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MILIEU ET AMBIANCE.

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CONFÉRENCE<br />

ment non-scientifique est plus éloigné encore, si faire se peut, du<br />

sens du medium newtonien. Pourtant, c’est justement cet emploi<br />

moraliste de milieu*, en un sens, qui peut éclairer sa dernière évolution<br />

: le lien entre le mot latin et le mot français que les humanistes<br />

avaient établi (s’il n’y en a qu’un) ne pouvait être défait :<br />

une équivalence medium = milieu* était devenue possible, qui allait<br />

être exploitée dans quelque champ de recherche qu’on voulût 45 .Il<br />

se trouve que ce champ de recherche fut la science.<br />

45 À vrai dire, le mot français dont l’évolution fut telle qu’il put fournir<br />

l’équivalent le plus proche du Medium de Newton fut (le) moyen. Ce terme,<br />

à l’origine adjectival (medianus) possédait depuis le début, et contrairement<br />

à milieu, une idée exclusivement « intermédiaire » dans la mesure où<br />

l’on pouvait le distinguer de l’idée de milieu que proposait medius : en<br />

latin post-classique, medianus mons (= « la montagne au milieu ») pouvait<br />

servir à distinguer, par différence, medius mons (= « le milieu de la montagne<br />

»). Pour une étude d’expressions telles que medius [summus, inferior,<br />

etc.] mons, cf. Sommer, Zum attributiven Adjektivum, Münchner Sitzungsberichte,<br />

1938. L’idée « intermédiaire » de medianus s’est prolongée en ancien<br />

français avec moyen, et la forme substantivée évolua progressivement vers<br />

une interprétation fonctionnelle : « moyen », « véhicule » (moyen de communication*).<br />

Que ce mot ait été négligé, et que milieu ait été préféré semblerait<br />

suggérer que la correspondance, établie de longue date arbitrairement<br />

entre le latin medium et le français milieu, restait présente à l’esprit<br />

des savants. — Cependant, une autre raison a très bien pu travailler<br />

contre le choix de moyen, c’est sa trop franche connotation fonctionnelle.<br />

Une telle connotation en effet, toujours latente chez Newton, avait été<br />

réduite au point que medium pouvait être régulièrement traduit par « élément<br />

» ; pour la même traduction moyen, avec sa tonalité exclusivement<br />

fonctionnelle, pouvait sans doute difficilement servir. — Quant aux mots<br />

français plus tardifs renvoyant à l’idée d’« intermédiaire », intermède fut le<br />

premier à apparaître, et était réservé spécifiquement pour désigner<br />

l’« entracte* », et fut de ce fait mis hors circuit. Les mots intermédiaire,<br />

intermédiat, créés au dix-septième siècle, entrèrent dans la langue beaucoup<br />

trop tard pour défier milieu, lequel possédait l’avantage d’un profond<br />

enracinement ainsi qu’une variété de significations en réserve : le<br />

proverbe « on ne prête qu’aux riches* » se vérifie aussi en linguistique.

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