La Mère des chrétiens et la Reine de l'Église - Livres mystiques

* CHATEAUBRIAND.
MARIE DANS LA DEMEURE DE JEAN 1^1
la désolation de Tyr et de Babylone; un silence et
une solitude aussi vastes que le bruit et le tumulte
des hommes qui se pressaient jadis sur ce sol 1
... »
Mais ni la solitude de ces villes désolées, ni la
solitude des sables du désert ne sauraient donner à
comprendre celle qui envahit le cœur de Marie,
Avoir eu Jésus et ne plus l'avoir!...
Jésus, cependant, lui avait fait un legs de tendres
consolations : Jean. C'est vrai; Jean était bien à
elle comme son fils, et elle était bien à Jean comme
sa mère. Ainsi l'avait commandé Jésus ; « Voici
votre fils... voilà votre mère »; et sa divine parole
avait obtenu dans leurs deux cœurs l'efficacité la
plus complète. On ne saurait concevoir la tendresse
avec laquelle Marie aimait Jean, comme aussi
l'amour que Jean lui rendait défie toute description.
C'était un ciel d'amour... mais avec l'absence de
l'être adoré! Car l'affection, si profonde qu'elle fût,
ne pouvait enlever à Jean son caractère d'enfant
d'adoption substitué à l'enfant des entrailles, et
cette substitution était toujours présente aux yeux,
à l'esprit et au cœur de Marie. Quand elle eut lieu
sur le Calvaire, ce fut un glaive qui, quoique trempé
dans l'amour, transperça le cœur de la pauvre
mère. Saint Bernard en parle .ainsi : « O substitution
navrante ! ô échange déchirant pour le cœur
de Marie! Jean à la place de Jésus, l'esclave à la
place du Seigneur, le disciple au lieu du Maître, le