25.10.2014 Views

BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal

BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal

BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Texte 2 (manuel de l’élève p. 154)<br />

Pierre de Ronsard, « Je vous envoie un bouquet »,<br />

Continuation des Amours, 1555<br />

Le passage dans l’économie générale de l’œuvre<br />

Ce sonnet est le trente-cinquième de la Continuation<br />

des Amours. Il est repris en 1572 dans le Second livre des<br />

Amours, mais supprimé en 1578 quand apparaît « Quand<br />

vous serez bien vieille ».<br />

Contexte esthétique et culturel<br />

La naissance du sonnet<br />

Le sonnet (de l’italien sonnetto, « petit son »), vraisemblablement<br />

né en Sicile au XIII e siècle, est la forme que<br />

choisit Pétrarque au XIV e siècle pour chanter ses amours<br />

avec Laure. Ce poète devient à la mode en France quand<br />

le poète Maurice Scève croit découvrir le tombeau de la<br />

jeune femme en 1533. Quelques années plus tard, Marot<br />

commence à écrire des sonnets en français. En 1548, les<br />

sonnets de Pétrarque sont traduits et, grâce à l’imprimerie,<br />

largement diffusés. L’année suivante, Du Bellay publie<br />

L’Olive, premier recueil entièrement composé de sonnets.<br />

Le sonnet est une forme fixe, sujette à variations. Elle<br />

est composée de quatorze vers (deux quatrains – rimes<br />

croisées ou embrassées – et un sizain). C’est Marot introduit<br />

le schéma de rimes le plus courant en France pour le<br />

sizain : ccdeed. Peletier du Mans propose un autre schéma<br />

promis à un brillant avenir : ccdede. Ronsard et ses Amours<br />

contribuent à imposer ces deux schémas comme la norme.<br />

À sa création, le sonnet est souvent composé de décasyllabes<br />

– alors que l’alexandrin prévaudra ensuite. De plus,<br />

l’alternance de rimes masculines et de rimes féminines ne<br />

s’impose que progressivement, à mesure que les rimes se<br />

font plus discrètes.<br />

La Pléiade<br />

La Pléiade – auparavant nommée « La Brigade » – réunit<br />

sept poètes, parmi lesquels Ronsard et Du Bellay. Elle a<br />

une haute idée de la France et de la langue française d’une<br />

part, du poète d’autre part. L’esthétique de la Pléiade repose<br />

sur un équilibre entre imitation des anciens et innovation<br />

langagière (cf. Défense et illustration de la langue française,<br />

art poétique de Du Bellay). Ces poètes – ou plutôt<br />

ces Poëtes, avec une majuscule et un tréma pour faire plus<br />

grec – rejettent les formes poétiques médiévales comme la<br />

ballade et leur préfèrent des formes empruntées au grec, au<br />

latin ou à l’italien, l’ode, l’hymne ou encore le sonnet. Ils<br />

revendiquent un meilleur statut et appuient leur demande<br />

de reconnaissance sur un mythe platonicien. Pour eux, la<br />

poésie ne doit pas être considérée comme un savoir-faire<br />

mais comme un don divin.<br />

« Il y a une troisième espèce de possession et de délire,<br />

celui qui vient des Muses. Quand il s’empare d’une âme<br />

tendre et pure, il l’éveille, la transporte, lui inspire des<br />

odes et des poèmes de toute sorte et, célébrant d’innombrables<br />

hauts faits des anciens, fait l’éducation de leurs<br />

descendants. Mais quiconque approche des portes de<br />

la poésie sans que les Muses lui aient soufflé le délire,<br />

persuadé que l’art suffit pour faire de lui un bon poète,<br />

celui-là reste loin de la perfection, et la poésie du bon<br />

sens est éclipsée par la poésie de l’inspiration. »<br />

Platon, Phèdre, 245b<br />

Des Amours à la Continuation des Amours<br />

Ronsard publie Les Amours en 1552. Dédiés à une<br />

femme, Cassandre, ils sont très influencés par Pétrarque,<br />

aussi bien dans les thèmes (soumission de l’amant à une<br />

femme belle et cruelle, primauté des sentiments sur le<br />

désir charnel…) que dans la forme (sonnet, jeux lexicaux<br />

et syntaxiques, métaphores récurrentes comme celles de<br />

la chasse…). La Continuation des Amours paraît en 1555.<br />

Si Cassandre n’est pas oubliée, elle est rejointe par Marie<br />

Dupin, jeune paysanne de Bourgueil, et plusieurs autres<br />

jeunes filles, parmi lesquelles ses sœurs. Ronsard remet<br />

donc en cause l’un des fondements du pétrarquisme : la<br />

fidélité de l’amant malgré la cruauté de la femme aimée. Il<br />

développe d’ailleurs toute une réflexion sur l’inconstance<br />

dans cette nouvelle série de poèmes. Marie n’est pas du<br />

même rang social que Cassandre, ce qui invite Ronsard à<br />

changer de style pour la chanter : il la peint dans un cadre<br />

plus intime, plus familier, choisit un lexique moins recherché<br />

et des tours de phrase plus simples.<br />

Caractérisation du passage<br />

« Je vous envoie un bouquet » est un sonnet composé<br />

de décasyllabes. Il présente un schéma de rimes originales<br />

dans le sizain qui en fait un sonnet irrégulier (cdcdee). Il<br />

développe le thème du Carpe diem, largement développé<br />

dès l’Antiquité, par Horace (l’expression se trouve dans une<br />

de ses Odes, I, 11, 8) ou Virgile notamment. Elle exprime<br />

une philosophie que l’on pourrait qualifier d’épicurienne.<br />

Ronsard développe cette idée à plusieurs reprises, comme<br />

dans « Mignonne, allons voir si la rose » (Ode, I, 17).<br />

Mignonne, allons voir si la rose<br />

Qui ce matin avoit desclose<br />

Sa robe de pourpre au Soleil,<br />

A point perdu ceste vesprée<br />

Les plis de sa robe pourprée,<br />

Et son teint au vostre pareil.<br />

Las ! voyez comme en peu d’espace,<br />

Mignonne, elle a dessus la place<br />

Las ! las ses beautez laissé cheoir !<br />

Ô vrayment marastre Nature,<br />

Puis qu’une telle fleur ne dure<br />

Que du matin jusques au soir !<br />

Donc, si vous me croyez, mignonne,<br />

Tandis que vostre âge fleuronne<br />

En sa plus verte nouveauté,<br />

Cueillez, cueillez vostre jeunesse :<br />

Comme à ceste fleur la vieillesse<br />

Fera ternir vostre beauté<br />

Chapitre 3 - Écriture poétique et quête du sens • 57

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!