La Femme De Papier

manche, la position toute particulière du pouce qui fignole
le mouvement, je veux ta grimace concentrée, ta fièvre
solitaire qui au dernier moment te jette vers moi ; tu te
pends à mon cou de ta main innocente, tandis que l’autre
échappe désormais à ton contrôle dans sa course
frénétique ; tu te pends à mon cou pour m’inviter,
m’associer, me remercier… Comme tu es lourd au
moment où tu jouis, comme tu es vivant et magnifique, et
comme je t’aime de m’aimer assez pour être simple, et
homme, et pour dire : « C’est la première fois que je fais
ça pour quelqu’un !… » Ô formule grisante : « la première
fois » ! Car parmi toutes mes exigences, parmi toutes mes
banalités, il y en a encore une, impossible, utopique,
enivrante : être la première, la première quelque part
pour toi, la première et la seule peut-être, la plus, la
moins, la superlative, celle qui éclipse de sa présence et de
ses mots, de son amour et de sa ferveur, toutes les
autres…
La nuit n’est pas finie et nous divaguerons encore
longtemps, désormais résignés à notre triste sort de
débauchés qui s’aiment. La bougie brûle, symbole d’une
éloquente fragilité, mais, protégé du vent, si tenace… Je
brûle avec elle et ma flamme n’est pas moins fervente. Tu
parles encore, et c’est la fête en mon cœur. Tu parles et tu
m’émeus, de tes mots simples et sans promesse, de tes
phrases au passé, et de ton soin touchant à ne jamais
conjuguer le futur…
La seule vision d’avenir que tu m’as proposée est
restée gravée dans ma mémoire comme la plus
bouleversante de toutes tes confessions. « Il ne faudra pas