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BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal

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et de Jocaste s’étaient mis d’accord pour régner sur Thèbes<br />

à tour de rôle, accord qu’Étéocle a violé). L’armée<br />

argienne se divise en sept groupes, dont le dernier est<br />

mené par Polynice. Pressentant l’affrontement fraternel<br />

comme inéluctable, le chœur se lamente et fait appel aux<br />

dieux. Il rappelle l’imprécation d’Œdipe : Étéocle sait<br />

qu’il va mourir de la main de son propre frère et qu’il va<br />

le tuer s’il le combat.<br />

Contexte esthétique et culturel<br />

Un poète citoyen<br />

Nous disposons de peu d’éléments d’information sur<br />

la vie d’Eschyle. On sait qu’il fut un dramaturge ayant<br />

pour ambition de mettre son théâtre au service de la cité.<br />

Il mena donc la vie d’un poète didaskalos, « instructeur<br />

des citoyens », au moment où s’épanouissait le régime<br />

démocratique athénien (V e siècle avant Jésus-Christ). On<br />

n’a conservé qu’un nombre très limité des textes d’Eschyle<br />

: sept drames en tout, depuis les Perses, créée en<br />

472 jusqu’à l’Orestie, en 458. On sait aussi qu’Eschyle<br />

remporta à 13 reprises le concours des Grandes Dionysies,<br />

cadre dans lequel ses tragédies étaient représentées. Ces<br />

fêtes des Grandes Dionysies avaient lieu au printemps et<br />

duraient plusieurs jours : les spectateurs, athéniens et étrangers<br />

venus de toute la Grèce, pouvaient y assister à des<br />

processions solennelles, des sacrifices, et des concours de<br />

dithyrambe, de tragédies et de comédies qui occupaient à<br />

eux seuls cinq jours entiers.<br />

La tragédie grecque<br />

Origines de la tragédie<br />

Athènes fut sans doute le berceau de la tragédie. Ses<br />

origines sont obscures et discutées dès l’Antiquité, par<br />

Aristote notamment dans sa Poétique. Selon une théorie,<br />

la tragédie aurait pour origine le dithyrambe : un hymne<br />

que des chœurs interprétaient, en chantant et en dansant,<br />

en l’honneur du dieu Dionysos. D’autres considèrent le<br />

genre comme une évolution du drame satyrique, inventé<br />

lui aussi pour honorer Dionysos dont les satyres étaient<br />

traditionnellement les compagnons. Quoi qu’il en soit, on<br />

peut tenir pour certaine une origine religieuse, un rituel<br />

en l’honneur de Dionysos, dieu du vin, de l’ivresse, du<br />

masque. Les pionniers de l’art tragique mirent au point<br />

des masques et des costumes, permettant au chœur et au<br />

récitant de ne plus chanter en leur nom, mais sous une<br />

identité d’emprunt ; le dialogue entre le chœur et le récitant,<br />

devenu un acteur jouant l’histoire d’un personnage<br />

mythique, fut réglé par une alternance entre parties parlées<br />

et parties chantées (ou lyriques), écrites en vers, mais<br />

utilisant des mètres différents. Les parties parlées étaient<br />

le prologue, l’épisode (équivalant grossièrement à notre<br />

« acte » moderne) et l’exodos (le dénouement et la sortie<br />

des acteurs) ; les parties lyriques chantées par le chœur la<br />

parodos (chant d’entrée en scène) et le stasimon (chant<br />

sur place, entre les épisodes).<br />

Si l’on s’interroge donc encore sur les origines du mot<br />

« tragédie », en revanche, on s’accorde pour situer sa naissance<br />

en Grèce. C’est vers le milieu du VI e siècle av. J.-C.,<br />

que le tyran Pisistrate instaure des concours tragiques à<br />

Athènes, au cours desquels les dramaturges rivalisent.<br />

Parmi eux, on retiendra les noms d’Eschyle, Sophocle et<br />

Euripide. Racine leur empruntera des sujets pour plusieurs<br />

de ses tragédies (La Thébaïde, Andromaque, Iphigénie,<br />

Phèdre). Dans La Poétique, Aristote définit la tragédie<br />

comme « l’imitation d’une action noble, conduite jusqu’à<br />

sa fin et ayant une certaine étendue […] C’est une imitation<br />

faite par des personnages en action et non par le moyen<br />

d’une narration, et qui, par l’entremise de la pitié et de la<br />

crainte, accomplit la purgation des passions 1 ». Il pose donc<br />

les principes fondateurs de la tragédie, aussi bien pour ce<br />

qui est de la forme que de son but. Beaucoup de théoriciens<br />

classiques font référence à Aristote mais ne le connaissent<br />

qu’à travers des commentateurs ; Racine, au contraire, lit<br />

Aristote dans le texte et en traduit même quelques chapitres.<br />

La plupart de ses préfaces font d’ailleurs référence aux<br />

préceptes du théoricien grec.<br />

Des manifestations civiques et politiques<br />

À la finalité religieuse, se superposaient donc des<br />

enjeux civiques et politiques : « Aller au théâtre est, pour<br />

un Grec, une façon de prendre part aux manifestations officielles<br />

de la religion civique et nullement, comme dans les<br />

sociétés occidentales modernes, de s’adonner à un loisir<br />

profane réservé à une élite. Ce cadre religieux, qui garantit<br />

aux poètes dramatiques une large audience, fait par là<br />

même du théâtre l’un des lieux privilégiés de l’éducation<br />

du citoyen » (Ch. Mauduit, Culture Guides Grèce, PUF<br />

Clio 2010, p. 283). Dans son contenu, la tragédie semble<br />

s’être tenue éloignée des realia et des occupations de<br />

son temps : elle met en scène d’illustres héros mythiques,<br />

membres de grandes familles anciennes, en un temps où<br />

les dieux pouvaient prendre forme humaine et se mêler aux<br />

hommes, pour leur perte ou leur bonheur. Mais sous cette<br />

forme située par convention dans la sphère mythique, les<br />

règles, les pratiques, les institutions de la cité démocratique<br />

sont transfigurées et questionnées.<br />

Caractérisation du passage<br />

Le passage est une lamentation du chœur, qui rappelle la<br />

malédiction qui pèse sur les Labdacides, depuis que Laïos<br />

a désobéi à Apollon. Il a donc deux fonctions essentielles :<br />

une fonction narrative – celle de rappeler l’anankè (destin,<br />

malédiction) tragique qui pèse sur la famille d’Œdipe et<br />

d’annoncer le malheur à venir, une fonction cathartique –<br />

celle de susciter la terreur et la pitié.<br />

Plan de lecture analytique<br />

Le récit de la malédiction des Labdacides.<br />

On s’appuiera sur la forte valeur informative du passage<br />

associée à une dimension oratoire qui donne une allure<br />

solennelle et incantatoire au résumé de toute l’histoire<br />

des Labdacides. On rappellera que le public contemporain<br />

d’Eschyle écoute pour le plaisir une histoire déjà connue de<br />

tous dans un but cathartique : le drame revécu collectivement<br />

permettant à la collectivité de se resserrer.<br />

1 Aristote, La Poétique, Paris, Le Livre de poche, coll. « Classique »,<br />

1990.<br />

116 • Chapitre 6 - Du modèle aux réécritures, du xvii e siècle à nos jours

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