134135écoles de France aux jeunes de la République ceux qu’on appelait ses« hussards », les instituteurs de mon enfance. Rouxel, surpris et pasimmédiatement convaincu fit des essais sur quelques épisodes : çamarchait ! Il dit « oui ».Malheureusement, cela n’amusa personne. Ni l’INA. Ni les chaînes…Une occasion per<strong>du</strong>e que l’on ne risque pas de retrouver…Émile Breton JournalisteMort et survie d’un accordéonL’été 1973, la revue La Nouvelle Critique organisait à Avignon une« Semaine <strong>du</strong> cinéma soviétique ». Une liste de films ayant été dressée,deux des membres de la commission cinéma avaient été chargés de lesvisionner et les retenir à Moscou. Sur cette liste figurait Garmon (L’Accordéon,1934) film ukrainien d’Igor Savchenko, histoire d’un jeune kolkhozienjoueur d’accordéon, entraînant les paysannes au travail avec tant d’ardeurque les responsables <strong>du</strong> kolkhoze décidaient de le faire adhérer auparti communiste. Prenant son rôle au sérieux, il finissait par enterrer sonfutile instrument. Ce dont la pro<strong>du</strong>ction ne pouvait que souffrir. Enthousiasméspar le film, qu’ils avaient pu voir au Gossfilmofond, archives cinématographiques,les deux envoyés, à la fin de leur séjour, signalèrent auxresponsables de Goskino, leurs hôtes, qu’ils souhaitaient le retenir. « Quelbon choix », leur dirent les deux hommes, «mais malheureusement, il aété entièrement détruit au moment de l’avance allemande en Ukraine. »– « Mais nous venons de le voir aux archives. » – « Impossible », leur fut-ilrépon<strong>du</strong> avec le plus grand sérieux : «on vous l’a si bien raconté que vousavez cru le voir. » Pas de Garmon, donc, à Avignon.Trois ans plus tard, la revue présentait à Beaubourg une rétrospective <strong>du</strong>cinéma soviétique. Même demande, même lieu, mêmes responsables deGoskino, même réponse, seuls les envoyés de la revue étaient différents.Or, à l’arrivée des copies, Garmon était dans le lot. La première réactionfut de penser qu’un employé des archives ignorait sa « destruction ». Enfait le plus vraisemblable était qu’on avait fini par s’apercevoir en hautlieu <strong>du</strong> ridicule de la fable. En effet, le film, commandé en 1934 par lesKomsomols, avait été très vite retiré de la circulation, cette histoire sentantle soufre. Ce pourquoi d’ailleurs elle avait eu un beau succès lors deson éphémère sortie.Depuis la rétrospective de Beaubourg existe en France une copie soustitrée<strong>du</strong> film.Serge BrombergDirecteur de Lobster Films, chercheur et restaurateur de filmsFilms per<strong>du</strong>sPlus de la moitié des films tournées depuis 115 ans dans le monde ontaujourd’hui disparu, et parmi eux quelques chefs d’œuvre, véritablesGraals pour les cinémathèques.Champion parmi les champions, Les Quatre diables, de Murnau (l’auteurde Nosferatu), tourné en 1928. Mais il y a aussi Thérèse Raquin de JacquesFeyder (1928), la version longue des Rapaces (Erich Von Stroheim), filmmutilé avant sa sortie en 1924, La Mouette (The Seagull, 1926), réalisé parJoseph Von Sternberg, et pro<strong>du</strong>it par Chaplin qui n’aimait pas le film.Il est également probable que nous ne reverrons jamais Le Patriote,d’Ernst Lubitsch, invisible depuis 1928, ou La Femme Divine (DivineWoman, 1928), avec Greta Garbo. Quant au Pré Bejine, film fantômetourné par Serguei Eisenstein en 1937, il a brûlé avant sa sortie, et seulela première image de chaque plan a survécu.Côté comiques, Hats Off, court-métrage avec Laurel et Hardy (1927),Her Friend the Bandit (1914), avec Chaplin, ou Humorisk (1921), avecles Marx Brothers, n’ont pas été vus depuis leur pro<strong>du</strong>ction. Quant auxTrois Ages (Three Ages, 1923), le premier long-métrage de Buster Keaton,il n’est visible que dans une copie affreusement mutilée.Il manque encore 300 films de Georges Méliès (sur les 500 qu’il a tournés),ou le montage « director’s cut » de La Splendeur des Amberson(Orson Welles, 1920).Mais c’est bien connu, il n’y a pas de films per<strong>du</strong>s, il n’y a que des gensmal informés. À force de recherches, quelques-uns de ces joyaux invisiblesont pu êtres récemment retrouvés. Rien qu’en France, ont étédécouverts Matinee Idol (de Frank Capra), ou Bardelys le Magnifique(de King Vidor), film d’aventures flamboyantes avec John Gilbert. Récifde Corail, avec Jean Gabin et Michèle Morgan, n’existerait plus si unemiraculeuse copie n’avait été retrouvée à Belgrade, en Serbie. Ou encoreUpstream, réalisé par John Ford en 1927 et retrouvé en Nouvelle Zélande,un film per<strong>du</strong> et… assez médiocre.Ces chefs d’œuvre invisibles font plus que nous manquer. Ils sont notrepart inconnue, nos trésors enfouis. Comme le cinéma, ils constituentdésormais l’étoffe dont on fait les rêves.
Freddy BuacheAncien conservateur de la Cinémathèque suisseLes Trouble-fêteAu moment où vient de paraître un livre : Elisée Reclus, géographe, anarchiste,écologiste (Ed. Robert Laffont, 2010), un projet <strong>du</strong> cinéaste suisse¹Michel Soutter qui ne parvint pas à se réaliser, revient à la mémoire.Après avoir signé Repérages (1977, évocation lointaine de Tchékhovet Tolstoï), L’Amour des femmes (1981, comme son titre l’indique) ouSigné Renart (1991, évocation de sa propre solitude) ou, pour la télévision,L’Eolienne (1975, mal reçu), Michel Soutter porta sa réflexion,d’une façon moins assurée, <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> monde patriotique entourantson travail qui, d’ailleurs, ne l’avait guère soutenu. Alors, un peu partout,l’économie prenait le pouvoir contre les aspirations des peuples,et la chute <strong>du</strong> Mur de Berlin marquait pour lui moins d’enthousiasmeque ne le disaient les journaux. Depuis un temps certain, l’idée quisignalait, par la caméra, les manifestes de contre-culture (commencésdans les années 60 par la télévision romande et dès 1965 par le « nouveaucinéma suisse ») l’intriguait toujours mieux en lui faisant porterson regard <strong>du</strong> côté des utopistes de la Franche-Comté.Pierre-Joseph Proudhon (de Besançon), Charles-Louis Fourier (deBesançon également, avec son Nouveau monde amoureux), Arc-et-Senans de « l’architecte maudit » Claude-Nicolas Ledoux (étudié parun court métrage de Pierre Kast en 1954) lui donnèrent l’occasion deconnaître avec attention le peintre Gustave Courbet réfugié en Suisseau lendemain de La Commune de Paris. Du coup, il se mit à lireBakounine, Kropotkine ou Max Stirner (L’unique et sa propriété), cequi l’engagea de tout cœur à préparer un scénario qu’il intitula : LesTrouble-fête.Il s’agissait de l’organisation d’un spectacle champêtre dans la villenatale de Courbet (Ornans) où l’artiste célèbre est interprété parun barman d’un lieu voisin. Il surprend la population par sa libertéd’ordre érotique en faisant défiler dans une exposition les gens devantun tableau : L’origine <strong>du</strong> monde. Une trouble réaction, partisane ouviolemment contraire, partage la communauté de la bourgade tandisque divers éléments de la pièce contribuent encore à soulever l’exaltationou l’indignation de ces Jurassiens que filme, en outre, un documentaristehollandais. De la sorte, devaient s’exprimer des rapportsliés à la politique et aux relations ordonnées avec le corps des femmes(et non sur de vagues considérations philosophiques marquant lesréalités générales de la société).Les commissions d’experts mises en place pour l’éventuel soutiend’une telle œuvre livrant une nouvelle idéologie dans le septièmeart helvétique le refusèrent comme elles avaient renvoyé, vers 1960,Blaise Cendrars qui souhaitait parler de lui-même et de ses amis avecGeorges Franju que l’aide française prenait pourtant en charge pourla moitié <strong>du</strong> budget.Alain Carou Conservateur au départementde l’Audiovisuel de la Bibliothèque nationale de FranceL’Empreinte ou la Main rouge.L’Empreinte ou la Main rouge. Réalisateur : Paul Henry Burguet. Pro<strong>du</strong>cteur: Le Film d’Art. France. 1908. Curieuse incertitude <strong>du</strong> titre,comme si le pro<strong>du</strong>cteur n’avait pas réussi à choisir : L’Empreinte, ou LaMain rouge ? De ce film tourné il y a 103 ans, seule une moitié subsisteaux Archives françaises <strong>du</strong> film, retrouvée par la Cinémathèque suisseen 1993. Comme quantité d’épaves <strong>du</strong> cinéma des premiers temps, onne le projette pour ainsi dire jamais. Le spectateur ne peut pas mêmemonter dans le train en marche comme dans une autre bande de lahaute époque, poursuite ou mélodrame aux figures stéréotypées. Latrame de l’intrigue est ici inhabituellement serrée, et l’acteur principals’exprime en hiéroglyphes gestuels. Mais ces images constituent unirremplaçable document sur un acteur, Séverin, et sur une discipline,la pantomime, telle qu’on la jouait au dix-neuvième siècle.Séverin fut le dernier mime à se revendiquer descendant en lignedirecte de Deburau, le Baptiste des Enfants <strong>du</strong> paradis. On est d’aborddécontenancé par ce Pierrot qui parle avec ses mains. Plusieurs visionnementssont nécessaires pour apprendre à lire les rébus qu’il tracedans les airs. Alors deviennent sensibles la singulière virtuosité desenchaînements, un engagement de tout le corps. Ce morceau de pelliculeorphelin tire <strong>du</strong> néant quelques motifs d’un art de l’acteur quinous est devenu parfaitement étrange(r) – et l’art des spectateurs quile comprenaient au vol non moins.Pour rêver à la moitié per<strong>du</strong>e <strong>du</strong> film, enfin, il nous reste la partitionde la musique d’accompagnement, pleine de didascalies.Les Invisibles
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