La condition du traducteur de Pierre Assouline - Centre National du ...
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VIII. De la reconnaissance 115<br />
<strong>La</strong> visibilité passe par une conquête <strong>de</strong>s médias. Il manque à France-<br />
Culture une émission régulière consacrée exclusivement à la tra<strong>du</strong>ction.<br />
Non un programme corporatiste pour se faire l’écho <strong>de</strong> plaintes récurrentes,<br />
mais bien une tribune littéraire dans laquelle <strong>de</strong>s tra<strong>du</strong>cteurs auraient voix<br />
au chapitre, étant enten<strong>du</strong> qu’ils sont les meilleurs lecteurs d’un texte venu<br />
d’ailleurs. Il en existe bien une en République Tchèque où la situation <strong>du</strong> tra<strong>du</strong>cteur<br />
est pourtant misérable puisqu’il y est payé en moyenne 5 euros pour<br />
un feuillet <strong>de</strong> 1 800 signes alors même que la moitié <strong>de</strong> la littérature proposée<br />
en librairie est tra<strong>du</strong>ite 22 .<br />
Il ne faut pas se résigner à l’indifférence d’une partie <strong>de</strong>s médias à l’endroit<br />
<strong>de</strong>s tra<strong>du</strong>cteurs. Il ne suffit pas <strong>de</strong> se plaindre indivi<strong>du</strong>ellement, auprès<br />
<strong>de</strong> l’organe intéressé, <strong>de</strong> l’ATLF ou <strong>de</strong> la SFT. Il faut dénoncer haut et fort ce<br />
manquement à la déontologie, rétention d’information qui aboutit à nier la<br />
qualité d’auteur <strong>du</strong> tra<strong>du</strong>cteur. Après tout, et comme pour les manifestations<br />
littéraires, il faut oser <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r.<br />
À l’étranger<br />
Il est vrai que le tra<strong>du</strong>cteur français peut s’estimer heureux lorsqu’il<br />
découvre qu’en Italie par exemple, son confrère transalpin n’est le plus<br />
souvent signalé qu’au verso <strong>de</strong> la page <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>, à côté <strong>du</strong> copyright, avec la<br />
mention a cura di, (« par les soins <strong>de</strong> »). Où lorsqu’il entend un autre <strong>de</strong> ses<br />
confrères espagnol celui-là, Miguel Saenz, commenter <strong>de</strong> la sorte l’attitu<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong>s médias ibériques à l’égard <strong>de</strong> la profession :<br />
« Il y a quarante ans en Espagne, nul ne savait qui était l’auteur d’un film.<br />
Jusqu’à ce que les Français inventent le cinéma d’auteur. Les spectateurs savent<br />
désormais qu’un metteur en scène a un nom. Espérons qu’il en sera un jour <strong>de</strong><br />
même pour les tra<strong>du</strong>cteurs 23 ».<br />
<strong>La</strong> notion même <strong>de</strong> « tra<strong>du</strong>cteur littéraire » varie selon les pays. Une<br />
partie <strong>de</strong> l’Europe, dont la France, considère que tout tra<strong>du</strong>cteur d’une<br />
œuvre qui pro<strong>du</strong>it <strong>de</strong>s droits d’auteur est un auteur <strong>de</strong> plein droit ; alors<br />
que l’autre partie <strong>de</strong> l’Europe s’en tient à l’acception la plus stricte, excluant<br />
par là les tra<strong>du</strong>cteurs <strong>de</strong> littérature dite « populaire ». D’aucuns évoquent<br />
souvent « la con<strong>de</strong>scendance » avec laquelle le travail <strong>de</strong> tra<strong>du</strong>ction est parfois<br />
considéré en France :<br />
22. Anne Damour « Babel » in TransLittérature, n o 33, été 2007.<br />
23. Javier Rodriguez Marcos, « Los tra<strong>du</strong>ctores levantan la voz » in El País, 6-6-2009.