MUSIQUES ACTUELLES et JEUNE PUBLIC - Petit Faucheux
MUSIQUES ACTUELLES et JEUNE PUBLIC - Petit Faucheux
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2.- En second lieu, si l’on ne se place plus du côté institutionnel, mais du côté de<br />
l’enfant <strong>et</strong> de l’adolescent, il n’est pas certain que ce dernier soit toujours favorable à ce qu’on<br />
emprunte son langage, lequel est une façon de marquer son territoire, son identité par rapport à<br />
un monde adulte. Une analyse du journal Le Monde sur la mode a été fort intéressante à c<strong>et</strong><br />
égard, montrant que certaines mères voulant s’habiller « jeune » comme leurs filles en adoptant<br />
les mêmes marques en vogue ne se rendaient pas compte que subrepticement, ces filles, pas<br />
dupes, trouvaient le moyen de manifester leur différence à l’insu de ces mères par des p<strong>et</strong>its<br />
signes repérées d’elles seules. Autrement dit, il y a des emprunts qui sonnent faux, des<br />
copinages qui sentent le Disneyland plus que le Goscinny : c’est le droit des artistes de faire<br />
leur choix, mais le fait que « ça marche » au cours d’un spectacle dans une atmosphère de foule<br />
n’est pas nécessairement le signe d’une rencontre authentique.<br />
Plus largement, l’usage de l’argot n’est pas innocent, <strong>et</strong> il a vite fait de sonner faux quand il est<br />
hors contexte. Le contexte, en l’occurrence, c’est une connivence entre celui qui parle <strong>et</strong> celui<br />
qui reçoit. On n’est pas “connivent” par simple décision, <strong>et</strong> encore moins par procuration.<br />
Quand en outre il s’agit de gros mots, ou plus précisément d’évocations plus ou moins<br />
scatologiques pour faire droit à la période anale de l’enfant, on peut se demander en quoi de tels<br />
propos peuvent avoir un réel intérêt pour lui dans le temps d’une chanson entre une histoire de<br />
papillon amoureux <strong>et</strong> une dénonciation de la guerre.<br />
La surchauffe<br />
- « Est-ce que vous êtes bien ?<br />
- Ouiiiiiiiii !<br />
- J’entends rien. Est-ce que vous êtes bien ?<br />
- OUIIIIIIII !<br />
- J’ai l’impression que c<strong>et</strong>te salle est vide. Est-ce que vous êtes vraiment bien ?<br />
- OUIIIIIII ! »<br />
C’est le genre d’adresse qui obtient son eff<strong>et</strong>, qui créée une ambiance, <strong>et</strong> qui est parfois<br />
nécessaire pour réveiller une salle endormie, distraite, ou pour induire une transition annonçant<br />
une invitation à donner de la voix après une période recueillie.<br />
Donner de la voix... Justement l’indicateur d’une réelle complicité entre le chanteur <strong>et</strong> le public,<br />
est souvent le niveau sonore selon lequel les enfants reprennent en chœur le refrain. Plus c’est<br />
fort, plus grande est la participation. C<strong>et</strong>te collusion entre intensité <strong>et</strong> qualité ne laisse pas de<br />
surprendre si l’on s’intéresse à autre chose qu’à l’embrasement d’une foule toujours prête à<br />
suivre le premier tribun ayant un peu de savoir-faire pour la solliciter par les canaux qui la<br />
flattent.<br />
Il ne s’agit pas de tomber dans l’excès inverse où l’on éviterait à un jeune public tout<br />
débordement intempestif pour l’enfermer dans un rôle d’auditeur sage, discipliné, maîtrisant<br />
ses émotions <strong>et</strong> ses explosions de joie ou de peur. Il faut simplement définir l’objectif de telle<br />
ou telle démarche artistique. Le proj<strong>et</strong> n’est pas le même selon qu’on est dans un atelier de<br />
pratique artistique <strong>et</strong> qu’on fait appel à la kinesthésie, voire qu’on sollicite toutes les<br />
exagérations pour faire surgir une énergie encoconnée, ou qu’on est dans le temps du<br />
spectacle : dans ce dernier cas, les enfants en groupe ont tôt fait de détourner l’invitation à<br />
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