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CONFÉRENCE<br />
fiée du milieu (ambiant)* biologique. Lorsque ce terme s’est appliqué<br />
à l’humanité, cette même idée y a été rattachée en dépit de<br />
Taine, par le peuple et les poètes : « l’habitant et la coquille,<br />
l’homme et le milieu ».<br />
Naturam expellas furca, tamen usque recurret. Et véritablement,<br />
la récurrence de ce concept est due à la nature — notre nature<br />
humaine : il semble qu’il y ait en son fond une Urgedanke émanant<br />
d’un Urgefühl, une idée-mère* née avec l’homme — une projection<br />
du sentiment de l’enfant dans sa coquille, protégé comme<br />
il l’est dans l’utérus maternel. Ce fut ce même sens, salutaire, qui<br />
amena Goethe un jour à défier la cosmologie de Newton en projetant<br />
son sentiment de protection à tout l’univers lui-même.<br />
Aujourd’hui, l’homme se satisfait d’un récipient plus modeste,<br />
qui n’a pas besoin d’être tout-protecteur tant qu’il peut se sentir<br />
« à sa place » quelque part dans ce monde moderne chaotique et<br />
complexe 76 .<br />
76 Karl Jaspers a prophétiquement défini en 1931 « die geistige Situation<br />
der Zeit » comme essentiellement « ungeborgen » (« sans<br />
défense ») ; de manière significative, son livre a été traduit en espagnol<br />
par Ramón de la Serna sous le titre « Ambiente espiritual de nuestro<br />
tiempo » (1939) — de sorte que ce qui devrait soi-disant nous protéger<br />
(ambire, √|ƒ§Ä¤|§μ) se caractérise par un défaut de protection.