Paris WorldWide #9
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Une grand-mère au sourire attendri berce un<br />
nouveau-né, pendant qu’un grand-père aux<br />
cheveux blancs lui fait risette. La scène paraît<br />
banale. Elle l’est moins lorsque l’on sait<br />
que la grand-mère en question est Hillary<br />
Clinton, candidate démocrate à la prochaine<br />
élection présidentielle américaine, que le<br />
grand-père n’est autre que son ex-président de mari.<br />
Et que ce cliché a été posté sur le compte Twitter<br />
de l’ancienne secrétaire d’état de Barack Obama,<br />
quelques mois avant qu’elle n’entre en campagne.<br />
À l’instar de Margaret Thatcher au Royaume-Uni<br />
ou d’Angela Merkel en Allemagne, Hillary Clinton<br />
s’est longtemps approprié les codes masculins pour<br />
construire sa légitimité : allure stricte, tailleurs sobres,<br />
réputation d’intransigeance, etc. « Jusqu’aux<br />
années 1990, les rares femmes en politique sont des<br />
exceptions qui jouent sur la neutralisation de ce qui<br />
pourrait rappeler qu’elles sont des femmes », souligne<br />
Frédérique Matonti, professeure de sciences<br />
politiques à l’université <strong>Paris</strong> 1 Panthéon-Sorbonne.<br />
Aujourd’hui, la candidate démocrate tente une nouvelle<br />
approche. En mettant en avant cette image de<br />
grand-mère aimante et de mère de famille – sa fille<br />
Chelsea s’apprête à jouer un rôle clé dans la campagne<br />
–, Hillary Clinton se rapproche des nouvelles<br />
générations, qui revendiquent à la fois leur statut de<br />
femme et celui de « tête de file ».<br />
La parité, ce chemin semé d’embûches<br />
Il faut dire que les temps, et surtout les lois, ont<br />
changé. En juin 2000, la France vote la parité en<br />
politique – depuis, plus de 120 pays à travers le<br />
monde ont adopté ce système de quotas. Le texte<br />
français prévoit que la moitié des candidats aux<br />
élections européennes, régionales et municipales<br />
(pour les villes de plus de 3 500 habitants) soit des<br />
femmes. Et il pénalise financièrement les partis<br />
qui ne présenteraient pas de liste paritaire aux législatives.<br />
Résultats : quinze ans après le vote de<br />
la loi, elles sont 48 % à siéger au sein des conseils<br />
régionaux et seulement 16 % à être maires. Selon<br />
l’Union interparlementaire (UIP), la France se<br />
hisse au quatrième rang des pays du monde en ce<br />
qui concerne la parité ministérielle, mais retombe<br />
au 46 e rang dans le domaine parlementaire. Loin<br />
derrière les bonnes élèves finlandaises et suédoises,<br />
bien devant les états-Unis (respectivement au 29 e<br />
et au 73 e rang) et la Chine (65 e et 54 e ).<br />
Même tendance observée dans le monde économique<br />
: ça bouge, mais lentement. À l’échelle mondiale,<br />
les femmes détiennent et gèrent plus de 30 % de<br />
l’ensemble des entreprises, d’après l’Organisation<br />
internationale du travail (OIT). Mais ce chiffre dégringole<br />
quand on s’intéresse aux grands groupes<br />
internationaux. Seules 2,8 % des entreprises cotées<br />
en Europe sont dirigées par des femmes, 4,8 % des<br />
sociétés américaines du classement Fortune 500.<br />
© EPA/ARNE DEDERT/Corbis - © Sean Gallup/Getty Images<br />
à gauche, Mary Barra, directrice<br />
générale de General Motors,<br />
première femme à occuper ce<br />
poste chez un constructeur auto.<br />
Left, Mary Barra, CEO of General<br />
Motors, is the first woman<br />
to occupy the post in an<br />
automotive company.<br />
La Birmane Aung San Suu Kyi,<br />
prix Nobel de la paix, a participé,<br />
en 2013, au Women’s Forum<br />
Myanmar.<br />
Myanmar’s Aung San Suu Kyi,<br />
Nobel Peace Prize winner,<br />
participated in the 2013 Women’s<br />
Forum.<br />
La première femme PDG de ce classement américain<br />
est Mary Barra, à la tête de General Motors.<br />
La médiatique Marissa Mayer, tête pensante de<br />
Yahoo, s’y classe en 561 e position. La France récolte<br />
quant à elle un zéro pointé : aucune entreprise<br />
du CAC40 n’est pour le moment menée par<br />
une femme – la situation devrait changer l’année<br />
prochaine, avec l’arrivée d’Isabelle Kocher à la tête<br />
d’Engie (ex-GDF Suez).<br />
La Française Christine Lagarde connaît bien ces<br />
deux réalités, politique et économique. Pendant<br />
plus de vingt ans, l’actuelle directrice générale du<br />
Fonds monétaire international (FMI) a travaillé<br />
au sein du cabinet d’avocats Baker & McKenzie,<br />
dont elle fut la première femme à assurer la présidence.<br />
Rebelote en 2007, en France : elle s’installe<br />
au ministère de l’économie. Une première<br />
pour une femme. « Quand elle est arrivée à Bercy,<br />
elle s’est retrouvée à son bureau, devant une demi-palette<br />
de dossiers. On l’attendait au tournant !<br />
Quatre jours après, elle avait tout lu, tout annoté<br />
76 - paris Worldwide septembre/octobre<br />
september/october 2015