La Femme De Papier

À l’intérieur de mes cuisses, tu consignas : « Cuisses : à
écarter pour baiser. L’entrée est par là. » Et j’eus droit à
de nouvelles flèches, ascendantes, celles-ci. De
dictionnaire je devenais peu à peu mode d’emploi. Je
redoutais le fameux « Agiter avant de s’en servir », mais
trop tard, tu me retournais déjà, m’arrachant mon unique
vêtement (si l’on pouvait appeler ainsi le léger voile
chiffonné qui ne me couvrait presque plus) pour
barbouiller mon dos et mes fesses.
Là, le gamin (ou l’artiste ?) qui dormait en toi se
réveilla tout à fait : je me sentis zébrée de grandes lignes,
et je crois que j’étais plus, sur le côté pile de ma personne,
une carte routière qu’aucun autre document. L’itinéraire
que tu recommandais était direct et sans détour. Il
descendait brutalement de ma nuque à mes fesses, et du
sommet de mes fesses s’insinuait en plusieurs chemins
possibles, mais de longueur égale, dans ma vallée intime.
Si l’on voulait partir de mes jambes, du creux de mes
genoux, par exemple, la route à suivre était aussi
franchement tracée : un grand trait jusqu’au pli de la
fesse, et un plus petit (une sorte de sentier forestier) pour
remonter jusqu’au point de rendez-vous. Stevenson, en
écrivant L’Île au trésor, avait fait preuve de moins de
ferveur, de moins d’imagination que toi, qui étais en train
d’entourer, d’un cabalistique signe à l’encre noire,
l’endroit où aboutissaient tous tes parcours : mon cul, que
je crispais sous l’agression car, décidément, la pointe de
ton feutre se faisait bien autoritaire…
Et puis, tu décidas d’égayer un peu ces pages trop
sombres que tu venais de noircir d’un crayon monotone.