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BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal

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Le texte 5 enfin, à l’apogée de la période coloniale<br />

française, nous en montre par une scène aussi tragique que<br />

truculente les excès, commis par ceux qui n’y voyaient<br />

qu’une occasion de faire du profit appuyée sur un franc<br />

mépris des indigènes. Il est évidemment surprenant de<br />

trouver cette dénonciation sous la plume de Céline, qui peu<br />

d’années après donnera les preuves d’un antisémitisme et<br />

d’un racisme frénétiques. Ce paradoxe peut être résolu si<br />

on fait l’hypothèse que, sans cesser d’être le même écrivain,<br />

il exprime des idées odieuses lorsqu’il raisonne sur<br />

des généralités et, fidèle à sa vocation de médecin peutêtre,<br />

se montre capable d’une grande compassion et d’une<br />

grande empathie lorsqu’il est face à des individus opprimés.<br />

L’effet comique est obtenu ici non au détriment du Noir<br />

maltraité, mais par la description des manières de faire des<br />

Européens et des indigènes qu’ils emploient (lesquels, pour<br />

se faire bien voir de leur patron, se montrent encore plus<br />

racistes que les Blancs). On ne peut plus parler ici de « bon<br />

sauvage » tant le Noir victime de la transaction est plus<br />

ébahi qu’autre chose ; on voit en revanche en grand péril<br />

l’espoir d’une humanité partagée telle qu’elle se construisait<br />

peu à peu aux siècles précédents. Pourtant la flagrante<br />

indignation de Céline (surtout lorsqu’on sait, précisément,<br />

ses errements ultérieurs) laisse subsister l’espoir que la littérature<br />

contribue, par des démonstrations de cet ordre, à<br />

permettre à chaque homme d’accéder à l’universel.<br />

LES TEXTES DU PARCOURS<br />

Texte 3. Manuel de l’élève p. 199.<br />

L’esclave ou l’autre arraché à son humanité<br />

Voltaire, Candide, chapitre XIX, 1759.<br />

Le passage dans l’économie générale de l’œuvre<br />

Candide (1759) est sans doute l’un des contes voltairiens<br />

les plus connus. Dans ce conte philosophique, le lecteur<br />

suit les pérégrinations d’un jeune héros naïf – Candide<br />

(l’adjectif signifiant également « blanc ») – nourri de la<br />

pensée optimiste. Au chap. XIX, Candide et Cacambo ont<br />

quitté le paradis de l’Eldorado, avec l’idée qu’ils vont désormais<br />

être heureux : « Nous sommes au bout de nos peines et<br />

au commencement de notre félicité. » Cet optimisme affiché<br />

va être immédiatement démenti par la rencontre avec<br />

un être malheureux, un esclave noir au Surinam (ancienne<br />

colonie hollandaise d’Amérique du Sud, située au nord du<br />

Brésil, encore appelée Guyane néerlandaise).<br />

Contexte esthétique et culturel<br />

Le siècle des Lumières :<br />

Le XVIII e siècle est placé sous le signe du mouvement.<br />

La littérature y correspond à la politique : à un siècle de<br />

contestation politique répond le déploiement d’une littérature<br />

de contestation. Une littérature d’idées, de réflexion<br />

émerge et vise à critiquer l’ordre social afin de le faire<br />

changer.<br />

I. L’ouverture au monde<br />

Le cosmopolitisme du temps se traduit par la rédaction<br />

de nombreux récits de voyages : de l’Italie célébrée par le<br />

président de Brosses au récit fameux de Bougainville entre<br />

autres sur son voyage à Tahiti, au Canada, un genre à la fois<br />

narratif et argumentatif s’esquisse… Il nourrit une réflexion<br />

sur l’autre et l’altérité et conduit à poser la question de la<br />

relativité des valeurs et celle de la supposée suprématie de<br />

la culture occidentale. Les Lettres persanes ou L’Ingénu<br />

répondent à cette question : qui est le barbare ? Le mythe<br />

du bon sauvage se construit dans les récits avant de se<br />

structurer théoriquement sous la plume de Jean-Jacques<br />

Rousseau dans le Discours sur l’origine de l’inégalité :<br />

l’homme naturel serait bon car il n’aurait pas été dénaturé<br />

par une société perverse et corrompue. La question du bonheur<br />

découle de ces interrogations : la société a-t-elle rendu<br />

l’homme meilleur ou pire ?<br />

À la curiosité du touriste s’ajoute l’intérêt pour les régimes<br />

politiques étrangers qui anime la verve de Voltaire<br />

dans les Lettres anglaises.<br />

Cette ouverture dans le domaine de l’esprit invite à la<br />

recherche encyclopédique et au désir de répertorier toutes<br />

les formes de savoirs et tous les types d’objets du monde.<br />

II. L’essor des sciences<br />

L’essor intellectuel au XVIII e siècle se fait dans les<br />

salons, les clubs, les cercles. Et tend à atténuer les différences<br />

sociales : une aristocratie de la pensée plus que de la<br />

naissance s’impose. Au XVIII e siècle, on croit en la raison<br />

humaine et on désire, grâce à l’accroissement des connaissances,<br />

améliorer la vie de l’homme (point de vue physiologique<br />

et social).<br />

- essor des sciences : science naturelles, médecine…<br />

- applications concrètes de la science : électricité,<br />

magnétisme, paratonnerre, vol en ballon, télégraphe…<br />

- volonté d’expliquer rationnellement le monde : déclin<br />

de la métaphysique, théorie de l’évolution…<br />

La foi en le progrès est immense. Elle habite toute l’entreprise<br />

de Diderot et d’Alembert, qui dans les dernières<br />

lettres qu’ils échangeront, se déclareront certains « d’avoir<br />

servi l’humanité. »<br />

III. Une littérature critique<br />

La littérature du XVIII e siècle, même si elle reste policée<br />

et marquée par l’élégance et la tradition de l’honnêteté<br />

héritée du siècle précédent, peut apparaître, sous certains<br />

aspects comme une littérature de combat. Les auteurs de<br />

fictions revendiquent indirectement plus de liberté d’expression<br />

pour eux-mêmes, donnent une voix aux aspirations<br />

d’une population illettrée qui demande plus d’égalité<br />

et de fraternité entre les hommes. Ainsi, être écrivain<br />

au XVIII e siècle n’est pas une condition facile. Certes, les<br />

grands penseurs peuvent être reçus par les monarques européens<br />

(Catherine II de Russie recevra Diderot et Voltaire à<br />

sa cour)… mais ils encourent aussi de perpétuelles persécutions<br />

politiques : les auteurs ou éditeurs qui portent atteinte<br />

à la religion, à l’autorité du roi, ou aux bonnes mœurs peuvent<br />

être punis de mort.<br />

76 • Chapitre 4 - La question de l’homme dans les genres de l’argumentation du xvi e siècle à nos jours

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