rapport_annuel_2012
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Rapport sur l'homophobie <strong>2012</strong> • Famille, entourage proche<br />
La parole à…<br />
Olivier Vecho<br />
L’homophobie des adolescents,<br />
un enjeu scientifique et de santé<br />
publique<br />
Au cours des années 1970, un changement majeur<br />
s’est opéré dans la façon d’aborder l’homosexualité<br />
au plan scientifique, considérée jusque-là<br />
comme une pathologie mentale et appréhendée<br />
du strict point de vue de ses « causes » et des<br />
tentatives pour la « traiter » : avec la suppression<br />
de l’homosexualité dans le Diagnostic and<br />
Statistical Manual of Mental Disorders (DSM, couramment<br />
utilisé par les professionnels de la santé<br />
mentale pour diagnostiquer les troubles mentaux),<br />
s’est développé aux États-Unis un intérêt grandissant<br />
pour les attitudes des hétérosexuel-le-s à<br />
l’égard de l’homosexualité et des homosexuel-le-s.<br />
Aujourd’hui, les études sur ce thème restent très<br />
largement nord-américaines. Pour l’essentiel elles<br />
ont été conduites auprès de jeunes adultes et<br />
d’adultes (souvent des étudiant-e-s), et les nombreux<br />
outils d’évaluation utilisés permettent<br />
diversement d’appréhender la complexité des<br />
attitudes à l’égard des gays et des lesbiennes<br />
(le plus souvent sous l’angle des croyances homophobes,<br />
et explorant rarement les émotions et les<br />
comportements négatifs à l’égard des homosexuel-le-s).<br />
Les études empiriques sur l’homophobie chez les<br />
adolescent-e-s et sur les facteurs qui influencent<br />
leur niveau d’homophobie sont peu nombreuses :<br />
elles ne représentent que 10 % environ de l’ensemble<br />
des études sur l’homophobie en sciences<br />
humaines et sociales. Les réponses actuelles à<br />
cette question restent donc très parcellaires.<br />
Pourquoi s’intéresser spécifiquement à l’adolescence<br />
? D’une part, et bien que les mentalités<br />
semblent évoluer positivement dans notre<br />
société (notamment depuis l’adoption du Pacs),<br />
parce que l’homophobie reste un vrai problème<br />
pour les homosexuel-le-s et notamment les plus<br />
jeunes d’entre eux-elles, pour qui les conséquen-<br />
ces peuvent être dramatiques du fait de leur<br />
fragilité. Par ailleurs, le milieu scolaire est propice<br />
aux manifestations de l’homophobie (les interactions<br />
entre adolescent-e-s y sont souvent peu<br />
soumises au contrôle des adultes, et les personnels<br />
de l’éducation nationale sont peu sensibilisés<br />
à la question de l’homosexualité, qui reste un<br />
sujet tabou dans le système scolaire). Ce Rapport<br />
<strong>2012</strong> sur l’homophobie en témoigne, même s’il<br />
ne donne sans doute qu’une représentation<br />
sous-estimée des manifestations d’homophobie<br />
en milieu scolaire, puisqu’il ne peut prendre en<br />
compte que les témoignages reçus par SOS<br />
homophobie. D’autre part, l’adolescence est une<br />
période transitoire intense dans le développement<br />
psychologique et social de l’individu : du<br />
fait de son développement identitaire (transformations<br />
liées à la maturation pubertaire ou<br />
encore <strong>rapport</strong> nouveau à la sexualité dont il fait<br />
progressivement l’expérience), de l’influence des<br />
normes sociales (celles de la société et celles,<br />
tout aussi fondamentales, du groupe de pairs),<br />
ou encore de son développement au plan sociocognitif.<br />
Ainsi, parallèlement aux interventions en milieu<br />
scolaire qui visent à prévenir l’homophobie chez<br />
les jeunes, il apparaît nécessaire de développer<br />
une meilleure connaissance des processus<br />
psychologiques en jeu dans le développement<br />
de l’homophobie chez les collégien-ne-s et<br />
lycéen-ne-s, et d’identifier plus précisément les<br />
facteurs socio-culturels (famille, médias, religion…)<br />
qui peuvent expliquer de façon plus spécifique<br />
l’homophobie chez les adolescent-e-s.<br />
Olivier Vecho<br />
Maître de conférences en psychologie du développement<br />
à l’Université Paris Ouest-Nanterre La<br />
Défense. Ses travaux portent sur l’homophobie<br />
chez les adolescents et sur l’homoparentalité.