Rapport final de l'étude: Remèdes juridico-institutionnels pour une ...

Il signifie que, pour ce qui concerne les redevances, le législateur peut se limiter à établir le
principe du prélèvement et habiliter l'Exécutif à en fixer les éléments constitutifs, alors que pour
ce qui concerne les impôts, le législateur doit tant en établir le principe qu'en fixer les éléments
constitutifs.
Le système d'adoption des redevances est donc plus "léger". Il importe qu'un contrôle
démocratique s'effectue au niveau de l'"idée" même de la taxe, de son existence, mais puisque la
redevance est définie, nous le verrons, comme le prix payé pour un service particulier, il est
assez logique qu'il appartienne à l'autorité chargée de délivrer ce service d'en fixer le prix.
Les autorités habilitées à établir ces redevances sont l'État fédéral et les Régions. Les Provinces
disposent d'un pouvoir autonome en la matière. Les communes semblent quant à elles avoir été
oubliées par le législateur, selon certains auteurs. Vu la formulation actuelle de l'article 173 de la
Constitution, il semblerait qu'elles ne puissent prélever des redevances que si une loi leur en
donne le pouvoir (comme la nouvelle loi communale, par exemple et, comme nous le verrons ciaprès,
la loi du 22 février 1965 qui autorise les conseils communaux à établir des redevances de
stationnement applicables aux véhicules à moteur). En pratique cependant, bien des taxes sont
établies ab nihilo par le Conseil communal, sans que celui-ci ne se préoccupe de savoir s'il agit
en matière d'impôts ou de redevances. Cette pratique serait en réalité conforme à la ratio legis
de l'article 173, le but de la disposition étant de verrouiller le principe du consentement à
l'établissement des charges publiques. Le vote des rétributions par le Conseil communal offrirait
dès lors des garanties suffisantes à ce point de vue 93 .
Nous en arrivons donc à la conclusion que tant l'État fédéral que les régions, les provinces et les
communes peuvent établir des redevances, par l'entremise de leurs assemblées législatives. Les
éléments constitutifs de la redevance, tels que son montant, pourront être fixés par les Exécutifs
concernés, si la loi, le décret, l'ordonnance ou la décision du conseil communal le prévoient.
Quels sont les domaines d'intervention respectifs des autorités publiques?
B. Caractéristiques des redevances et compétences matérielles
L'État, les entités fédérées et les communes ne peuvent prévoir des rétributions que dans les
matières qui ressortissent à leurs compétences respectives puisque, par définition, la rétribution
sert à rémunérer le service qu'ils rendent à un particulier 94 .
En effet, afin de mériter leur qualification de "redevance", les prélèvements concernés doivent
être dénués de toute connotation fiscale et répondre aux critères suivants :
- avoir un caractère rémunératoire : la rétribution est due en contrepartie d'un service particulier
et le montant est équivalent au coût du service rendu ou présente à tout le moins un rapport
raisonnable avec l'intérêt du service presté (voir notamment CCass, 10 septembre 1998,
J.L.M.B., 1999/4, pp.140 et sv., note F.Dembour).
- il faut que le service rendu soit personnel et particulier; une taxe sur les trottoirs est par
exemple un impôt, car elle est prélevée au profit de la collectivité, même si elle correspond au
coût réel des travaux.
93 Idem
94 Voy. R. Andersen et P. Nihoul, "Le Conseil d'Etat - chronique de jurisprudence 1994 (première partie)",
R.B.D.C., 1995, p. 203; E. Willemart, op.cit., p. 11.