BILaN DE PaRCouRS 1 - Editions Bréal
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a pas d’épanchement lyrique dans le passage, mais une froideur<br />
et une neutralité face au spectacle décrit. Voir supra.<br />
b. Voir lecture analytique supra.<br />
Texte 2.<br />
a. De manière étonnante, alors que le théâtre est par<br />
excellence le lieu de la parole, la parole se raréfie dans le<br />
texte de L’Éden Cinéma. On assiste même à une disparition<br />
totale du dialogue. L’idée de rapports arrangés, convenus,<br />
entre les êtres est ainsi soulignée.<br />
b. Le texte 2 met en relief la détresse de la mère (ivresse),<br />
le rapport sensuel ou sexuel entre M. Jo et Suzanne, la<br />
question du mariage. En revanche, est mise en sourdine la<br />
figure du frère. Suzanne devient un protagoniste essentiel.<br />
Elle est pleinement consciente de la négociation dont elle<br />
est l’objet.<br />
Texte 3.<br />
a. Les modifications par rapport au texte source sont<br />
nombreuses : on est au restaurant, non plus à une soirée<br />
dansante, c’est la jeune fille qui raconte l’histoire, le temps<br />
dominant est le présent ainsi que le passé composé qui dit<br />
le travail de rétrospection.<br />
b. Le passage à la première personne modifie le récit car<br />
la jeune fille devient un personnage essentiel de l’extrait<br />
alors que dans le texte source, elle n’était qu’un objet de<br />
négociation. L’utilisation de la première personne permet<br />
un dévoilement des pensées intimes de la jeune fille, même<br />
si ce dévoilement se fait sur le mode de la sobriété. C’est<br />
bien une autre histoire qui est ici racontée car il y a une<br />
volonté documentaire plus affirmée (indices autobiographiques<br />
et précisions spatio-temporelles plus abondants).<br />
Le récit a davantage pour fonction d’informer que d’exhiber<br />
des rapports de force ou les liens entre les différents<br />
protagonistes.<br />
Texte 4.<br />
a. Les procédés de l’écriture cinématographique sont :<br />
la brièveté des répliques (on n’écrit pas, on parle) ; la simplicité<br />
extrême et l’oralité du langage ; l’abondance des<br />
notations sur les attitudes des personnages (rire...) ; la prégnance<br />
du dialogue ; le grossissement des traits de caractère<br />
des protagonistes.<br />
b. Ce texte brouille notre interprétation de l’événement<br />
car les rapports de force sont radicalement inversés<br />
(cf explication p. 127). Le registre comique apparaît car<br />
le frère, déifié par sa mère, du moins dans la mémoire de<br />
Marguerite Duras, semble minable face à la force et à la<br />
prestance du Chinois.<br />
Vers la problématique.<br />
Le sens du souvenir est brouillé au fil des extraits. En<br />
effet, d’un texte à l’autre, les rapports de force et le rôle<br />
de chacun des personnages sont modifiés. Dans le texte 1,<br />
Suzanne apparaît spectatrice de son destin ; dans le texte 3,<br />
c’est elle la principale voix du texte (narratrice) et elle se<br />
plaît à souligner l’humiliation subie par l’amant. Dans les<br />
textes 2 et 4, le frère aîné, qui apparaissait si flamboyant<br />
et autoritaire dans le texte 1 devient une figure pitoyable,<br />
soumise et dominée. Une constante demeure : le caractère<br />
pathétique de la mère qui a besoin de marier sa fille pour<br />
sauver ses rizières. Mais là aussi, des variations apparaissent<br />
: dans les textes 1 et 4, la mère semble écrasée par les<br />
événements ; dans les textes 2 et 3, elle est bien plus calculatrice<br />
et a pleinement conscience du marchandage dont sa<br />
fille est l’objet.<br />
Synthèse et problématique<br />
En reprenant constamment un thème et une histoire,<br />
Marguerite Duras peut viser tout d’abord la vérité : rendre<br />
compte le mieux possible de ce qu’a été l’événement et les<br />
circonstances de la relation avec l’amant.<br />
Mais au contraire, elle peut aussi brouiller les pistes<br />
et dire que la vérité en littérature n’existe pas et surtout<br />
qu’elle importe peu. En se contredisant d’un texte à l’autre,<br />
en modifiant les rapports de force et les personnages en<br />
présence, elle joue avec le matériau biographique pour<br />
mieux le déformer.<br />
Ainsi, ce qui apparaît, c’est que c’est l’enjeu d’écriture,<br />
l’enjeu esthétique, qui est essentiel dans les réécritures.<br />
Duras cherche moins la vérité du vécu que la perfection<br />
formelle. Elle espère dire bien et dire justement. C’est la<br />
virtuosité de l’écrivain qui se met en scène.<br />
Chapitre 6 - Du modèle aux réécritures, du xvii e siècle à nos jours • 131