La Mère des chrétiens et la Reine de l'Église - Livres mystiques

l44 MARIE DANS LA DEMEURE DE JEAN
chrétiens, lorsqu'ils apercevaient cette mère triste
et grave, mesurant pas à pas tous les intervalles
de la Voie douloureuse, s'arrêtant et pleurant aux
places où avait eu lieu quelque incident de la
Passion. On la suivait des yeux, on la suivait de
cœur, si la crainte des Juifs ne permettait pas
davantage; mais le plus souvent, on était entraîné
à la suivre pas à pas, sur les traces adorées... Elle
y allait avec Jean, elle y allait avec les saintes
femmes, elley allait seule aussi... Les méditations,
alors, étaient plus profondes.
Il n'est pas téméraire de penser que la mère, que
la femme qui, sur la plate-forme du Golgotha, à
l'heure de l'holocauste, s'était tenue debout au pied
de la croix, maintenant qu'il n'y avait plus la foule
et qu'elle était seule avec ses souvenirs, devait
défaillir de douleur et se sentir mourir aux endroits
où Jésus avait le plus souffert. Que de fois ce sanglot,
ce soupir d'une indicible tristesse a dû sortir
de son sein déchiré : O mon fils! mon fils!.. Jésus,
mon doux Jésus!.. Là où elle l'avait vu tomber sous
le poids de sa croix, elle-même alors, sous le poids
trop lourd de ce douloureux souvenir, ne s'est-elle
pas laissée choir, presque sans connaissance? Jean
était, à ces moments, l'ange qui la soutenait, et les
saintes femmes remplaçaient la légion d'anges
que Jésus avait refusée pour lui-même.
A cet état d'épuisement et de compassion peut
se rapporter le passage du Cantique : Soutenez-moi
avec des fleurs, fortifiez-moi avec des fruits, car je