <strong>de</strong> la ville,<strong>de</strong>ux bâtim ents très simples,<br />
mais spacieux. Il com prend <strong>de</strong>s salles pour le tra <br />
vail en commun <strong>de</strong>s élèves proprem ent dits (les p rofesseurs<br />
en mission et les savants étrangers travaillant<br />
isolém ent dans <strong>de</strong>s cham bres mises à leur disposition),<br />
une bibliothèque assez bien fournie <strong>de</strong><br />
publications scientifiques, un très grand nom bre <strong>de</strong><br />
cham bres pour le logem ent <strong>de</strong>s naturalistes, enfin,<br />
un hangar vitré renferm ant <strong>de</strong>s aquarium s <strong>de</strong> diverses<br />
dimensions, alimentés par un courant constant<br />
d ’eau <strong>de</strong> m er.<br />
On a annexé, <strong>de</strong>puis peu, à l’établissement, un<br />
vaste vivier où l’on peut conserver, pendant longtem<br />
ps, les animaux vivants dans d ’excellentes conditions<br />
et un parc, c’est-à-dire un terrain situé à<br />
une certaine distance <strong>de</strong> la côte, clöturé par un m ur<br />
bas et couvert d ’eau à chaque m arée. Le parc est<br />
<strong>de</strong>stiné à fournir, en hiver,<strong>de</strong>s m atériaux <strong>de</strong> travail<br />
au laboratoire <strong>de</strong> la Sorbonne. A cet effet, on y<br />
dépose, pendant l ’été, différentes espèces d’animaux<br />
qu’il serait impossible d'aller pêcher au loin pendant<br />
la mauvaise saison.<br />
Le laboratoire possè<strong>de</strong>, <strong>de</strong> plus, <strong>de</strong>ux bateaux à<br />
voile et un m atériel <strong>de</strong> pêche et <strong>de</strong> dragage très complet.<br />
Le personnel se compose du professeur directeur,<br />
d’un m aître <strong>de</strong> conférences préparateur et <strong>de</strong> trois<br />
m atelots qui, outre leur service m aritim e, rem <br />
plissent aussi, avec beaucoup d’intelligence et d’h a <br />
bileté, les fonctions <strong>de</strong> garçons <strong>de</strong> laboratoire.<br />
Le séjour au laboratoire, l ’usage <strong>de</strong>s instruments<br />
et le logement sont absolument gratuits.<br />
« Plusieurs Belges, dit M. Plateau, entre autres<br />
M. le professeur L. Fre<strong>de</strong>ricq et M. Van <strong>de</strong> Vel<strong>de</strong>,