Sans vigilance - Global Witness
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2. La réglementation doit contraindre les banques à prendre des mesures de diligence<br />
raisonnable à l’égard de leur clientèle pour que, si elles ne peuvent ni identifier le<br />
bénéficiaire effectif des fonds, ou le constituant et bénéficiaire dans le cas d’un trust, ni<br />
une personne physique (à opposer à une personne morale) ne posant aucun risque de<br />
corruption, elles ne puissent accepter ce nouveau client.<br />
Les lois anti-blanchiment des capitaux doivent être absolument explicites et homogènes d’une<br />
juridiction à une autre, en exigeant des banques qu’elles identifient la personne physique qui<br />
se trouve derrière les fonds, qu’elles se renseignent sur la source des fonds et qu’elles refusent<br />
d’accepter le client s’il présente un risque de corruption. Les régulateurs doivent veiller à<br />
l’application de ces lois, et jouent un rôle primordial à cet égard ; ils devraient par ailleurs<br />
considérer la prévention des flux d’argent de la corruption comme une priorité.<br />
C’est bien là que se situe le scandale, en plein cœur du système, car l’identification des clients<br />
est un point clé des lois anti-blanchiment des capitaux depuis leur adoption dans les<br />
années 1980. Or plusieurs incohérences et le manque de clarté de nombreuses juridictions<br />
quant aux devoirs des banques dans la pratique font qu’il existe encore trop de vides<br />
juridiques pouvant être exploitées.<br />
S’il est important que les banques développent leurs propres politiques de connaissance de<br />
leur clientèle, conformément à la recommandation précédente, il serait vain de laisser aux<br />
banques le soin de s’y atteler seules, sans aucune surveillance, car refuser des fonds de la<br />
corruption signifie forcément décliner des affaires potentielles, ce que toutes les banques ne<br />
sont pas disposées à faire. La crise des subprimes et le resserrement du crédit qui s’en est<br />
suivi ont indiqué, entre autres, que l’autorégulation du secteur bancaire ne fonctionne pas.<br />
Elles affirment sans cesse employer les individus les plus futés au monde et donc savoir gérer<br />
leurs propres risques. Mais si, comme elles nous l’ont montré, elles n’arrivent pas à s’atteler<br />
en toute sécurité à la tâche la plus importante pour elles, à savoir la réalisation de bénéfices,<br />
on ne peut bien sûr pas s’attendre à ce qu’elles s’autorégulent lorsqu’il s’agit de questions<br />
d’ordre éthique.<br />
3. La coopération internationale doit être améliorée. Une première étape primordiale doit<br />
être la révision et la consolidation des rouages du Groupe d’action financière (GAFI), un<br />
organisme intergouvernemental opaque et méconnu qui établit la norme mondiale en matière<br />
de règles anti-blanchiment des capitaux censées empêcher les flux de fonds de la corruption.<br />
Le GAFI doit faire meilleur usage de ses pouvoirs en matière de « naming and shaming »<br />
(pratique par laquelle il peut publier le nom des entités auprès desquelles des défaillances ont<br />
été constatées), s’ouvrir davantage aux examens externes et coopérer avec d’autres<br />
organisations et organismes gouvernementaux actifs dans le domaine de la corruption.<br />
Les membres du GAFI – dont font partie les États des grandes économies du monde – doivent<br />
par ailleurs mettre de l’ordre dans leurs propres affaires avant de pouvoir faire la morale aux<br />
petits paradis fiscaux qui sont souvent la cible du Groupe. Par exemple, sur les 24 États<br />
membres du GAFI évalués au cours des trois dernières années, aucun ne se conforme<br />
entièrement à la Recommandation 5, qui exige des pays qu’ils se dotent de lois obligeant les<br />
banques à identifier leur client, et aucun ne dispose d’une législation qui soit conforme à la<br />
Recommandation 6 du GAFI, selon laquelle les pays doivent exiger de leurs banques qu’elles<br />
mettent en œuvre des mesures de diligence raisonnable normales, s’agissant de personnes<br />
politiquement exposées (PPE : hauts fonctionnaires ou parents et associés qui, en raison de<br />
l’accès aux ressources de l’État dont ils bénéficient, comportent un risque de blanchiment des<br />
capitaux plus important). Quatre pays seulement sont « largement conformes », deux sont<br />
« partiellement conformes », et dix-huit, dont le Royaume-Uni, sont non conformes. 1 (Voir le<br />
tableau page 100.)<br />
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