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CONFÉRENCE<br />
De la langue des physiciens, ce mot a passé à la langue des biologistes<br />
sous l’influence de Geoffroy Saint-Hilaire dont une des<br />
idées dominantes était de transporter à l’étude des êtres vivants les<br />
procédés et les concepts en usage dans la physique et la chimie. Il<br />
disait d’habitude en ce sens, « milieu ambiant » 47a .<br />
Il s’est introduit ensuite dans le langage des sciences morales<br />
par deux voies indépendantes. Auguste Comte, qui l’avait<br />
emprunté au naturaliste Blainville, en a fait un fréquent usage.Voir<br />
notamment Cours de philosophie positive, leçon XL, 13 et suiv.<br />
« Milieu » y est imprimé d’abord en italiques, et n’est employé<br />
qu’après une explication préalable de l’idée qu’il représente. —<br />
D’autre part, Taine, qui a plus que tout autre vulgarisé ce terme,<br />
l’avait emprunté à l’Avant-propos de la Comédie Humaine de Balzac<br />
(1841) 48 où celui-ci assimile la société à la nature et les variétés indi-<br />
47a Cf. la lettre de George Sand (1835) citée par Baldensperger, Le franc.<br />
mod., VI, 253 : « Tout, dans les choses extérieures (dans le monde<br />
ambiant, comme disait Geoffroy Saint-Hilaire), m’appelait à cette vie ».<br />
48 Des années avant son invention du terme sociologique milieu (une<br />
invention, selon Berthelot, indépendante de celle de Comte), Balzac<br />
emploie le mot en un sens très différent : dans l’extrait de Louis Lambert<br />
(1822) qui suit où il décrit le système psycho-physique de son protagoniste,<br />
milieu est employé pour désigner le siège de l’activité cérébrale :<br />
À des idées nouvelles, des mots nouveaux ou des acceptions de mots<br />
anciens élargies, étendues, mieux définies ; Lambert avait donc choisi,<br />
pour exprimer les bases de son système, quelques mots vulgaires qui<br />
déjà répondaient vaguement à sa pensée. Le mot de VOLONTÉ servait<br />
à nommer le milieu où la pensée fait ses évolutions ; ou, dans une<br />
expression moins abstraite, la masse de force par laquelle l’homme<br />
peut reproduire, en dehors de lui-même, les actions qui composent sa<br />
vie extérieure. La VOLITION, mot dû aux réflexions de Locke, exprimait<br />
l’acte par lequel l’homme use de la volonté. Le mot de PENSÉE,<br />
pour lui le produit quintessentiel de la volonté, désignait aussi le milieu<br />
où naissaient les IDÉES auxquelles elle sert de substance. L’IDÉE,<br />
nom commun à toutes les créations du cerveau, constituait l’acte par<br />
lequel l’homme use de la pensée. Ainsi la volonté, la pensée, étaient les