La Femme De Papier

quand ? » t’entends-je penser et je me joins
mutuellement à ton attente. D’un index renseigné, elle
répond, tout aussi tacitement, à notre question. Ah ! le
dialogue est concis ! On n’est pas dans un film de Cocteau,
il s’en faut ! Espérons que l’action, au moins, compensera
la bande-son défaillante.
L’ongle laqué d’incarnat qu’elle a pointé sans l’ombre
d’une hésitation désigne une petite pièce attenante, une
sorte de réduit ouvert, mais discret, assez sombre, intime,
gardé par un semblant de rideau et étouffé d’épaisses
fougères. Il n’y a pas à barguigner, c’est là et tout de suite.
Bref coup d’œil de connivence entre nous : Chiche ! Et
nous lui emboîtons le pas.
Dans l’alcôve, derrière le feuillage des plantes vertes, il
y a une penderie dont les cintres vides nous rassurent sur
le peu de passage dans les lieux, un gros porte-parapluies
de cuivre également désert, et une sorte de fontaine de
salon, à la robinetterie compliquée. On se croirait dans le
vestiaire d’un hôtel chic.
Notre hôtesse, qui semble bien connaître l’endroit,
attrape d’un prompt coup de patte le gland de l’embrasse
qui retient le rideau. Nouveau regard de complicité : « Tu
as vu ? — Oui, plutôt bon signe ! » Le rideau, libéré,
masque à présent les trois quarts de l’accès au cagibi, qui
s’est encore obscurci. Nous voici tous les trois dans
l’étroite et chaude pénombre d’un cabinet de trois mètres
de côté, abrité des regards indiscrets par le brocard d’une
portière qui sent un peu la poussière et l’antimite.
Cette atmosphère me grise. Mais pas question de
m’abandonner aux délices de l’ambiance : notre