La Femme De Papier

contre ses hanches. Les attaches cèdent avec une facilité
préméditée. Le cordon était si tendu qu’au moment où il
se rompt, on voit se dresser une fraction de seconde deux
minuscules serpents rouges qui fouettent l’air, et puis tout
tombe, la cordelette et l’étoffe incarnates.
Le danseur, désormais totalement nu, entame une
série de bonds frénétiques et comme il nous tourne le dos,
nous pouvons entrevoir, entre ses cuisses musclées, sous
ses fesses de statue, une impressionnante paire de couilles
brunes qui voltigent comme les battants d’une cloche
folle.
L’autre, qui nous fait face, succombe ostensiblement à
une théâtrale hypnose : la prunelle arrondie et la bouche
entrouverte qui parodient l’effroi, il garde les yeux fixés,
tout en continuant à se trémousser, sur le bas du ventre
de son partenaire, sur cette bite que nous ne voyons
toujours pas mais que nous devinons farouche et
étonnante.
L’attente dure, savamment orchestrée… Je ne suis pas
loin de me laisser aller, moi aussi, à la fascination : une
fascination plus discrète, mais plus sincère que celle du
comédien, au pubis duquel éclate encore la fleur écarlate
d’un érotique flamboyant. Je contemple, à quelques
centimètres seulement de notre table, les épaules
miroitantes d’un athlète d’ébène, les muscles ronds qui
roulent dans son dos au rythme des tam-tams, ses fesses
altières, nerveuses, ses jambes infatigables, et ses couilles
somptueuses, impudiques, insolentes, accessibles à hurler
parce qu’il s’ingénie à des mouvements accueillants et
lubriques, cuisses ouvertes, croupe tendue… Si j’allongeais