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Grands aménagements urbains et prise en compte des ...

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systématique à partir du milieu de 1856 85 . Il est probable que le décr<strong>et</strong> sur l‟interdiction du pisé a<br />

<strong>en</strong>couragé c<strong>et</strong>te pratique, toutes les constructions nouvelles lui étant soumises. L‟autorité publique a<br />

ainsi un regard sur les intérieurs d‟îlots, les plus problématiques du point de vue de l‟ordre public.<br />

Il s‟agit, d‟une grande nouveauté du point de vue du droit de l‟urbanisme, jusqu‟ici limité aux parties<br />

donnant sur l‟espace public de la voirie.<br />

Une fois les îlots ou parties d‟îlots débarrassés <strong>des</strong> constructions existantes, le parcellaire déterminé<br />

par les baux échus est <strong>en</strong> général effacé. La nouvelle configuration, appelée « îlots à cour commune »<br />

par A.-S. Clém<strong>en</strong>çon <strong>et</strong> « cour unique » dans les textes contemporains, pr<strong>en</strong>d la forme d‟immeubles à<br />

une seule épaisseur formant un front continu le long <strong>des</strong> rues <strong>en</strong>tourant l‟îlot <strong>et</strong> réservant tout l‟espace<br />

résiduel au c<strong>en</strong>tre, souv<strong>en</strong>t vaste voire très vaste, pour un usage commun de récréation. Une vingtaine<br />

d‟îlots, parmi lesquels 13 <strong>en</strong>tièrem<strong>en</strong>t, ont ainsi été recomposés selon c<strong>et</strong>te contrainte (Clem<strong>en</strong>çon<br />

1999, ill. 180).<br />

Les origines de c<strong>et</strong>te disposition ne sont pas explicitées dans les abondantes sources dépouillées par<br />

A.-S. Clém<strong>en</strong>çon qui s‟attarde longuem<strong>en</strong>t sur c<strong>et</strong>te question, avec quelque perplexité 86 . Il faut<br />

signaler cep<strong>en</strong>dant un antécéd<strong>en</strong>t important, l‟immeuble du Parc, construit près de la place <strong>des</strong><br />

Terreaux sur un îlot appart<strong>en</strong>ant aux Hospices (permis de construire du 8 février 1859, AML 315 WP<br />

002, rue d‟Algérie, Massif de l‟Hôtel du Parc), où l‟on avait déjà établi un immeuble avec une cour<br />

unique sur un îlot rasé. Comm<strong>en</strong>t se fait-il que c<strong>et</strong>te forme urbaine étonnamm<strong>en</strong>t « moderne » par<br />

l‟espace vert ainsi dégagé <strong>en</strong> cœur d‟îlot ne fasse jamais l‟obj<strong>et</strong> d‟exposés de la part <strong>des</strong> Hospices,<br />

qu‟on ne m<strong>et</strong>te pas <strong>en</strong> avant ces qualités ? La raison à c<strong>et</strong>te abs<strong>en</strong>ce réside très probablem<strong>en</strong>t dans<br />

l‟objectif recherché. En eff<strong>et</strong>, il est évid<strong>en</strong>t que si l‟on avait p<strong>en</strong>sé apporter un progrès significatif dans<br />

la façon de <strong>des</strong>siner l‟espace bâti <strong>et</strong> le rapport <strong>en</strong>tre les espaces vi<strong>des</strong> <strong>et</strong> les pleins, on l‟aurait clamé <strong>et</strong><br />

dit haut <strong>et</strong> fort. Ce qui nous apparaît donc comme un progrès n‟a donc pas été p<strong>en</strong>sé comme tel <strong>et</strong><br />

personne ne semble <strong>en</strong> avoir eu consci<strong>en</strong>ce. En fait, il semble que l‟objectif recherché ait été multiple.<br />

Il est évid<strong>en</strong>t qu‟on apporte ainsi air <strong>et</strong> lumière, dans une logique hygiéniste, aux immeubles, mais il<br />

s‟agit aussi d‟empêcher que ne réapparaiss<strong>en</strong>t au coeur <strong>des</strong> îlots reconstruits les activités artisanales <strong>et</strong><br />

industrielles qui s‟y trouvai<strong>en</strong>t nombreuses auparavant 87 , ni les tares sociales rassemblées <strong>en</strong> leur<br />

c<strong>en</strong>tre : prostitution, activités répréh<strong>en</strong>sibles, insalubrité. On peut p<strong>en</strong>ser, <strong>en</strong> outre, que l‟apparition <strong>des</strong><br />

autorisations de construire pour les bâtim<strong>en</strong>ts <strong>et</strong> murs <strong>en</strong> intérieur d‟îlot a donné à réfléchir sur ce qui<br />

pourrait ou devrait s‟y passer, développant la consci<strong>en</strong>ce d‟un espace jusque là peu p<strong>en</strong>sé, voire tout à<br />

fait imp<strong>en</strong>sé, <strong>en</strong> terme d‟urbanisme. Ainsi, l‟espace c<strong>en</strong>tral constitue-t-il une propriété distincte de<br />

celui dédié aux immeubles, <strong>et</strong> est-il frappé de fortes contraintes quant à son usage. De fait, il est <strong>en</strong>core<br />

de nos jours interdit d‟accès aux personnes n‟habitant pas autour, <strong>et</strong> d‟un usage extrêmem<strong>en</strong>t limité.<br />

En bref, les cours communes sont vraisemblablem<strong>en</strong>t d‟abord <strong>des</strong> espaces interdits, vi<strong>des</strong>, par peur<br />

que ne s‟y développ<strong>en</strong>t <strong>des</strong> pratiques condamnées, un peu comme on avait réservé le cœur du quartier<br />

ouvrier rasé par la rue de la République pour une place 88 . Nul besoin de parler de c<strong>et</strong> interdit, l‟accord<br />

est tacite <strong>en</strong>tre les parties concernées, du moins dans les textes 89 .<br />

Il est aussi probable que c<strong>et</strong>te configuration pr<strong>en</strong>ne place dans un débat qui naît, semble-t-il, au milieu<br />

du siècle, sur la possibilité pour la puissance publique de légiférer sur les dispositions intérieures <strong>des</strong><br />

85 1 er acte à m<strong>en</strong>tionner une maison non à l‟alignem<strong>en</strong>t : 2 avril 1855, AML 315 WP 104.<br />

86 Des exemples tout à fait comparables exist<strong>en</strong>t à G<strong>en</strong>ève, avec par exemple les 11 immeubles du square du<br />

Mont-Blanc achevés <strong>en</strong> 1859 autour d‟un square, <strong>et</strong> de nombreux îlots de la ceinture fazyste, par exemple rue de<br />

Candole <strong>et</strong> au Rond-Point de Plainpalais à la fin <strong>des</strong> années 1850 (Barbey <strong>et</strong> al. 1982, p. 360 ; p. 372-3). De<br />

même à Marseille certains îlots du quartier de la Joli<strong>et</strong>te comport<strong>en</strong>t une cour c<strong>en</strong>trale vers 1866 (Graff 1996, p.<br />

189).<br />

87 Les autorisations de construire port<strong>en</strong>t pour près de la moitié sur <strong>des</strong> installations industrielles <strong>et</strong> artisanales<br />

jusque dans les années 1870. Elles sont très rares <strong>en</strong>suite dans le secteur pour ces mêmes fonctions.<br />

88 Elles constitu<strong>en</strong>t aujourd‟hui <strong>en</strong> quelque sorte une réserve archéologique, <strong>en</strong> ce s<strong>en</strong>s que ce sont pratiquem<strong>en</strong>t<br />

les seuls <strong>en</strong>droits où il est possible de r<strong>et</strong>rouver <strong>des</strong> traces matérielles de l‟occupation du quartier antérieure à sa<br />

rénovation, <strong>et</strong> correspondant à la phase de sa colonisation <strong>en</strong>tre 1855 <strong>et</strong> 1865.<br />

89 On <strong>en</strong>traperçoit aussi une dim<strong>en</strong>sion esthétique dans la très courte argum<strong>en</strong>tation portée par l‟architecte<br />

Bissuel pour la cour unique à l‟angle sud-ouest de la rue V<strong>en</strong>dôme <strong>et</strong> dur cours Lafay<strong>et</strong>te, lorsqu‟il écrit :<br />

« Toutes ces maisons doiv<strong>en</strong>t être sur une vaste cour unique, il est naturel de les faire sur le même plan de<br />

hauteur » (AML 315 WO 105, 9 juill<strong>et</strong> 1891).<br />

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