BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal
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L’amour est donc une illusion dans le milieu bourgeois.<br />
B. L’amour est-il encore possible ?<br />
a. L’amour le plus pur.<br />
Cohen va ensuite plus loin en faisant peser un doute sur<br />
l’amour dans sa version la plus pure, l’amour pour un bébé<br />
innocent (champ lexical de l’amour : « j’aime », « ô mon<br />
chéri », « baiser », « je l’aime »).<br />
b. La métamorphose.<br />
En effet, il envisage la métamorphose de ce bébé en<br />
un homme haïssable (radicalité de la métamorphose : de<br />
« sourire édenté » à « adulte à canines » ou « haïsseur qui<br />
ne me sourira plus »). Même l’amour pour un bébé est sujet<br />
à caution car l’enfant pourrait devenir antisémite et haineux.<br />
L’amour – après la Deuxième Guerre mondiale ? –<br />
n’apparaît plus comme un sentiment viable.<br />
III. Ô frères en la mort<br />
A. Un dénominateur commun : la mort<br />
Le seul point commun entre l’auteur et ses « juives douleurs<br />
» et les haïsseurs, c’est la mort à venir (« enterre »,<br />
« mourrez », « agonie » : le champ lexical de la mort qualifie<br />
aussi bien l’auteur que les antisémites). Même si le message<br />
reste implicite, l’idée centrale du récit selon laquelle<br />
l’humanité est caractérisée par une condamnation à mort,<br />
est déjà présente.<br />
B. La compassion<br />
Registre pathétique, qui permet d’émouvoir le lecteur.<br />
Récurrence du « ô » lyrique qui prend en charge la déploration<br />
(« Ô rictus faussement souriant de mes juives douleurs.<br />
Ô tristesse de cet homme dans la glace que je regarde »),<br />
champ lexical du malheur (« consolation », « saigne »,<br />
« douleur », « tristesse »,…), première personne qui invite<br />
à l’identification du lecteur au personnage.<br />
L’auteur remplace l’amour par la compassion, seul sentiment<br />
possible entre les hommes.<br />
Texte 5. Manuel de l’élève p. 233.<br />
Une enfance bafouée<br />
La lecture analytique ne porte que sur le chap. XXVII.<br />
I. Un récit paradoxal<br />
A. Un regard critique à l’égard des réactions de l’enfant<br />
a. Distance entre l’auteur et le personnage.<br />
Albert Cohen écrivain se démarque de l’enfant qu’il a<br />
été (« Albert de dix ans »).<br />
b. Moquerie.<br />
Il se moque des réactions qu’il a eues le jour de ses dix<br />
ans (modalisateurs : « ridiculement », « folie », « enfantines<br />
bêtises » ; commentaires explicites : « ce qui était<br />
peu convaincant et n’arrangeait rien » ; rythme ternaire<br />
qui mime les formules magiques employées : « ferait que<br />
le malheur ne serait pas arrivé, ferait que le camelot ne<br />
m’aurait pas chassé et que je serais maintenant content à la<br />
maison »), va même jusqu’à employer un ton amer (« Pauvre<br />
petit imbécile » : phrase nominale, sans appel).<br />
B. La conviction que l’écriture ne peut accomplir sa<br />
mission<br />
a. D’« enfantines bêtises ».<br />
Le projet de devenir écrivain (champ lexical de la<br />
parole : « dirais », employé deux fois, « raconterais ») pour<br />
se venger est condamné au même titre que les autres réactions<br />
enfantines : appel à l’amour (« aimez-vous les uns les<br />
autres ») ou paroles et gestes magiques (« un mot puissant,<br />
Salomonus ou Glix », « gestes magiques »).<br />
b. Une certitude.<br />
L’auteur exprime explicitement sa certitude que l’écriture<br />
ne peut accomplir la vengeance rêvée lorsqu’il était<br />
enfant (champ lexical de la certitude : « je sais », « Je les<br />
connais » ; futur de certitude : « pleureront », « trouveront<br />
»).<br />
Pourtant, alors même qu’il se moque parfois amèrement<br />
de ses réactions d’enfant, alors même qu’il affirme que<br />
l’écriture ne pourra pas le venger, Albert Cohen entreprend<br />
d’écrire.<br />
II. L’efficacité de l’écriture<br />
A. Préserver le souvenir<br />
L’écriture permet tout d’abord d’entretenir une mémoire,<br />
de préserver le souvenir : pour lui et pour les autres. Registre<br />
réaliste :<br />
- discours direct : « Oh, je le sais, Papa et Maman sont<br />
gentils […] ». Fait entendre la voix de l’enfant. Vocabulaire<br />
enfantin, tournures de phrases maladroites (répétitions).<br />
- précision des sensations : « ciment froid », « ciment<br />
sale »,…<br />
B. Émouvoir le lecteur<br />
L’écriture permet également d’émouvoir le lecteur. Si le<br />
lecteur ne va pas « pleur[er] de remords », il peut pleurer de<br />
compassion. Registre pathétique :<br />
- insistance sur la jeunesse de l’enfant (« dix ans »<br />
répété plusieurs fois)<br />
- motif des larmes (« sanglotais-je », « me mouchant à<br />
tire-larigot »)<br />
- jeux de contraste : « ce cabinet de gare » vs la « maison<br />
», solitude vs « mon trésor de Maman », jeunesse vs<br />
sentiment d’être « las et vieux ».<br />
C. Prendre de la hauteur<br />
Enfin, si l’enfant avait l’espoir de s’exprimer « du haut<br />
d’une montagne », l’écrivain prend de la hauteur.<br />
a. Mise en perspective.<br />
Il utilise son recul pour mettre en relation l’acte raciste<br />
dont il a été victime à dix ans avec l’holocauste (« mon<br />
petit camp de concentration », « Un youpin par terre »).<br />
b. Refus de nommer l’ennemi.<br />
Les coupables ne sont pas nommés. Ils ne sont désignés<br />
que par le pronom « ils ». Leur voix même est intégrée au<br />
discours du narrateur (« Aucune importance. Ça ne souffre<br />
pas, les youpins ») : pas de stigmatisation, de mise à distance.<br />
90 • Chapitre 4 - La question de l’homme dans les genres de l’argumentation du xvi e siècle à nos jours