Mais le plus grand obstacle est peut-être que son chef d’œuvre présenteun véritable défi dans sa façon de rendre l’art et la vie indissociablesl’un de l’autre : Romand y fait fusionner choix artistiques et initiativeséthiques, et nous met au défi de faire de même en la suivant. La rivalitéimplicite entre les deux mères, leur culture et leur vision <strong>du</strong> monderespective, transparaît partout. Mais le génie de la cinéaste tient en partieà ce qu’elle réussit à faire participer la famille entière au jeu de rôlesérieux que constitue la pro<strong>du</strong>ction <strong>du</strong> film, jeu auquel le spectateurest lui aussi forcé de participer. Ceci fait de son art à la fois une aventureimprévisible et périlleuse, et un processus de guérison inhabituel,pour les personnes filmées aussi bien que pour nous. La devise pleined’espoir qui clôt le film - « Nous sommes faits pour vivre ensemble » -peut paraître un peu optimiste, mais le film lui-même n’est rien d’autrequ’une démonstration à plusieurs facettes de cette thèse.Barbet Schroeder CinéasteUne partie de plaisirJe pense à Une partie de plaisir de Claude Chabrol et Paul Géauff. AprèsLes Bonnes femmes leur deuxième collaboration totale.Je crois qu’il s’agit d’une question de droits.Ce film est une expérience limite puisque Gégauff a écrit sous formede fiction à peine déformée la réalité de ses relations avec sa femme.Chabrol a eu le culot de les faire jouer tous deux leur propre rôle oupresque.Un film terrible et douloureux qui est tout à fait à part dans l’œuvre deChabrol et que j’aimerais beaucoup revoir.Il est si proche dans le temps et si lointain, si inaccessible déjà.¹152153Tra<strong>du</strong>it de l’anglais par Olivia Cooper Hadjian et Aurélia GeorgesFederico Rossin Critique et programmateurMon invisibleMon film invisible est Mueda, mémoire et massacre (Mueda, Memóriae Massacre) de Ruy Guerra (1979). J’ai découvert ce film grâce à unami, un grand cinéaste, John Gianvito. Il m’en a parlé comme d’unchef d’œuvre per<strong>du</strong> <strong>du</strong> cinéma, comme d’un film essentiel dont ona per<strong>du</strong> la trace. J’ai lu ensuite comment Guerra, né au Mozambiqueavant d’émigrer au Brésil, retourne dans son pays natal pour tourner lepremier long métrage jamais réalisé là-bas. Il choisit un épisode terrible,le massacre de Mueda le 16 juin 1960, au cours <strong>du</strong>quel l’armée colonialeportugaise extermina plus de 600 personnes qui réclamaient la fin destravaux forcés. Guerra fait un film foncièrement radical qui entrelacevertigineusement reconstitution, fiction et documentaire et associeles survivants <strong>du</strong> massacre et les nouveaux habitants de Mueda à saréalisation. J’ai cherché partout une copie DVD de Mueda et contactédes collectionneurs sur tous les continents sans jamais parvenir à envoir ne serait-ce qu’une séquence : c’est comme si, par la force desmots de John, ce film était planté dans mon cœur comme une épine.Je voudrais pouvoir en finir avec cette douleur – qui tient moins de laboulimie cinéphilique que de la colère politique – en le voyant enfinpendant le festival.Tra<strong>du</strong>it de l’italien par Muriel CarpentierMartin Scorsese CinéasteLes Rapaces (Greed), 1924, d’Erich von StroheimCette adaptation <strong>du</strong> roman épique de Frank Norris sur la soif d’or destructricede trois indivi<strong>du</strong>s ordinaires reste un grand film, même danssa version sévèrement tronquée. Mais Stroheim entendait en faire toutautre chose : une grande fresque réaliste qui dépeindrait tout un style devie, ainsi que les rêves et les ambitions de ceux qui le vivent. Irving Thalberg,le jeune pro<strong>du</strong>cteur en chef de la MGM ne voyait pas les choses<strong>du</strong> même œil (contre toute attente, Stroheim travailla pour Thalberg unan plus tard sur un film beaucoup moins ambitieux, son remake de LaVeuve Joyeuse (The Merry Widow). Il existe aujourd’hui une version desRapaces dans laquelle on a remplacé les séquences manquantes par desimages fixes, version intéressante mais en fin de compte insatisfaisante :on passe son temps à imaginer ce que le film aurait dû être.The Elusive Pimpernel, 1950, de Michael Powell & EmericPressburgerAlexander Korda, l’un des quelques hommes qui contribuèrent à créerune in<strong>du</strong>strie <strong>du</strong> film au Royaume-Uni, demanda à Powell et Pressburgerde faire un remake en Technicolor <strong>du</strong> Mouron rouge (The ScarletPimpernel), l’histoire d’un aristocrate britannique qui opère incognito àParis pendant la Terreur. Les « Archers » (le nom de leur maison de pro<strong>du</strong>ction,ndt) imaginèrent leur propre version de l’histoire, totalementfantaisiste, avec des numéros musicaux, des sous-enten<strong>du</strong>s au second
¹Errere errera…Je suis en voyage au Mexique et j’ai une mémoire un rien percée. Je mesouviens d’un film d’un peintre portugais dont le nom doit ressemblerà Jose Sistiaga (orthographe défaillante je suppose) et le titre deson film Errere errera baleibouk ikic aruaren (ce n’est pas une blague,mais je suis certain qu’ici l’orthographe <strong>du</strong> titre est sûrement fausse).Il s’agit d’un film peint photogramme par photogramme, muet et quicréait un état hypnotique étonnant. Il doit dater de la fin des années60, début des années 70. Un groupe de diffusion de films expérimendegréet des effets visuels hyperboliques. Samuel Goldwyn, qui était enaffaire, avec Korda, détesta le film et ordonna de sérieuses coupes, intermèdesmusicaux compris. Le film sortit aux Etats-Unis dans quelquescopies noir et blanc ! Je l’ai vu en couleur sur la 42 e rue, et ce souvenir estancré en moi. Michael pensait que les coupes d’origine étaient définitivementper<strong>du</strong>es, mais nous préférons croire qu’elles attendent au fondd’une cave quelque part dans ce monde.Le Procès Paradine (The Paradine Case)Au fur et à mesure que je vieillis, je trouve les films d’Hitchcock toujoursmeilleurs ; ils s’enrichissent et deviennent plus complexes à chaque nouvellevision. Y compris les films censés être les moins réussis, commeL’Etau (Topaz) ou Le Rideau déchiré (Torn Curtain).Ce film sur un avocat britannique de plus en plus attiré par la mystérieuseaccusée de meurtre qu’il défend est d’un genre un peu différent. Hitchcockn’a jamais vraiment cru au scénario, alors que Selznick lui-même le trouvaitporteur. Hitchcock avait travaillé sur la première version <strong>du</strong> scénario,mais il avait aussi essayé de faire en sorte que le film fonctionne tel qu’ilétait — son premier montage <strong>du</strong>rait 3 heures et demie. Le Procès Paradineserait probablement imparfait dans n’importe quelle version, maisun Hitchcock imparfait reste plus excitant que bien des films.The Other Side of the Wind, Orson Welles 1970-1975Dans les vingt dernières années de sa vie, Orson Welles a fait des films quiéchappaient aux standards de l’in<strong>du</strong>strie cinématographique. Il travaillaità la manière d’un peintre ou d’un compositeur, tournant un peu ici, unpeu là, retravaillant ceci et reprenant cela <strong>du</strong>rant de longues périodes.Quand Welles mourut, il laissa de nombreux projets à divers niveauxd’avancement. Cependant son œuvre maîtresse reste ce film sur un anciencinéaste hollywoodien vieillissant (interprété par John Huston, authentiquevétéran d’Hollywood lui-même) qui tourne un film « jeune » etpseudo-artistique pour rester à la page <strong>du</strong> nouveau « Nouvel Hollywood »d’alors avec en toile de fond son désir homosexuel sous-jacent pour lejeune premier. Le projet se développa lentement au cours des ans, necessant de changer de forme et de ton. Welles avait l’intention d’entrecroiserdes séquences de style « cinéma vérité » de la fête d’anniversaire <strong>du</strong>réalisateur et des parties « film dans le film ». A sa mort, la copie de travailet tous les rushes furent saisis par le gouvernement iranien (le principalinvestisseur <strong>du</strong> film était iranien), puis confisqués par le gouvernementfrançais. Il y a eu depuis plusieurs tentatives pour terminer le film, aucunen’ayant abouti à ce jour. En 1975, quand l’American Film Institute a ren<strong>du</strong>hommage à Welles, il en a montré deux longues séquences, toutes deuxabsolument éblouissantes. On peut maintenant facilement les visionnersur You Tube. J’espère qu’un jour on pourra voir le film dans une versionqui rende justice aux intentions de Welles.La Splendeur des Amberson (The Magnificent Ambersons)Après Citizen Kane, le jeune Orson Welles enchaîne sur l’adaptationde ce roman de Booth Tarkington sur la lente déchéance d’une familled’Indianapolis dont le mode de vie est entièrement détruit par le progrèsin<strong>du</strong>striel. Alors que tout s’était bien passé pour Welles sur sonpremier film, tout se passa mal pour le second. La direction <strong>du</strong> studioavait changé et avait beaucoup moins de sympathie pour lui et pour sontalent artistique ; l’avant-première <strong>du</strong> film fut un désastre et quand descoupes drastiques furent ordonnées, Welles était en Amérique <strong>du</strong> Sudoù il tournait son documentaire It’s All True. Le film fut sévèrementamputé et on fit tourner une nouvelle fin à un autre réalisateur. Il fautdire que Welles était un tel génie que La Splendeur des Amberson resteun très grand film, même dans sa version si manifestement dénaturée ;chaque moment en est si fort qu’on peut d’une certaine manière ressentirles vastes passages manquants. Mais quand on lit le script qu’utilisaitWelles pendant le tournage et qu’on comprend soudain pleinementce qu’il avait en tête, ça vous brise le cœur. Pendant des années, lescinéphiles ont entretenu l’espoir que la copie de travail des Ambersonavait survécu et qu’elle dormait dans des archives en Amérique <strong>du</strong>Sud. Ces espoirs s’amenuisent. Elle semble avoir disparu pour toujours,exactement comme la splendeur victorienne <strong>du</strong> manoir des Amberson.Tra<strong>du</strong>it de l’anglais par Muriel CarpentierPhilippe Simon Cinéaste et libraireLes Invisibles
- Page 3 and 4:
Cinéma du réelremercie toutpartic
- Page 5 and 6:
Patrick BazinDirecteur de la BpiBib
- Page 7 and 8:
Guy SeligmannPrésident de laScamSo
- Page 9 and 10:
Claude LemeslePrésident duConseild
- Page 13 and 14:
Autres jurys13Le Jury des jeunes, c
- Page 15 and 16:
Compétition internationaleCompéti
- Page 17 and 18:
Ruth BeckermannAmerican Passages17C
- Page 19 and 20:
Claudio PazienzaExercices de dispar
- Page 21:
Lee Anne SchmittThe Last Buffalo Hu
- Page 24:
2425Ariane DoubletLa Pluie et le be
- Page 30:
3031Olga MaurinaDomHome2011, Russie
- Page 33 and 34:
Bettina BüttnerKinderKids2011, All
- Page 35 and 36:
Filipa ReisJoão Miller GuerraNuno
- Page 37 and 38:
Marco SantarelliScuolaMediaJunior H
- Page 39 and 40:
Michele PennettaI Cani abbaianoThe
- Page 41 and 42:
juan Manuel SepúlvedaExtraño rumo
- Page 43 and 44:
Javier LoarteMe llamoRoberto Delgad
- Page 45 and 46:
Vania AillonLa Terre tremble2011, S
- Page 47:
Mehdi BenallalAux rêveurstous les
- Page 50 and 51:
Matthieu ChatellierDoux amer5051201
- Page 53 and 54:
Gaël LépingleJulien2010, France,
- Page 55 and 56:
Sophie BruneauMarc-Antoine RoudilMa
- Page 57 and 58:
Marie DumoraLa Place2011, France, 1
- Page 60:
News From…Patrick KeillerNicolás
- Page 63 and 64:
Verena Paravel, J.P. Sniadeckisamed
- Page 65 and 66:
2010, Chine, 356 minMandarin, coule
- Page 67 and 68:
Séancesspéciales10. Mythologie ou
- Page 69 and 70:
Andrei Ujică,La révolution, live1
- Page 71 and 72:
2010, Roumanie, 180 minRoumain, cou
- Page 73 and 74:
1993, États-Unis /Italie, 55 minHi
- Page 75 and 76:
Leo HurwitzAmerica never was Americ
- Page 77 and 78:
Leo Hurwitz #1samedi 26 mars 2011,
- Page 79 and 80:
Leo Hurwitz #3jeudi 31 mars 2011, 1
- Page 81 and 82:
Richard LeacockRichard Leacock aura
- Page 83 and 84:
Dédicace Richard Leacocksamedi 2 a
- Page 85 and 86:
Les outils du cinéma documentaire
- Page 87 and 88:
Camera #3 Pierre Lhomme, Renato Ber
- Page 89 and 90:
Dédicaces& Ateliers
- Page 91 and 92:
Le poème documentaireLe 28 octobre
- Page 93 and 94:
Exploring documentary #2 Rudy Burck
- Page 96 and 97:
Exploring documentary # 5 Helga Fan
- Page 98 and 99:
Exploring documentary #7 Leighton P
- Page 100 and 101:
Exploring documentary #9 Odes ciné
- Page 103 and 104: 1994 et 2001, France, 8 minFrançai
- Page 105 and 106: Thanks for the American dream,To vu
- Page 107 and 108: 1931, États-Unis, 11 minCartons an
- Page 109 and 110: 1935, États-Unis, 6 minCartons ang
- Page 112 and 113: Réalisateur inconnuProtestExtrait
- Page 116 and 117: Écoute Voir !Hors scèneAvec le so
- Page 118 and 119: Hors scène #2jeudi 31 mars 2011, 1
- Page 120: Hors scène #5samedi 2 avril 2011,
- Page 123 and 124: Hors scène #10dimanche 3 avril 201
- Page 125 and 126: Lech Kowalski : Underground Rock St
- Page 127 and 128: Le cinéma est parfois invisible.Ce
- Page 129 and 130: Adriano Aprà Historien du cinéma,
- Page 131 and 132: Était-ce un téléfilm ? Un oubli
- Page 133 and 134: ¹de connaître les films du Hollan
- Page 135 and 136: Freddy BuacheAncien conservateur de
- Page 137 and 138: ¹Vincent Dieutre CinéasteLe film
- Page 139 and 140: ¹c’était une manière de miracl
- Page 141 and 142: Mon film et l’entretien ont été
- Page 143 and 144: ¹au paysage urbain de New York, le
- Page 145 and 146: ¹Eric Le Roy Chef du service Accè
- Page 147 and 148: ¹Marcel Lozinski CinéasteA la rec
- Page 149 and 150: ¹surgissent quand on les a cherch
- Page 151: ¹contenu réaliste, voire ethnogra
- Page 155 and 156: ¹teur, je suis presque sûr que se
- Page 158 and 159: 158159Peter von Bagh Cinéaste, his
- Page 160 and 161: Mémoire du réel
- Page 162 and 163: Les 20 ans du Prix Louis Marcorelle
- Page 164 and 165: Rencontres et événements
- Page 166 and 167: Soirée Video et Après / Cinéma d
- Page 168 and 169: Rencontres et débats168169Rencontr
- Page 170 and 171: Forum AddocQuand le documentairereg
- Page 172 and 173: 172173Séances hors les mursCENTRE
- Page 174 and 175: 176177Index des réalisateursAAbi S
- Page 176 and 177: 178KGP Kranzelbinder GabrieleProduc
- Page 178: 180181L’ équipe du Cinéma du r