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L'exigence d'égalité - Rencontres Internationales de Genève

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L’exigence d’égalité<br />

cachons pas. Et pourtant elle est la plus propre à enfanter <strong>de</strong> l’inégalité, comme<br />

l’a rappelé Albert Jacquard, disant que la différence se pervertit en inégalité. Et<br />

ce glissement conceptuel malheureux tient ici à <strong>de</strong>s raisons précises, tenaces et<br />

radicalement fausses. Le passage à l’inégalité nous fait entrer dans la<br />

mythologie pure. Je vais citer trois <strong>de</strong> ces raisons, qui tiennent toutes à une<br />

science erronée.<br />

D’abord l’infériorité féminine viendrait <strong>de</strong> sa moindre résistance physique. Ce<br />

qui est aujourd’hui démenti parce que l’on a constaté son adaptabilité plus<br />

gran<strong>de</strong> aux agressions diverses, et aux maladies. Et en tout cas, sous tous les<br />

climats, sa longévité est supérieure.<br />

Deuxièmement, on imputait son infériorité à sa passivité dans la procréation,<br />

où elle était supposée ne jouer qu’un rôle <strong>de</strong> réceptacle. Je rappelle que le<br />

phénomène <strong>de</strong> l’ovulation, qui fait <strong>de</strong> la procréation un acte parfaitement<br />

symétrique, n’a été découvert qu’au début du XIX e siècle.<br />

Enfin, et surtout, son infériorité était due aux tabous <strong>de</strong> l’impureté. Là<br />

encore, le XIX e siècle a eu <strong>de</strong>s surprises ; lorsque les physiologistes ont pu p.254<br />

analyser la nature du sang féminin, ils l’ont examiné avec cette idée qu’ils<br />

allaient vérifier l’impureté <strong>de</strong> ce sang, qui n’était pas le même sang que celui,<br />

plus noble, qui sort d’une blessure virile. Surprise : c’était le même ! Grand<br />

émoi parmi la physiologie et parmi la philosophie. Michelet s’en est fait l’écho.<br />

Tout est mythique dans l’inégalité. C’est pourquoi il faut essayer <strong>de</strong> porter<br />

maintenant un regard <strong>de</strong> vérité qui va nous innocenter, nous égaliser, en finir<br />

avec ces représentations qui ont trop pesé sur nous. Car, cette science erronée,<br />

jointe à la diversité <strong>de</strong>s expériences vécues, jointe aussi aux élans <strong>de</strong> l’amour, il<br />

faut bien le dire, a entraîné un salmigondis d’images invraisemblables. Quand<br />

vous étudiez la représentation <strong>de</strong> la femme à travers la littérature, à travers les<br />

âges, à travers les mentalités, vous êtes épouvantés. Qu’est-ce que c’est qu’une<br />

femme ? D’abord ce n’est jamais une femme. C’est un démon, disent les Pères<br />

<strong>de</strong> l’Eglise. C’est un ange, répon<strong>de</strong>nt les romantiques. C’est une bête, mais allez<br />

savoir laquelle. Une poule, une grue, une tigresse, une chatte si elle aime, une<br />

vache si elle enseigne, un chameau si elle administre, une lapine si elle enfante,<br />

si elle est pieuse, une punaise <strong>de</strong> sacristie, et presque toujours une din<strong>de</strong> ou<br />

une bécasse. Un véritable zoo. Et aujourd’hui même les plus audacieuses<br />

d’entre nous sont un peu victimes <strong>de</strong> ce langage divagant. Telle, par exemple,<br />

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