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Cinéma du réel 2011

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¹c’était une manière de miracle : rigoureusement interdit, supposé ne plusexister, le film demeure depuis invisible en Occident, et évidemmentdans son propre pays. Lorsque j’ai demandé à Amir Naderi s’il en possédaitune copie, c’est les larmes aux yeux qu’il a répon<strong>du</strong> non.3) Et qu’il m’a parlé de l’autre film, « encore plus invisible », « encoreplus interdit », si ces expressions ont un sens. Tourné dans les semainesqui ont suivi le déclenchement de la révolution qui devait chasser leShah d’Iran, aussitôt banni par les nouvelles autorités, il existe pourtantquelque part. Invocation des disparus des journées révolutionnaires,travail d’enquête sur des événements d’une violence jamais vraimentracontée ni montrée, et qui mobilisent en écho nos grandes référencessur la construction de la visibilité de ce qui a été effacé <strong>du</strong> monde, enparticulier Nuit et brouillard et Shoah. Film disparu consacré aux disparusde la révolution, La Recherche est une énigme douloureuse, dontje crois la résolution nécessaire, sans savoir si elle est possible.Aurélia Georges CinéasteStars in My CrownEn matière de films invisibles, voici ceux qui nous semblent tels parcequ’ils n’existent pas en DVD. Ils ne sont pas à disposition. Il faut les voirprojetés dans une salle. Les attraper au vol, comme autrefois, en somme.Stars In My Crown, (1950) de Jacques Tourneur, a été montré lors de larétrospective <strong>du</strong> cinéaste au Centre Georges Pompidou, en 2003. Je suisretournée à la dernière projection, consciente de sa rareté, et illuminéepar sa splendeur. Étoiles d’un Tourneur moraliste, peintre de la sociétéaméricaine ; presque un western, comme ses magnifiques Stranger OnHorseback et Wichita, mais un western de pasteur (le pasteur est commele shérif, un gardien). Tourneur est un cinéaste aimé, à en juger par lesétoiles qu’il allume dans les yeux de mes amis et camarades cinéastes.Est-ce sa relative rareté qui alimente la fascination qu’il exerce ? Ou estcele secret intérieur à nombre de ses films, la soustraction qu’il opèrepar la forme, cette économie d’effets, qui rend ses plans si beaux… StarsIn My Crown n’est pas le plus secret de ses films, il est même assez ouvert.Sa générosité est dans son didactisme, l’art <strong>du</strong> plaidoyer, qui l’apparentepour moi au cinéma de Capra, tant aimé dans M. Smith ou Lost Horizon.C’est la croyance en ce pays – portée par des chantres nés en Europe…Leur cinéma comme le pays croit en la parole, en la déclaration, en laprofération. Dans l’écrin d’un noir et blanc superbe, le drame fait monternos larmes, et on sauve un homme avec des mots.Enrico Ghezzi Réauteur d’imagesFear and DesireIl n’y a pas de film plus maudit que celui qui l’est par son propre auteur.Fear and Desire, le premier long métrage de Kubrick, demeure encoreaujourd’hui le trou noir de sa filmographie. Tourné par le cinéaste à l’âgede 24 ans en 1952 (l’année où l’on vit le premier film de Debord – sansimages – et Europe 51 de Rossellini), il sortit en salles sous le signe <strong>du</strong>Bélier le 1 er avril de l’année suivante, eut un discret succès d’estime dansle circuit « art et essai » avant de disparaître rapidement. C’est Kubricklui-même qui le retira de la circulation, en interdisant toute projectionpublique à venir : « ce n’est pas un film dont je me souviens avec fierté,sinon pour l’avoir mené à terme » dira-t-il.Les quelques lignes d’intrigue qui en subsistaient laissaient transparaîtreune quintessence kubrickienne : un film de guerre et d’horreur, de fantômeset de doubles ; un film per<strong>du</strong> derrière les lignes ennemies, commela patrouille que l’on voit s’avancer dans le néant.Fear and Desire demeura invisible jusqu’en 1989, quand la copie d’un collectionneurapparut lors de rares projections privées. Aujourd’hui encore— alors que le cinéaste est décédé en 1999 après avoir bouclé la boucled’une œuvre intensément ancrée dans le fantasme <strong>du</strong> “tout surveillance”avec Eyes Wide Shut, terrible chef d’œuvre sorti en salles sans qu’il ait pu yapporter sa dernière touche — Fear and Desire n’a toujours pas été remisen circulation par la famille, conformément à la volonté de Kubrick. Il encircule pourtant d’abominables copies pirates en vhs et des dvd douteuxdans le monde entier. Je garde avec nostalgie le si précieux souvenir dela seule projection publique au monde, en juillet 1992 au TaoCinema,le festival que je dirigeais, qui était mentionnée “sous réserve” dans lecatalogue, entre les sections Fuori Orario 1 et La Coda della Comete 2 . Uneprojection unique, à minuit, dans le magnifique théâtre grec de Taormina,au terme d’une année de pressions et de recherches obsessionnelles, avecl’aide amicale et décisive de Paolo Cherchi Usai, et qui — heureuse surprisefinale ! — ne provoqua ni mesure de rétorsion ni réaction scandalisée<strong>du</strong> cinéaste ou de ses proches.Fear and Desire (Peur et Désir). Ces deux pôles, la pulsation et le courantde l’un à l’autre, constituent l’unique lien <strong>du</strong> cinéma avec la réalitécontingente qu’il bouscule et qu’il lézarde, par sa seule exposition (unesérie inachevée d’images, fissures dans lesquelles le monde se délite).En repensant aux images en 16mm de Fear and Desire, dansant dans1 Ndt : « Hors programme »2 Ndt : « La queue de la comète »Les Invisibles

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