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Sans vigilance - Global Witness

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Une enquête à fort retentissement a donc été menée aux États-Unis, entraînant la<br />

désintégration d’une banque – et malgré cela, l’argent a pu s’échapper. Il s’agit là non<br />

seulement d’une situation extraordinaire, mais qui frise l’ironie – c’est le moins qu’on puisse<br />

dire –, les banques affirmant en effet jouer un rôle de facilitateurs des affaires<br />

transfrontalières. HSBC, par exemple, vante son service HSBC Premier service, destiné aux<br />

particuliers fortunés, avec le slogan « Banking without Boundaries » (pour des transactions<br />

bancaires sans frontières). 102<br />

Mais les « transactions bancaires sans frontières » ne s’étendent de toute évidence pas à la<br />

recherche de l’argent disparu. Le slogan ne vaut que si un client ou un banquier souhaite<br />

déplacer des fonds. Mais dès lors qu’il s’agit de savoir où est passé l’argent et à qui il<br />

appartient, les banques se retranchent derrière le bouclier des juridictions nationales qui<br />

s’appuient sur la force de leurs lois pour autoriser le secret bancaire. Il s’agit là d’un<br />

dysfonctionnement fondamental au cœur même du secteur financier et de son mode de<br />

régulation : l’argent peut être déplacé d’un coin de la planète à un autre instantanément et par<br />

des moyens modernes, mais des obstacles juridictionnels d’une autre époque empêchent de<br />

suivre ces mouvements après coup.<br />

Si rien n’est fait pour résoudre les problèmes associés à ce type de lois du secret bancaire, une<br />

juridiction qui tenterait à elle seule de refuser la jouissance du système bancaire à des entités<br />

corrompues échouera rapidement, car l’argent finira tout simplement par être déposé ailleurs.<br />

Conclusion<br />

La Riggs était on ne peut plus représentative d’une banque semblant ne s’appuyer sur aucune<br />

culture d’éthique pour déterminer avec quels types de régimes elle pouvait traiter. Son<br />

système de conformité s’est montré défaillant et, bien que l’établissement ait été domicilié en<br />

plein cœur du pouvoir réglementaire à Washington, les régulateurs sont restés assoupis<br />

pendant bien trop longtemps. C’est ensuite le comité législatif qui a dû mettre la situation au<br />

clair – situation qu’on ne peut que qualifier de pagaille. Cette histoire démontre que l’argent<br />

du pétrole, s’il représente des sommes colossales et qu’il atterrit dans les caisses d’un petit<br />

État à la gouvernance médiocre, peut potentiellement affecter l’appréciation des banquiers.<br />

La Riggs a sans cesse assuré à ses régulateurs que toutes ses affaires étaient en ordre, et les<br />

régulateurs, après avoir démasqué plusieurs défaillances, n’ont pris aucune mesure. En fin de<br />

compte, la vérité n’a été établie que parce que des journalistes et des ONG, dont <strong>Global</strong><br />

<strong>Witness</strong>, ont commencé à poser des questions pointues sur la destination de l’argent du<br />

pétrole équato-guinéen, ce qui a finalement incité le Sous-comité du Sénat à lancer une<br />

enquête des plus méritoires sur la banque.<br />

Maintenant que l’histoire de la Riggs a mis en évidence l’écart qui peut exister entre les<br />

paroles rassurantes et la réalité, comment les habitants désespérément pauvres de pays riches<br />

en ressources sont-ils censés faire confiance aux banques et à leurs régulateurs qui leur<br />

assurent que des procédures sont désormais en place pour prévenir le déplacement de fonds de<br />

la corruption ? On ne pourra s’empêcher de songer à la Riggs chaque fois qu’une banque<br />

affirmera disposer d’un mécanisme quelconque qui l’empêche de gérer l’argent de la<br />

corruption.<br />

Les problèmes restent toutefois d’actualité. HSBC a fait remarquer à <strong>Global</strong> <strong>Witness</strong> que les<br />

réglementations anti-blanchiment s’étaient beaucoup améliorées depuis ces événements.<br />

Certes. Mais de nombreux problèmes mis en relief dans ce chapitre n’ont toujours pas été<br />

réglés. L’incompatibilité des lois du secret bancaire avec le régime moderne de lutte contre le<br />

blanchiment fait que les enquêteurs du Sénat n’ont pas pu retrouver la trace des millions de<br />

dollars de transactions suspectes versés sur des comptes susceptibles d’être contrôlés par<br />

Obiang. On ignore si une autre enquête officielle a été ouverte.<br />

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