Sans vigilance - Global Witness
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La nécessité de réformes ?<br />
On parle beaucoup de restitution des biens au sein de certains cercles intergouvernementaux<br />
et décisionnels. Par ce moyen, les pays spoliés par leurs dirigeants qui déposent des fonds sur<br />
des comptes bancaires à l’étranger pourraient retrouver la trace de ces fonds, en obtenir le gel<br />
et le rapatriement. La procédure est toutefois terriblement longue et difficile, pour des raisons<br />
qui deviendront évidentes au fur et à mesure de la lecture du présent rapport, mais surtout,<br />
parce qu’elle suppose, d’une part, (a) un changement de régime, pour que le nouveau<br />
gouvernement demande le remboursement des sommes détournées et, d’autre part, (b) de<br />
savoir qui est le propriétaire des fonds, ce qui est très difficile étant donné les nombreux<br />
moyens qui permettent d’en dissimuler l’origine dans le système financier. On assiste à<br />
l’heure actuelle à la prolifération d’initiatives allant dans ce sens, comme celle de la Banque<br />
mondiale pour le recouvrement des avoirs volés (Stolen Asset Recovery, StAR), dont<br />
l’objectif est de fournir une assistance technique et financière aux nations qui le demandent.<br />
Le simple fait que de telles initiatives existent indique que l’argent de la corruption termine<br />
dans les banques en raison des lacunes des législations et des dispositifs d’application des<br />
lois. Tout en soutenant de telles initiatives, <strong>Global</strong> <strong>Witness</strong> estime qu’il serait bien plus<br />
économique, simple et efficace de s’attacher à combler les failles du système qui permettent<br />
en premier lieu à l’argent sale de se retrouver dans les banques.<br />
Le Premier ministre britannique Gordon Brown a récemment parlé de « moralisation des<br />
marchés » en évoquant les solutions à la crise financière. Cette expression, qui peut faire<br />
appel à plusieurs aspects du nettoyage du système financier, est certainement valable pour ce<br />
qui nous occupe ici. Alors que les gouvernements s’efforcent, comme il se doit, de régler les<br />
problèmes que les banques ont créés dans le monde développé, ceux-ci ont l’occasion de<br />
sortir de la pauvreté des millions de personnes dans les pays en développement, dans des<br />
proportions que l’aide internationale n’atteindra jamais.<br />
Il est essentiel de comprendre que l’un des aspects fondamentaux du système financier<br />
international qui a contribué à la crise bancaire actuelle, l’asymétrie de l’information, est ce<br />
qui permet également à l’argent de la corruption de circuler et de disparaître. L’asymétrie de<br />
l’information correspond simplement à l’idée qu’une personne détient des renseignements<br />
qu’une autre n’a pas. En effet, les banques (et leurs régulateurs) ne disposaient pas<br />
d’informations suffisantes pour apprécier les risques inhérents aux produits dérivés complexes<br />
qu’elles achetaient, et les conséquences pour l’économie ont été terribles. La réponse prônée<br />
par de nombreux experts est la suivante : davantage de transparence, davantage<br />
d’informations.<br />
Dans le même temps, les mouvements des fonds provenant de la corruption (mais aussi<br />
d’autres activités criminelles ou terroristes) et leur disparition dans le système financier sont<br />
facilités par les nombreux États qui, pour des raisons économiques, se font les défenseurs du<br />
secret et n’exigent pas la communication d’informations sur les bénéficiaires effectifs des<br />
entreprises ou trusts, ainsi que par les règles sur le secret bancaire qui font obstacle aux rares<br />
enquêtes qui sont ordonnées. La réponse à ce problème est également : davantage de<br />
transparence, davantage d’informations.<br />
Les économistes s’accordent à reconnaître, d’une part, que les marchés fonctionnent mieux<br />
lorsque les informations clés sont communiquées de manière symétrique et, d’autre part, que<br />
les problèmes sont toujours dus à un manque d’informations.<br />
En ce qui concerne la crise bancaire, ce sont les investisseurs, les fonds de pension, puis les<br />
entreprises et les populations des pays riches (ainsi que les banques elles-mêmes, bien<br />
entendu) qui subissent les conséquences de ce manque d’informations concernant des<br />
créances douteuses. En ce qui concerne la situation pointée du doigt dans le présent rapport,<br />
ce sont les populations pauvres de pays dont les dirigeants ont pillé les caisses publiques qui<br />
font les frais de l’absence de transparence. Dans les pays riches, les effets de la crise, rigueur,<br />
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