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BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal

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sons de l’infinie misère de l’homme face au silence du<br />

monde et à celui de Dieu.<br />

• Texte 2 : Alors que le texte semble adopte la forme convenue<br />

du récit épique avec le déplacement du point de vue<br />

d’un combattant à l’autre, en feignant de restituer les<br />

feintes et la surprise du combat, avec quelques échappées<br />

du côté du langage noble (le cœur, la souffrance),<br />

le lexique présente le combat à mains nues, qu’aucun<br />

code ne régit, comme une vilaine mêlée entre pantins<br />

désarticulées. La violence est décuplée par le fait qu’on<br />

assiste davantage à l’auto-mutilation d’un être fusionnel<br />

qu’à un véritable duel.<br />

• Texte 3 : Comme le précisent les éléments pour une lecture<br />

analytique, « je » désigne le sujet, sans doute le<br />

poète, qui s’attaque collectivement à tout ce qui constitue<br />

la civilisation. Il vient « braire au nez » des œuvres<br />

artistiques et de ceux qui les ont conçues et célébrées,<br />

retournant en anathème l’éloge convenu des civilisations<br />

et appelant le « néant » sur tous les vivants. Le « nous »<br />

qui apparaît après l’appel aux « frères damnés » (v. 23)<br />

reste très ambigu : renvoie-t-il à l’humanité tout entière<br />

ou au peuple des exclus ? Il sera intéressant de montrer<br />

aux élèves qu’aucune réponse définitive n’est possible.<br />

Mais derrière cette accumulation de refus c’est l’aspiration<br />

à une communion humaine débarrassée des mensonges,<br />

des idées reçues et du pouvoir des apparences<br />

qui s’exprime.<br />

• Texte 4 : Dans le prolongement du texte précédent, le<br />

« nous » prophétique qui exprimait la certitude de la<br />

lucidité future, devient « nous autres » pour constater<br />

que la lucidité de ce sujet collectif assume le caractère<br />

bancal de son existence, son consentement au vide et<br />

à l’inachèvement. Celui-ci est symbolisé par les vers<br />

20-25 qui indiquent que le voyage est terminé. Le poète<br />

revient au passé composé pour dire la dureté de l’épreuve<br />

avant que le « nous » ne redevienne prophétique pour<br />

interdire à ce sujet lucide l’entrée dans la Ville (un avatar<br />

du royaume) On notera l’effet circulaire qui enferme<br />

le poème dans la double négation du « triomphe » (v.<br />

5-6/30 avec un parallélisme entre le rythme binaire initial<br />

« Le triomphe, le parachèvement/ Non, non ça n’est<br />

pas pour nous. » et le rythme ternaire final, « entrer,<br />

chanter, triompher », plus oratoire, plus solennel, qui<br />

semble situer la parole dans le registre du sacré.<br />

• Texte 5 : Le texte est saturé par un réseau de métaphores<br />

qui identifient les « icebergs » à un monument sacré,<br />

une « cathédrale sans dieu » (voir supra pour les exemples).<br />

Face à cette liturgie du beau, d’autres images et<br />

métaphores situent la relation entre le poète et ce décor<br />

sacré dans un registre intime développé par l’image de<br />

la familiarité, de l’intimité. Les icebergs apparaissent<br />

alors, au terme de notre parcours, comme l’allégorie de<br />

la poésie : apparemment inaccessibles, porteurs de mort,<br />

condamnés à une beauté stérile, les icebergs recouvrent<br />

à la fois le silence glacé contre lequel s’échoue le poète<br />

et le langage de la douce lumière auquel aboutissent, à<br />

l’issue d’une ascèse humiliante et éprouvante, son écriture<br />

et sa quête de sens.<br />

Vers la problématique<br />

Dans un lyrisme nouveau qui se joue des codes du langage<br />

poétique, le poète détourne l’utilisation traditionnelle<br />

des formes poétiques et des systèmes énonciatifs pour dire<br />

le chaos du monde et la misère de l’homme, en associant<br />

dans la rage, la douleur et la nostalgie du « royaume », les<br />

images d’un monde géométrique et ordonné qu’il refuse, la<br />

déroute corporelle du corps humain, tandis que les figures<br />

les plus vivantes de La nuit remue sont les animaux et les<br />

humains réduits à l’état de pantins.<br />

3. Synthèse<br />

Pour que la synthèse prenne tout son sens, on pourra<br />

demander aux élèves de s’interroger, à la fin de leur<br />

séquence de travail sur le sens du titre La nuit remue, sur la<br />

représentation respective des deux espaces, du « dedans »<br />

et du « dehors » dans l’œuvre de Michaux et notamment le<br />

recueil dans lequel il a formalisé cette antithèse.<br />

Enfin, il faudra montrer comment la poésie contemporaine<br />

exploite le détournement et le dérèglement des formes<br />

héritées pour amplifier, démultiplier la voie du poète et<br />

la quête du sens : on pourra comparer la variété des inventions<br />

chez Michaux à celles d’autres poètes, par exemple le<br />

traitement de l’aphorisme par René Char.<br />

Chapitre 3 - Écriture poétique et quête du sens • 73

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