MILIEU ET AMBIANCE.

LEO SPITZER
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Il serait intéressant d’imaginer que l’ambiance (des milieux)*,
une fois créé, ait pu briser son lien syntaxique et son association
spirituelle avec le milieu* technique, autorisé par son suffixe à une
existence indépendante, et débarrassé de ses connotations âpres
par le fait qu’il représentait une essence — et une essence est toujours
spirituelle. Ainsi, on peut le considérer comme une
depuis le Faust de Goethe, dans un passage qui décrit l’atmosphère
particulière de la chambre de Gretchen : Méphistophélès, évaluant la
probable influence sur Faust de la sensuelle atmosphère du lit de Gretchen,
crée les vapeurs qui plus tard feront prisonnier le « sinnlichübersinnlicher
Freier » :
Sie (= Gretchen) wird bei einer Nachbarin sein.
Indessen könnt Ihr ganz allein
An aller Hoffnung künftiger Freuden
In ihrem Dunstkreis satt Euch weiden
Sur l’emploi méraphorique de Dunstkreis et de Atmosphäre, cf. Schulz (-
Baseler) (il cite par exemple le Noah de Bodmer : Atmosphär des Stern ;
dans le même ouvrage, on trouve aussi Dunstkreis der Erde, Luftkreis um
den Kometen, et même Dunstmeer, welches die Sonn’aus ihn [la comète]
herauszieht) ; en général, Dunstkreis semble en être arrivé à contenir un
sens plus péjoratif qu’Atmosphäre (bien que, au temps de Herder,
Atmosphäre fût plutôt péjoratif : « [die Muse] hat sich aus der Sphäre des
Lebens in die Atmosphäre der Katheder versezt ») : par exemple der Dunstkreis
der Politik suggère les vapeurs méphitiques des troubles intrigues.
Cependant Atmosphäre ne s’accorde pas avec le mot français ni
anglais ; c’est plutôt Stimmung (ce mot intraduisible) qui comporte
l’évocation et la large référence qu’atmosphère a acquises dans ces
langues. — J’ai lu qu’un café à Caracas, fréquenté par des émigrés allemands,
portait le nom de Café Atmósfera : je me demande si ce nom
n’est pas un pauvre ersatz de Café Stimmung. D’un autre côté, le mot
Atmosphäre était employé dans le monde du cinéma allemand et renvoyait
aux figurants qui assuraient l’arrière-plan historique d’un film
(par ex., A. Polgar, Schwarz auf Weiss, Berlin, 1929 : « Statisterie der