Textbuch zur Auslandsakademie Afrique en ... - Cusanuswerk
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de l’<strong>Afrique</strong>, qui depuis le 16e siècle a<br />
r<strong>en</strong>du possible l’esclavage, puis la colonisation<br />
de ce contin<strong>en</strong>t et aujourd’hui <strong>en</strong>core,<br />
favorise l’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong> des relations néocoloniales,<br />
avec chaque fois les destructions humaines<br />
et culturelles dont on ne fait que comm<strong>en</strong>cer<br />
à mesurer les réelles conséqu<strong>en</strong>ces<br />
pour l’humanité. En quoi les voyages d’études<br />
d’aujourd’hui serai<strong>en</strong>t-ils, dans leurs<br />
conséqu<strong>en</strong>ces pour les étudiés, différ<strong>en</strong>tes<br />
de celles d’hier ?<br />
D’autre part, les récits des voyageurschercheurs<br />
ont, certes, permis d’acquérir<br />
quelques connaissances sur les sociétés et<br />
peuples étudiés. Pourtant, dès lors que<br />
ceux-ci étai<strong>en</strong>t <strong>en</strong> général prés<strong>en</strong>tés pas<br />
pour soi, mais dans une comparaison négative<br />
aux europé<strong>en</strong>s dont on voulait <strong>en</strong> faire<br />
soit l’ « Autre » (l’anti-modèle), soit le « petit<br />
frère », ces connaissances ne pouvai<strong>en</strong>t susciter<br />
que de la pitié chez les « bonnes âmes »<br />
europé<strong>en</strong>nes. Conséqu<strong>en</strong>ce : « Nous » ne<br />
pouvons ri<strong>en</strong> appr<strong>en</strong>dre d’« eux », mais «<br />
nous » devons tout « leur » appr<strong>en</strong>dre.<br />
Aujourd’hui <strong>en</strong>core, l’apitoiem<strong>en</strong>t des «<br />
âmes s<strong>en</strong>sibles » du Nord sur le sort « misérable<br />
» des g<strong>en</strong>s r<strong>en</strong>contrés au Sud conduit,<br />
souv<strong>en</strong>t prématurém<strong>en</strong>t, au désir de « faire<br />
quelque chose pour eux ». Mais que pouvons-nous<br />
vraim<strong>en</strong>t faire pour les autres<br />
quand nous avons <strong>en</strong>core tant de peine à les<br />
compr<strong>en</strong>dre et surtout, à nous compr<strong>en</strong>dre<br />
vis-à-vis d’eux, mieux, à compr<strong>en</strong>dre la<br />
nécessité d’une remise <strong>en</strong> cause de ce qui va<br />
de soi pour nous (de notre<br />
Selbstverständlichkeit) ainsi que de notre<br />
fatuité et nos présomptions pour une meilleure<br />
compréh<strong>en</strong>sion mutuelle ?<br />
Signaler un tel risque c’est rappeler aux<br />
jeunes qui bénéfici<strong>en</strong>t des Académies de<br />
<strong>Cusanuswerk</strong> à l’étranger la nécessité de<br />
garder à l’esprit leur assujettissem<strong>en</strong>t à une<br />
société dont ils sont les produits de par leur<br />
socialisation. Afin qu’ils réalis<strong>en</strong>t que faire<br />
quelque chose pour les « pauvres », c’est<br />
avant tout faire quelque chose sur soimême,<br />
pour se débarrasser d’une certaine<br />
vision du monde que lègu<strong>en</strong>t l’histoire et<br />
leur culture. La portée de ce propos se<br />
mesure à la réalité de ce que ces jeunes appr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t<br />
au sujet de l’<strong>Afrique</strong> p<strong>en</strong>dant leur<br />
scolarité. Or, comme nous l’appr<strong>en</strong>d une<br />
étude commanditée et publiée par la<br />
Fondation Konrad Ad<strong>en</strong>auer <strong>en</strong> Mai 2001,<br />
l’image de l’<strong>Afrique</strong> dans les livres scolaires<br />
et les médias <strong>en</strong> Allemagne est d’un misérable<br />
à sans pareil. En conséqu<strong>en</strong>ce, la t<strong>en</strong>dance<br />
est très acc<strong>en</strong>tuée que les jeunes allemands<br />
qui p<strong>en</strong>s<strong>en</strong>t à un pays africain, ou de<br />
surcroît s’y r<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t, ai<strong>en</strong>t plus <strong>en</strong> esprit ce<br />
qu’ils doiv<strong>en</strong>t faire pour ce pays et ses populations<br />
et ne saurai<strong>en</strong>t se laisser effleurer<br />
par l’idée d’y appr<strong>en</strong>dre quoi que ce fût<br />
pour leur propre formation.<br />
D’ailleurs, bi<strong>en</strong> d’africains que le voyageur<br />
r<strong>en</strong>contrera au Cameroun ont développé<br />
un comportem<strong>en</strong>t de m<strong>en</strong>dicité qui<br />
les porte trop souv<strong>en</strong>t à voir <strong>en</strong> quelqu’un<br />
europé<strong>en</strong>, soit leur « porte-parole » auprès<br />
des « amis du Nord », soit quelqu’un qui<br />
peut les « aider » à résoudre leurs problèmes<br />
de survie quotidi<strong>en</strong>ne. Ce comportem<strong>en</strong>t<br />
pourrait bi<strong>en</strong> conforter les europé<strong>en</strong>s<br />
dans leur t<strong>en</strong>dance à vouloir être les sauveurs<br />
du monde.<br />
Céder à cette t<strong>en</strong>dance pourrait contribuer<br />
à la satisfaction des att<strong>en</strong>tes égoïstes<br />
immédiates. Il faudrait certainem<strong>en</strong>t mieux<br />
que cela pour induire un changem<strong>en</strong>t favorable<br />
à l’instauration de ce nouveau type de<br />
relations Nord-Sud dont la coopération<br />
interculturelle a besoin pour l’avènem<strong>en</strong>t<br />
des rapports mutuellem<strong>en</strong>t humanisants<br />
pour les uns et les autres. Par exemple, que<br />
le principe de symétrie soit instauré et<br />
respecté. C’est-à-dire, que la possibilité de<br />
voyager ne reste plus l’unique privilège des<br />
Occid<strong>en</strong>taux ; mais que les africains ai<strong>en</strong>t<br />
aussi la possibilité de les visiter dans leur<br />
milieu de vie. De fait, les voyages culturels<br />
de formation eux-mêmes rest<strong>en</strong>t-ils le privilège<br />
des jeunes europé<strong>en</strong>s, nul doute qu’ils<br />
continueront à traiter les autres comme de<br />
« misérables » qu’il faudrait « aider ».<br />
Faut-il reprocher aux africains leur incapacité<br />
à organiser pour eux-mêmes des<br />
voyages culturels de formation ? Les barricades<br />
dont la riche Europe s’<strong>en</strong>toure depuis<br />
au moins le début des années 1990 ne sontelles<br />
pas faites pour décourager même les<br />
plus téméraires d’initiatives ? Pourquoi le<br />
<strong>Cusanuswerk</strong>, pr<strong>en</strong>ant la mesure de ses<br />
responsabilités pour l’avènem<strong>en</strong>t d’un<br />
monde meilleur pour tous, ne ferait-il pas<br />
voyager de jeunes camerounais <strong>en</strong> retour<br />
pour une Académie <strong>en</strong> Allemagne ? Visiter<br />
l’autre dans son quotidi<strong>en</strong> permet de mieux<br />
le compr<strong>en</strong>dre ; ainsi seulem<strong>en</strong>t y aurait-il<br />
une véritable compréh<strong>en</strong>sion mutuelle de<br />
ces deux groupes de jeunes. Mais n’est-ce<br />
pas rêver, que d’évoquer une telle exig<strong>en</strong>ce<br />
<strong>en</strong> ces jours où, à défaut d’avoir pu fermer<br />
hermétiquem<strong>en</strong>t ses frontières aux africains,<br />
l’Europe se peine à <strong>en</strong>fermer ceux-ci<br />
dans les frontières africaines, comme l’ont<br />
<strong>en</strong>core donné à voir les réc<strong>en</strong>tes tragédies<br />
du Maroc ?<br />
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