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BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal

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leçon religieuse sur la fuite du temps et plus précisément<br />

sur la vanité des occupations huma http://karine.lanini.free.<br />

fr/Jardinvanitesfichiers/image015.jpg ines.<br />

II. « Vanité des vanités, tout est vanité » (Écclésiaste,<br />

I, 2)<br />

La peinture évoque la vanité, le caractère éphémère de<br />

l’existence humaine. La mort de l’homme est ici présentée<br />

sous la forme d’un crâne. L’impression de déséquilibre<br />

dans lequel se trouvent placés le crâne, la viole, le livre de<br />

musique et l’archet vient renforcer l’idée de précarité de<br />

la condition de l’homme. Cette nature morte a pour thème<br />

essentiel la vanité d’une existence qui s’attache aux biens<br />

et aux plaisirs de ce monde, alors que le temps la détruit<br />

inexorablement.<br />

A. Condamnation des voluptés terrestres<br />

Nous sommes en présence d’une nature morte, ie d’une<br />

peinture qui renvoie à un langage codé. Instruments et objets<br />

symbolisent l’existence de l’homme et ses occupations sur<br />

terre. La présence du crâne, symbole de la mort, rappelle<br />

que ses activités sont futiles face à la mort. La viole et l’archet<br />

sont silencieux et immobiles, c’est l’arrêt des plaisirs<br />

de l’ouïe ; c’est la fin de la création. Le tableau peut être lu<br />

comme une dénonciation des activités terrestres : l’homme<br />

ne s’occupe qu’à des futilités. Il cède au désir voluptueux,<br />

aux plaisirs des sens (libido sentiendi) incarné par les instruments<br />

de musique, il cède au désir de savoir, à la curiosité<br />

(libido sciendi), incarné par les coquillages, il cède à<br />

l’orgueil, au désir de bien paraître sur la scène du monde<br />

(libido dominandi), incarné par les parures mondaines qui<br />

visent à faire triompher le paraître.<br />

Ces activités ne sont que des divertissements pour nous<br />

empêcher de penser à notre « mortelle condition ». Tous ces<br />

désirs ne sont rien face à la mort et au temps, ils seront anéantis<br />

par l’arrêt brutal de la vie. Le tableau marque d’ailleurs<br />

cette rupture, cette cassure du mouvement et de la vie.<br />

B. Le temps suspendu<br />

Cette nature morte présente des objets, des éléments<br />

dont on ignore le passé et qui n’ont pas d’avenir. Ils semblent<br />

suspendus dans le temps, figés pour l’éternité. La<br />

chandelle est éteinte : le temps s’est arrêté dans la mort. Le<br />

tableau ne montre aucune intrusion du monde extérieur, les<br />

objets sont ainsi coupés de tout contexte. On notera également<br />

que la toile ne présente aucune impression de profondeur<br />

: pas de premier ni d’arrière plan : les objets sont<br />

envisagés hors du cadre temporel et hors du cadre spatial.<br />

Ils ont été comme pétrifiés par la mort.<br />

Insistance à travers le sablier, la chandelle et le crâne<br />

sur le caractère éphémère et fini de l’existence humaine.<br />

C’est un tableau très noir, très pessimiste qui rappelle à<br />

l’homme son essence dérisoire et mortelle. Cependant,<br />

veiller à replacer ce tableau dans son contexte, le XVII e<br />

siècle, où la religion a un poids écrasant. La mort est toujours<br />

pensée, dans une perspective chrétienne, en regard de<br />

la résurrection et de l’éternité.<br />

C. L’espoir de la résurrection<br />

Le tableau comporte des symboles religieux. Ce sont<br />

les feuilles de laurier et les coquillages que l’on aperçoit<br />

dans la partie gauche du tableau. Ils sont symboles de la<br />

résurrection et laissent espérer un avenir plus radieux dans<br />

l’autre monde. Cette dimension transcendante redonne<br />

espoir à l’homme. Ces éléments sont mis en valeur car<br />

placés dans la zone lumineuse du tableau. C’est donc une<br />

œuvre religieuse qui peut être lu comme une apologie de<br />

la foi chrétienne, avec un message implicite : « croyez et<br />

espérez ! ». Dans cette perspective chrétienne, la mort n’est<br />

qu’une étape vers l’autre monde. L’espoir est symbolisé<br />

par la couleur verte de la nappe de velours qui recouvre la<br />

table et la pureté de la vie dans l’autre monde est symbolisée<br />

par la couleur blanche du nœud de rideau. Les feuilles<br />

de laurier se trouvent au beau milieu des riches parures que<br />

nous avons identifiées. La leçon chrétienne est la suivante :<br />

quittez le monde pour vivre dans la prière. On gagne son<br />

paradis en menant une vie terrestre dans la retraite et à<br />

l’écart des plaisirs du monde.<br />

On remarquera, pour finir, que le trajet du regard auquel<br />

invite le tableau constitue le récit archétypal de l’existence<br />

humaine. On a vu que le tableau se lisait en diagonale :<br />

d’abord , les plaisirs du monde marquent le temps de la<br />

jeunesse et de l’insouciance ; puis le regard se déplace vers<br />

les symboles du temps et de sa fuite : temps de la vieillesse<br />

où l’homme médite sur la mort. Dans un dernier temps, le<br />

regard bute sur le crâne : choc brutal qui signifie la violence<br />

du passage d’un monde à l’autre puis glisse in fine<br />

vers les coquillages qui symbolisent le monde céleste et la<br />

vie éternelle.<br />

L’impression de pessimisme qui se dégage du tableau<br />

doit être nuancée. Le crâne qui trône en majesté dans l’espace<br />

pictural n’est que le symbole d’une étape douloureuse<br />

qui vise à être dépassée. Après l’épreuve de la mort, le crâne<br />

peut revivre dans la béatitude de la vie éternelle ; l’homme,<br />

auprès de son Créateur, se régénère.<br />

PARCOURS COMPLÉMENTAIRE<br />

Grandeur et misère de l’homme,<br />

la condition humaine au XVII e siècle »<br />

❐❐<br />

La Rochefoucauld, maxime 215, Maximes, 1665.<br />

❐❐<br />

Molière, Le Misanthrope, V, 4, 1666.<br />

❐❐<br />

La Fontaine, « L’Homme et son image », Fables, I, XI,<br />

1668.<br />

❐❐<br />

Bossuet, Oraison funèbre d’Henriette d’Angleterre,<br />

1670.<br />

❐❐<br />

Pascal, Le divertissement, fr. 139, 1670.<br />

Ce parcours complémentaire aurait pour objectif de travailler<br />

sur la conception de l’homme dans la seconde moitié<br />

XVII e siècle. Caractérisée par un pessimisme anthropologique,<br />

hérité d’Augustin, cette époque peint un homme rongé<br />

par ses passions, mais néanmoins, pour certains, capable de<br />

grandeur. Le parcours permettrait également de travailler<br />

sur différents genres argumentatifs (l’apologue, la maxime,<br />

le discours, le dialogue argumentatif et l’essai).<br />

86 • Chapitre 4 - La question de l’homme dans les genres de l’argumentation du xvi e siècle à nos jours

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