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Grands aménagements urbains et prise en compte des ...

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“Mlle Yv<strong>et</strong>te Guilbert vi<strong>en</strong>t de nous quitter après avoir obt<strong>en</strong>u au Casino un succès<br />

étourdissant. Tout Lyon s’est empressé d’applaudir la div<strong>et</strong>te Yv<strong>et</strong>te <strong>et</strong> ce sont Ô ironie! les<br />

familles les plus bégueules <strong>et</strong> les mieux p<strong>en</strong>santes de l’aristocratie lyonnaise qui l’ont<br />

“ovationnée” avec le plus d’<strong>en</strong>thousiasme...<br />

(...) Le meilleur tal<strong>en</strong>t de Mlle Guilbert consiste à dire tranquillem<strong>en</strong>t, <strong>et</strong> sans avoir l’air d’y<br />

toucher, les gaillardises les plus énormes. Disons le mot, son répertoire est carrém<strong>en</strong>t<br />

pornographique. (...) Seulem<strong>en</strong>t, me plait de voir les salons de Bellecour, si coll<strong>et</strong> montés <strong>et</strong> si<br />

puritains d’appar<strong>en</strong>ce, se ruer à ces plaisirs plus que rabelaisi<strong>en</strong>s” 140<br />

.<br />

Dans “Un bouge” l‟anarchiste Antoine Cyvoct décrit le théâtre Bellecour :<br />

“On y voit surtout après minuit la fine fleur de la bourgeoisie <strong>et</strong> du commerce ... le premier<br />

acte de la révolution sociale devra être de détruire ces repaires” 141<br />

.<br />

C<strong>et</strong>te dernière phrase lui vaudra d‟être arrêté <strong>et</strong> accusé de l‟att<strong>en</strong>tat qui eut lieu dans la nuit du 22 au<br />

23 octobre 1882 au restaurant du Théâtre-Bellecour, surnommé “L‟Assomoir”. La bombe qui y<br />

explosa fit un mort <strong>et</strong> deux blessés ainsi que <strong>des</strong> dégâts considérables. Il faut signaler, qu‟une partie de<br />

la bonne société, les ultra catholiques, ne fréqu<strong>en</strong>te pas les théâtres considérés comme <strong>des</strong> lieux de<br />

perdition, qualifiés de “tombeaux de la piété” 142<br />

. Certains notables boud<strong>en</strong>t ces lieux par hantise du<br />

brassage socia l:<br />

“Calixte avait eu la précaution de me prév<strong>en</strong>ir que la société y était bi<strong>en</strong> mêlée, mon cher,<br />

bi<strong>en</strong> mêlée! Une société de ce g<strong>en</strong>re ne pouvait nous conv<strong>en</strong>ir.” 143<br />

Les conflits d‟usage sont peu importants. Il y a bi<strong>en</strong> <strong>des</strong> plaintes pour tapage nocturne dont certaines<br />

sont <strong>en</strong> réalité déposées par <strong>des</strong> limonadiers concurr<strong>en</strong>ts 144<br />

.Telle c<strong>et</strong>te réclamation adressée par les<br />

caf<strong>et</strong>iers de la ville à la préfecture de police du Rhône <strong>en</strong> 1866, expliquant que la demande de sieur<br />

Dupoizat, limonadier, de construire un kiosque à musique sur la place ne doit pas être satisfaite car<br />

c<strong>et</strong>te construction leur ferait une concurr<strong>en</strong>ce déloyale 145<br />

.<br />

Une moralisation du lieu<br />

A partir de la seconde moitié du 19è siècle, on assiste à une moralisation du lieu à relier aux<br />

changem<strong>en</strong>ts opérés dans son <strong>en</strong>vironnem<strong>en</strong>t: A la percée de la rue Impériale, il faut ajouter<br />

l‟élargissem<strong>en</strong>t de la rue de la Barre <strong>en</strong> 1868 <strong>et</strong> la <strong>des</strong>truction <strong>des</strong> maisons, du côté est de la rue<br />

Bourgchanin. La refonte ou “régénération” du c<strong>en</strong>tre de Lyon, symbolisée par la percée de la rue<br />

Impériale (1854), est voulue par les classes dirigeantes <strong>et</strong> par le pouvoir politique pour <strong>des</strong> raisons<br />

sécuritaires, politiques <strong>et</strong> économiques. Il s‟agit de réprimer les émeutes (les insurrections ouvrières<br />

de 1831 <strong>et</strong> 1834 sont <strong>en</strong>core dans les esprits du pouvoir politique), de garder à l‟immobilier sa valeur<br />

<strong>et</strong> éviter ainsi le déplacem<strong>en</strong>t d‟une partie de la bourgeoisie vers la rive gauche du Rhône ou <strong>en</strong>core de<br />

chasser du c<strong>en</strong>tre ville une population ouvrière considérée comme dépravée <strong>et</strong> pot<strong>en</strong>tiellem<strong>en</strong>t<br />

dangereuse. On nous parle d‟une “population dégradée par la misère, l‟insalubrité <strong>et</strong> le vice qui fait<br />

fuir les étrangers <strong>et</strong> les locataires fortunés” 146<br />

. Ou <strong>des</strong> “problèmes de police du quartier <strong>et</strong> de scènes<br />

infâmes” qui s‟y produis<strong>en</strong>t la nuit 147<br />

.<br />

140 Le Progrès illustré, 22 mai 1892.<br />

141 Le droit social, 12 mars 1882.<br />

142 La Congrégation <strong>des</strong> Messieurs de Lyon, voir Catherine Pélissier, op. cit. p. 204.<br />

143 Ibid., p. 205.<br />

144 AML 321 WP 022.<br />

145 AML 321 WP 022.<br />

146<br />

Monmartin, Revue du Lyonnais, 1845. Cité par Saunier P.-Y., Lyon au XIXe siècle: les espaces d’une cite,<br />

thèse de doctorat, 1992, p. 822.<br />

147<br />

Arch. Nat. F2 II Rhône 5, rapport du maire du 21 janv. 1847. Cité par Saunier P-Y, Ibid., p. 818.<br />

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