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1882 - Université Libre de Bruxelles

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140<br />

tragédies, ses tragédies romaines, ses dram es<br />

romanesques. Il a profité <strong>de</strong>s travaux les plus<br />

récents parus sur Shakspeare, en particulier <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux volumes <strong>de</strong> 51. Stapfer et <strong>de</strong> « l’Art dramatique<br />

<strong>de</strong> Shakspeare », <strong>de</strong> M. Ulrici. On ne<br />

peut que recom man<strong>de</strong>r à tous les lettrés les<br />

étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> M. Mézières; nous ne sommes pas <strong>de</strong><br />

ceux qui, comme un récent critique que M. Mézières<br />

nomme dans son introduction, oublierons<br />

jamais ce que l’éminent professeur <strong>de</strong> la Sorbonne<br />

a fait en France pour y répandre l’étu<strong>de</strong><br />

et l’amour <strong>de</strong>s littératures étrangères; s’il est un<br />

hom m e qui, avec MM. Taine, Montégut et Stapfer,<br />

connaisse Shakspeare, c’est M. Mézières, et on<br />

ne <strong>de</strong>vrait pas oublier qu’il a marqué les rapports<br />

<strong>de</strong> Shakspeare et <strong>de</strong> ses contem porains, distingué<br />

les phases diverses du génie du grand poète,<br />

mis en lum ière toutes les parties <strong>de</strong> son œuvre<br />

dans une série <strong>de</strong> savantes et spirituelles étu<strong>de</strong>s<br />

qui font le plus grand honneur à la critique<br />

française.<br />

Le livre <strong>de</strong> M. Vandal offre un tableau complet<br />

<strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> la France et <strong>de</strong> la Russie<br />

sous Louis XV; c’est un fort bon livre, écrit<br />

avec goût et même avec éclat ; on le lit avec un<br />

intérêt qui ne se lasse point. Il nous donne <strong>de</strong><br />

l’inédit, <strong>de</strong> cet inédit dont nous sommes aujourd’hui<br />

si friands; nombre <strong>de</strong> dépêches, enfouies<br />

dans les archives du m inistère <strong>de</strong>s affaires<br />

étrangères, sont soit résumées soit publiées dans<br />

leur entier par le laborieux auteur; nombre<br />

d ’instructions, <strong>de</strong> mémoires, <strong>de</strong> missives confi<strong>de</strong>ntielles<br />

sortent <strong>de</strong>s volumes à couverture<br />

fleur<strong>de</strong>lisée qui les re célait et nous font prendre<br />

sur le vif, saisir, pour ainsi dire, au jour le<br />

jour l’action diplomatique d’il y a un siècle et<br />

plus. M. Vandal retrace d’abord l’histoire <strong>de</strong>s<br />

relations <strong>de</strong> Pierre le Grand avec la France : il<br />

raconte, après tant d’autres, le voyage du tsar à<br />

Paris; il expose les propositions d’alliance que<br />

Pierre fit au Régent, soit pendant son séjour<br />

dans la capitale <strong>de</strong> la France, soit après sou r e ­<br />

tour dans scs Etals, par l’entrem ise do l’ambassa<strong>de</strong>ur<br />

Campredon qui signa au traité <strong>de</strong> Nystadt:<br />

Pierre voulait m arier sa secon<strong>de</strong> fille Elisabeth<br />

avec un prince <strong>de</strong> la maison <strong>de</strong> Bourbon, par<br />

exemple, avec le duc <strong>de</strong> Chartres, fils du Régent,<br />

et assurer au jeune couple la couronne <strong>de</strong> Pologne.<br />

Le plan échoua surtout parce que Dubois et<br />

le Régent craignaient <strong>de</strong> perdre l’alliance anglaise.<br />

Catherine 1re proposa sa fille Elisabeth,<br />

d’abord au roi, puis au duc <strong>de</strong> Bourbon, successeur<br />

du R égent; le duc <strong>de</strong> Bourbon, dans les<br />

rets <strong>de</strong> la m arquise <strong>de</strong> Prie, répondit par un<br />

refus sec aux offres <strong>de</strong> la tzarine, et Louis XV<br />

épousa la fille du souverain déchu <strong>de</strong> Pologne,<br />

Mario Leczinska. La France perdit, par conséquent,<br />

l’alliance <strong>de</strong> la Russie; Catherine Ire fit<br />

avec l’Autriche un traité d’alliance offensive et<br />

défensive (traité <strong>de</strong> Vienne, 1726). L’influence<br />

alleman<strong>de</strong> régna dès lors à Pétersbourg; elle ne<br />

fit que grandir, sous le règne d’Anne Ivanovna,<br />

qui ne s’entoura que d’Allemands (Ostermann,<br />

Munich. Biren) et sous Iw an <strong>de</strong> Brunswick. Mais<br />

Elisabelh, la secon<strong>de</strong> fille <strong>de</strong> Pierre le Grand, la<br />

même que Pierre, puis Catherine avaient offerte<br />

en mariage à Louis XV, Elisabeth entraîna les<br />

soldais et se fit proclam er impératrice (révolution<br />

du 6 décembre 1741), Elisabeth, comme<br />

l’explique fort bien M. Vandal, avait conservé<br />

pour ce roi <strong>de</strong> France qu’elle faillit épouser, un<br />

sentim ent <strong>de</strong> tendre curiosité et <strong>de</strong> sympathie<br />

profon<strong>de</strong> ; elle se croyait <strong>de</strong>stinée par cet événement<br />

<strong>de</strong> sa jeunesse et par ses goûts à servir<br />

<strong>de</strong> gage à une amitié durable entre la Russie et<br />

la France. Elle avait comme ami et confi<strong>de</strong>nt<br />

intime l’ambassa<strong>de</strong>ur français, La Chétardie, qui<br />

l'avait excitée et aidée à faire le coup d’Etat du<br />

6 décembre. M. Vandal nous trace un portrait<br />

fort curieux et, à ce qu'il nous paraît, fort ressemblant<br />

<strong>de</strong> ce marquis <strong>de</strong> La Chétardie, un <strong>de</strong>s<br />

types les plus caractéristiques du Français du<br />

L’ATHENÆUM BELGE<br />

XVIIIe siècle : vif, hardi, plein d’esprit et<br />

d’adresse, mais aim ant trop les aventures, se<br />

lançant au travers <strong>de</strong>s hasards et <strong>de</strong>s obstacles<br />

dans <strong>de</strong> folles entreprises qui réussissaient parfois,<br />

perdant par son étour<strong>de</strong>rie le fruit d’habiles<br />

combinaisons. Après avoir joué le souverain à<br />

Pétersbourg, après avoir régné dans le palais <strong>de</strong><br />

la tzarine et avoir vu les officiers <strong>de</strong> service se<br />

prosterner <strong>de</strong>vant lui en lui baisant la main et<br />

l’appelant du nom <strong>de</strong> « père », l’intrigant La<br />

Chétardie fut chassé <strong>de</strong> Russie. Pourtant la<br />

France ne perdit pas l’alliance ru sse; si les<br />

Russes s’unirent à Marie-Thérèse et parurent<br />

en Franconie, à la veille du traité d'Aix-la-<br />

Chapelle (1748), si Louis XV s’amusa à ruiner<br />

1’infl uence russe en Suè<strong>de</strong> et en Turquie par sa<br />

diplomatie secrète, le grand revirem ent <strong>de</strong> la<br />

politique française en 1756 changea tout :<br />

l'Autriche, <strong>de</strong>venant l’alliée <strong>de</strong> la France, entraînait<br />

la Russie avec elle, et Apraxine, Ferm or<br />

luttèrent contre l’armée <strong>de</strong> Frédéric II à Gross-<br />

Jaegerndorf et à Zorndorf. Il est vrai qu’ils se<br />

firent battre; il y avait alors tant d’intrigues à<br />

Pétersbourg, sous le règne <strong>de</strong> la coquette, paresseuse<br />

et déjà mala<strong>de</strong> Elisabeth, et l’am bassa<strong>de</strong>ur<br />

<strong>de</strong> France, Lhopital, était si m aladroit!<br />

M. Vandal nous introduit dans cette cour pleine<br />

<strong>de</strong> menées occultes et <strong>de</strong> m anœuvres suspectes;<br />

il nous peint la folie <strong>de</strong> Pierre III, l’ambition<br />

naissante <strong>de</strong> Catherine II. En somme, ce livre<br />

contient beaucoup d ’épiso<strong>de</strong>s intéressants; il<br />

met en lum ière les procédés,souvent m ystérieux<br />

et bizarres, <strong>de</strong> la diplomatie du XVIIIe siècle; il<br />

m ontre que l’alliance franco-russe fut formée<br />

trop tard et manqua trop <strong>de</strong> fermeté pour tenir<br />

la Russie en échec (1) .<br />

Nous avons déjà rendu compte <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux premiers<br />

volumes <strong>de</strong> l'Histoire du tribunal révo ­<br />

lutionnaire <strong>de</strong> P aris, <strong>de</strong> M. W allon ; en voici<br />

trois autres. Le troisièm e reprend les agissements<br />

du sanglant tribunal au 1er germ inal et<br />

les conduit au 1er prairial an II (21 mars-21 mai<br />

1794); on y voit comment le tribunal révolutionnaire<br />

se fait l’auxiliaire du Comité <strong>de</strong> salut<br />

public, et le défend à la fois et contre les intransigeants<br />

, contre ceux qui pensent que la<br />

Révolution n ’est pas encore allée assez loin, et<br />

contre les m odérantistes, contre ceux qui jugent<br />

que la course est faite et qu’il est temps d’enrayer.<br />

M. Wallon nous présente les prem iers,<br />

les hommes d’avant-gar<strong>de</strong> qui veulent pousser<br />

plus loin et toujours plus loin, un Hébert, un<br />

Ronsin, un Vincent, et tous ceux qui se décoraient<br />

eux-mêmes du beau nom d'enragés; mais<br />

Robespierre, Saint-Juste et leur groupe font<br />

m ettre les enragés en accusation, puis en arrestation<br />

; Hébert et ses dix-neuf coaccusés sont<br />

jugés comme conspirateurs et envoyés à l’échafaud<br />

; une femme, impliquée dans le procès, est<br />

réservée jusqu’à ses couches et exécutée ensuite.<br />

Le Comité <strong>de</strong> salut public, débarrassé <strong>de</strong>s<br />

enragés, se tourne alors contre les m odérés; il<br />

fait arrêter, après le rapport <strong>de</strong> Saint Just, Danton,<br />

Desmoulins, Lacroix, Philippeaux, Fabre<br />

d’Eglantine, Hérault <strong>de</strong> Sechelles, Delaunay,<br />

Chabot, Bazire, etc.; il retire la parole aux accusés,<br />

il circonvient le trib u n al, il imagine<br />

qu’une conspiration a été formée dans les prisons<br />

et fait com prendre dans le complot Chaumette,<br />

Gobel, Dillon. Mais les pouvoirs du Comité<br />

ne sont pas encore assez vastes ; les lois<br />

<strong>de</strong>s 12 et 27 germ inal augm entent son autorité;<br />

il fait créer un Bureau <strong>de</strong> la surveillance générale<br />

et <strong>de</strong> la police : Goutte, évêque constitutionnel<br />

<strong>de</strong> Saöne-et-Loire, a refusé <strong>de</strong> donner<br />

sa démission d'évêque ; vainement il déclare<br />

que s’il s’était démis, il aurait insulté le peuple<br />

qui l’avait nommé et qui possédait seul le droit<br />

<strong>de</strong> le renvoyer; il est envoyé à l’échafaud. Puis<br />

(1 ) L ire S c hlesw ig et non • Sch lesw ick » ; Bun<strong>de</strong>lw itz et<br />

non « Bun<strong>de</strong>lw ise » f r eu le est le mot allem and f r à u l e in .<br />

viennent les trois <strong>de</strong>rniers supérieurs <strong>de</strong> Cluny ;<br />

puis les parlem entaires <strong>de</strong> Paris et <strong>de</strong> Toulouse<br />

(1er floréal), les victimes <strong>de</strong> Verdun (S floréal),<br />

trente-trois personnes <strong>de</strong> toutes conditions (9 floréal),<br />

la famille <strong>de</strong> Pommeuse (10 floréal), les<br />

fermiers généraux et, avec eux, le grand chimiste<br />

Lavoisier (19 floréal), et, peu <strong>de</strong> jours<br />

après à la fête <strong>de</strong> l’Être suprême, Madame Elisabeth,<br />

etc , etc. — Le quatrièm e volume pour<br />

suit le récit <strong>de</strong>s opérations du tribunal révolutionnaire,<br />

du 1er prairial au 21 m essidor<br />

(20 mai-9 juillet 1794). La prem ière affaire que<br />

nous expose M. Wallon est relative à l'attentat<br />

d’Admiral et <strong>de</strong> Cécile Renault contre Robespierre<br />

et Collot d’H erbois; cet attentat sert <strong>de</strong><br />

prétexte à un décret qui amène l’entier développement<br />

du régim e <strong>de</strong> terreu r ; il faut débarrasser<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>rnières entraves le tribunal révolutionnaire<br />

qui ne peut encore, malgré tant <strong>de</strong><br />

facilités, suffire à la masse <strong>de</strong>s affaires; il faut<br />

lui donner une puissance d’exterm ination illimitée.<br />

Les condamnations individuelles <strong>de</strong>viennent<br />

rares; on recourt aux fournées; bientôt<br />

est promulguée cette loi du 22 prairial qui<br />

marque une ère nouvelle dans le règne <strong>de</strong> la<br />

T erreur et dans l’histoire affreuse du Tribunal<br />

révolutionnaire, ou, comme on l’appelle dès<br />

lors, du Tribunal <strong>de</strong> sang. Le Comité <strong>de</strong> salut<br />

public est arm é <strong>de</strong> tous ses engins <strong>de</strong> m ort (bureau<br />

<strong>de</strong> police générale à P aris; commissaires<br />

et police volante dans les départem ents ; commission<br />

préparatoire au Muséum; tribunal incessamment<br />

à l’œuvre par quatre sections dont<br />

<strong>de</strong>ux préparent les mises en accusation et <strong>de</strong>ux<br />

procè<strong>de</strong>nt sim ultaném ent au ju g em en t, avec<br />

pouvoir <strong>de</strong> juger en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toutes les formes<br />

<strong>de</strong> la justice; liste <strong>de</strong>s juges renouvelée; liste<br />

<strong>de</strong>s jurés revue). M. W allon nous fait le portrait<br />

<strong>de</strong> ces jurés et <strong>de</strong> l’accusateur public, Fouquier-<br />

Tinville ; il nous initie à leurs procédés ; il nous<br />

introduit dans la salle <strong>de</strong>s débats, nous lit les<br />

procès-verbaux d’audience et les instrum ents<br />

<strong>de</strong>s jugem ents, nous fait entendre les déclarations<br />

du jury. Il arriva que les jugem ents furent<br />

rendus en blanc; avant même qu’ils com parussent<br />

<strong>de</strong>vant le tribunal, le sort <strong>de</strong>s accusés était fixé;<br />

avant même qu’ils fussent menés <strong>de</strong>vant les<br />

juges, les charrettes qui <strong>de</strong>vaient les conduire<br />

à l’échafaud étaient dans la cour: les juges<br />

signaient à l’avance! Vainement une victoire,<br />

celle <strong>de</strong> Fleurus, était en ce mom ent-là gagnée<br />

en pays ennemi, sous les yeux <strong>de</strong> Saint-Just;<br />

cette victoire n ’eut d’autre suite qu’un redoublement<br />

dans les exécutions. Dans la séance du<br />

13 messidor, Robespierre, qui voulait m ontrer<br />

qu’il ne désavouait nullem ent son œuvre et restait<br />

l’âme <strong>de</strong> la Terreur, fit l’apologie du tribunal<br />

révolutionnaire. Déjà, le 9 m essidor, on<br />

avait vu <strong>de</strong>s femmes figurer à l’audience, sans<br />

être interrogées, sans même être accusées, sans<br />

avoir été questionnées dans l’instruction <strong>de</strong> l’affaire,<br />

et pourtant condamnées et exécutées. Le<br />

19 messidor, 60, le 21, 30, le 22, 46 personnes<br />

sont, par un jugem ent en blanc, envoyées à la<br />

guillotine. Mais le récit <strong>de</strong> tous ces faits, m inutieusem<br />

ent rassemblés par M. Wallon, est vraiment<br />

trop horrible pour qu’on y insiste plus<br />

longtemps ; relevons seulement quelques-uns<br />

<strong>de</strong>s crimes dont les jurés accusaient ceux qui<br />

paraissaient <strong>de</strong>vant leur tribunal ; ta n tô t une<br />

prétendue conspiration <strong>de</strong> prison ; ta n tô t <strong>de</strong>s<br />

propos tenus dans l’ivresse ; tan tô t un mouvem<br />

ent <strong>de</strong> sensibilité, compréhensible et légitim e,<br />

qui portait, par exemple, une femme à maudire<br />

les m eurtriers <strong>de</strong> son père ou <strong>de</strong> son époux, etc.<br />

— Le cinquième volume <strong>de</strong> l'Histoire du tribunal<br />

révolutionnaire <strong>de</strong> Paris s’ouvre par une nouvelle<br />

déclaration <strong>de</strong> Robespierre, affirmant aux<br />

Jacobins qu’il s’associe <strong>de</strong> tout cœ ur à l’œuvre<br />

du tribunal, et qu’après cela rien ne serait fini<br />

encore ! Les exécutions se poursuivent, et, à<br />

voir la marche du tribunal et ses procédés expé­

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