BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal
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Des Parnassiens, Baudelaire se rapproche par le culte de<br />
la forme, visible dans son admiration pour Théophile Gautier,<br />
« poète impeccable », à qui sont dédiées ses « fleurs<br />
maladives ». En outre, plusieurs poèmes des Fleurs du mal<br />
paraissent dans le Parnasse contemporain, organe officiel<br />
du mouvement.<br />
Des Symbolistes, on le rapproche essentiellement du<br />
fait des « Correspondances », poème dans lequel Baudelaire<br />
décrit la « ténébreuse et profonde unité » d’un monde<br />
au sein duquel « les parfums, les couleurs et les sons se<br />
répondent. ». Le poète se doit d’établir une traduction possible<br />
du langage secret de la nature.<br />
Les Décadents de la fin du siècle se réclameront aussi<br />
de lui, de son goût du morbide et de l’artificiel. Par exemple,<br />
J-K Huysmans lui rend un hommage appuyé dans<br />
son roman A Rebours (1884), dont le héros des Esseintes<br />
admire les « chants clamés pendant les nuits de sabbat » du<br />
poète des Fleurs du Mal.<br />
Des relations complexes avec le réalisme<br />
Les relations de Baudelaire avec le réalisme sont loin<br />
d’être faciles à trancher : à ses débuts, il est l’ami proche de<br />
Champfleury, apôtre du réalisme, avec qui il fonde en 1848<br />
un très éphémère journal dont le frontispice est l’œuvre de<br />
Courbet, peintre porte-drapeau du mouvement réaliste. Par<br />
ailleurs, le procès de 1857 des Fleurs du Mal mentionne<br />
l’accusation de réalisme, à une époque où le terme est quasi<br />
insultant et équivaut à l’immoralité en art et au culte des<br />
bas-fonds. Mais le poète va prendre peu à peu ses distances<br />
avec le mouvement, au fur et à mesure de l’affirmation de<br />
ses convictions en art, et notamment de la glorification de<br />
la « reine des facultés », l’imagination.<br />
Le poète de la modernité<br />
Le thème urbain<br />
C’est dans les écrits sur l’art et dans les poèmes que va<br />
se constituer la thématique urbaine et moderne qui constitue<br />
un des apports décisifs de Baudelaire à la poésie française.<br />
Le Salon de 1846 affirme l’existence d’un « héroïsme de la<br />
vie moderne », et tient « la vie parisienne [pour] féconde<br />
en sujets poétiques et merveilleux. » En 1861, Baudelaire<br />
ajoute la section des « Tableaux parisiens » aux Fleurs du<br />
Mal, et le monde urbain fait ainsi son entrée dans sa poésie.<br />
Cette errance est une exploration du présent, et une quête<br />
du choc, de la surprise, présente souvent à travers la rencontre<br />
d’ « êtres singuliers, décrépits et charmants. » La<br />
ville exerce un « enchantement » au sens fort du terme, et le<br />
thème urbain est l’exemple le plus marquant de transformation<br />
de la boue en or, de fleurs poussées sur un terreau horrible.<br />
Il faut attendre cependant Le Peintre de vie moderne<br />
et les réflexions sur Constantin Guys, pour que Baudelaire<br />
formalise sa pensée sur la modernité, définie comme « le<br />
transitoire, le fugitif, le contingent, la moitié de l’art, dont<br />
l’autre moitié est l’éternel et l’immuable. »<br />
« Tu m’as donné la boue et j’en ai fait de l’or » (projet<br />
d’épilogue de l’édition de 1861 des Fleurs du Mal).<br />
Pour Baudelaire, le travail poétique se définit comme<br />
une opération quasi alchimique, qui consiste à tirer des<br />
« fleurs » du mal, à transformer la boue en or. Sur une terre<br />
aride doit naître l’abondance, tout comme du métal on tente<br />
de faire de l’or. C’est une véritable transfiguration qui définit<br />
le travail poétique, et nous avons déjà signalé le rôle<br />
que les images doivent jouer dans cette opération, qui est<br />
un travail. En effet, Baudelaire congédie aussi avec cette<br />
conception l’idée de l’inspiration romantique qui visite le<br />
poète habité.<br />
Le dialogue entre les arts<br />
Des préoccupations du poète apparaissent communes à<br />
celles des peintres : la thématique de la ville va ainsi prendre<br />
une importance grandissante, avec l’aquafortiste Charles<br />
Méryon, graveur de vues de Paris célébré dans le Salon<br />
de 1859. Méryon choisit d’interrompre sa carrière d’officier<br />
de marine, afin de « peindre la noire majesté de la plus<br />
inquiétante des capitales ». Mais celui qui va s’imposer<br />
comme le « Peintre de la vie moderne », c’est Constantin<br />
Guys, essentiellement illustrateur pour les journaux, dont<br />
Baudelaire découvre l’œuvre qu’il consacre immédiatement<br />
comme une sorte d’illustration à ses propres recherches<br />
sur la modernité. Guys esquisse les figures contemporaines<br />
et croque la vie élégante du second empire, et sa<br />
peinture de mœurs s’inscrit résolument dans le présent,<br />
dont Baudelaire cherche à mettre en valeur l’héroïsme. Il<br />
s’agit de « rechercher quel peut être le côté épique de la<br />
vie moderne » et de compléter la « comédie humaine » du<br />
monde moderne.<br />
Caractérisation du passage<br />
Ce poème est d’inspiration romantique. La forme du<br />
pantoum a été introduite par Victor Hugo dans Les Orientales<br />
(pour les règles de cette forme fixe, voir le manuel de<br />
l’élève). De plus, deux thèmes caractéristiques de la poésie<br />
romantique apparaissent ici : le soleil couchant, dont la<br />
beauté est associée à la mélancolie, la religion qui donne<br />
au paysage une solennité particulière. Toutefois, les synesthésies,<br />
la discrétion du lyrisme,… inscrivent clairement ce<br />
poème dans la modernité baudelairienne.<br />
Proposition de lecture analytique<br />
I. « Harmonie du soir »<br />
Baudelaire peint dans ce poème un paysage sombre<br />
mais harmonieux.<br />
A. Un paysage sombre<br />
a. La dramatisation de la mort du soleil. Vers répété deux<br />
fois : « Le soleil s’est noyé dans son sang qui se fige » : allitération<br />
en [s] qui souligne le mot « sang » ; utilisation de<br />
l’accompli (« s’est noyé ») qui suggère le caractère irrémédiable<br />
de la mort ; participe passé « noyé » mis en valeur à<br />
l’hémistiche.<br />
b. Un système d’opposition. Le paysage est d’autant<br />
plus sombre que l’ombre ressort par contraste. Opposition<br />
entre le « passé lumineux » et le « néant vaste et noir » du<br />
présent.<br />
B. « Correspondances »<br />
Les sensations se mêlent et créent des synesthésies. Par<br />
exemple, dans le premier quatrain, quatre sens sont convoqués<br />
: le toucher et l’ouïe (« vibrant »), l’odorat et la vue<br />
(« encensoir »).<br />
Chapitre 3 - Écriture poétique et quête du sens • 59